Modifications au processus d’avis relatif au marché du travail ainsi qu’au Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) du Canada

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01 décembre 2013

La dernière moitié de l’année 2013 a été le théâtre d’importantes modifications au Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET), en particulier aux règles afférentes à l’obtention d’avis relatifs au marché du travail (AMT).  La plupart de ces modifications sont décrites dans l’annonce gouvernementale intitulée : Changements apportés au Programme des travailleurs étrangers temporaires en vigueur depuis le 31 juillet .

Ces nouvelles mesures ont apporté d’importantes modifications aux exigences en matière de recrutement et d’affichage de postes pour veiller à ce que les employeurs embauchent des travailleurs canadiens qualifiés ou des résidents permanents canadiens avant d’embaucher des travailleurs étrangers. 

Des modifications additionnelles sont prévues alors que des obligations de conformité plus sévères seront imposées aux employeurs en vertu du PTET.

Changements aux règles concernant les AMT

Voici les principales modifications :

1.  Les employeurs qui veulent obtenir un AMT doivent maintenant débourser 275 $ par travailleur étranger temporaire demandé.

2.  Des obligations plus sévères quant au recrutement ont été introduites, ce qui rallonge maintenant le délai d’embauche de travailleurs étrangers selon un permis de travail fondé sur un AMT. Vous trouverez ci-dessous certains des changements apportés.

-  Les employeurs doivent annoncer les postes disponibles au Canada pendant au moins 4 semaines consécutives (auravant on exigeait 14 jours d’affichage) avant de pouvoir faire une demande d’AMT. Cette exigence de 4 semaines s’applique à toutes les méthodes d’affichage et d’annonce.

-  Le poste doit être affiché dans le Guichet emplois national ou sa contrepartie  provinciale / territoriale en ce qui a trait à des positions en Colombie-Britannique, en Saskatchewan, dans les Territoires du Nord-Ouest, au Québec ou a Terre-Neuve-et-Labrador. Avant cela, les employeurs n’étaient pas obligés d’afficher des postes de direction ou des postes professionnels (CNP 0 et A) dans le Guichet emplois ou son équivalent provincial. 

  • Cependant, les directives affichées sur le site Web de Service Canada énoncent également que « Les employeurs désirant recruter des travailleurs qualifiés dans des régions où le Guichet emplois ou ses équivalents provinciaux ou territoriaux ne sont pas reconnus comme étant des méthodes efficaces de recrutement doivent fournir par écrit une note détaillant la méthode à laquelle ils ont recours. Ils doivent joindre cette note à leur demande d'AMT. »

Cette affirmation laisse entendre qu’il est possible pour les employeurs quant à certains postes de cadre d’éviter d’utiliser le Guichet emplois, du moment qu’ils peuvent fournir une solide justification pour cette façon de procéder. Mais cependant rien n’indique comment les responsables de l’examen des demandes les interpréteront.

-  Les employeurs doivent afficher les postes par le truchement d’au moins 2 méthodes additionnelles ou plus de recrutement (en plus de l’affichage au Guichet emplois ou l’équivalent provincial) conformément à la pratique courante pour ce type de postes. Les employeurs doivent aussi choisir au minimum une méthode qui a une portée nationale pour afficher le poste. Cela comprend les sites Web d’emplois généraux ou les sites Web spécialisés axés sur une occupation ou un secteur particulier.

-  Les exigences en matière de contenu des offres d’emploi ont aussi été resserrées. Les employeurs sont maintenant tenus d’inclure l’information relative au salaire pour des postes CNP 0 et A, alors qu’auparavant cette obligation ne s’appliquait qu’à des postes CNP B et à des postes peu spécialisés.

-  Les employeurs doivent continuer d’annoncer le poste disponible et de chercher activement des Canadiens qualifiés ainsi que des résidents permanents pour le combler jusqu’à ce qu’ils reçoivent un avis selon lequel un AMT a été émis. Les employeurs devront être à même de prouver qu’ils ont fait des efforts continus durant la période de traitement de l’AMT à Service Canada.

-  Ces nouvelles exigences en matière d’affichage ne s’appliquent pas au Programme concernant les aides familiaux résidants, au Programme des travailleurs agricoles saisonniers ainsi qu’au Volet agricole.

-  Vous trouverez plus d’information relative au règles d’embauche pour des postes spécialisés sous l’onglet « Recrutement et affichage » -  Service Canada

3.  Le français et l’anglais sont les seules langues qui peuvent constituer des exigences requises pour un poste, tant dans les demandes d’AMT que dans les affichages des employeurs qui cherchent à embaucher des travailleurs étrangers, à moins que les employeurs puissent clairement démontrer que la connaissance d’une autre langue est essentielle pour le poste et est conforme aux exigences habituelles liées à ce poste. Reste à voir comment les responsables interpréteront ce qui constitue une réelle exigence en matière de langue.

4.  Le formulaire de demande d’AMT a été modifié afin d’inclure des questions additionnelles relatives à l’impartition et aux répercussions sur le marché du travail canadien. La section relative à la déclaration de l’employeur a également été agrandie. Par exemple, les employeurs doivent maintenant déclarer que l’entrée du travailleur étranger ne « mènera pas à des pertes d’emploi, maintenant ou dans un avenir prévisible, pour des Canadiens ou des résidents permanents pour la durée de l’AMT et les deux années suivantes. »

Répercussions pour les employeurs

Les employeurs doivent être au fait des nouvelles règles. 

Ceux qui ont déjà utilisé le PTET auparavant, doivent veiller à ne pas utiliser de vieux formulaires ou à se fier à d’anciennes pratiques d’affichage de postes. 

Le défaut de respecter les exigences en matière de recrutement ne sera découvert que par le responsable de l’évaluation de la demande au moment de procéder à l’évaluation, ce qui aura lieu plusieurs semaines après le dépôt de la demande. Si la méthode d’affichage s’avère inappropriée, il est fort probable que la demande d’AMT soit refusée. L’employeur devra alors recommencer tout le processus de demande du début en ayant d’abord affiché le poste pendant au moins 4 semaines. Par conséquent, il est impératif que les employeurs respectent les directives en matière de recrutement dès le début du processus.

Il reste à voir comment les responsables de l’examen des demandes traiteront certaines des nouvelles directives et les problèmes potentiels qui en découlent. Par exemple, les nouvelles directives indiquent que le salaire et les avantages sociaux relatifs à tous les emplois doivent être divulgués, y compris ceux des postes de direction. Le nom de l’employeur doit également figurer dans tous les affichages de postes. 

Les nouvelles exigences en matière de contenu pourraient avoir d’importantes répercussions sur les employeurs. Par exemple, l’idée de dévoiler publiquement les salaires ou échelles salariales des cadres supérieurs soulève des préoccupations. De plus, l’exigence selon laquelle il faut divulguer le nom de l’employeur signifie que si un postulant est un candidat sortant pour lequel l’employeur cherche à obtenir un nouveau AMT, ce dernier se retrouve obligé d’annoncer de manière très publique qu’il cherche à combler le poste. On pense également que ces nouvelles exigences pourraient avoir des conséquences négatives sur les relations avec les clients. En effet, si les clients d’une entreprise s’aperçoivent que cette dernière cherche à remplacer un cadre supérieur, il se pourrait que cela soulève des préoccupations à l’égard de l’entreprise. Les compétiteurs pourraient entendre parler de l’annonce et s’en servir comme d’un avantage concurrentiel auprès des clients. Difficile de dire si Service Canada prêtera l’oreille à ce type de préoccupations au moment d’évaluer les demandes d’AMT pour des postes de cadre supérieur déposées aux termes des nouvelles directives. 

Les AMT visant les travailleurs étrangers établis au Québec

Habituellement, les employeurs qui embauchent des travailleurs étrangers temporaires au Québec en conformité avec un AMT doivent également obtenir une autorisation du MICC (ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles) du Québec dans le cadre du processus. À cet effet, il faut déposer une demande auprès du MICC (voir la publication Embaucher des travailleurs étrangers temporaires au Québec pour obtenir de l’information au sujet du processus). En outre, il faut déposer auprès du MICC une copie de la demande d’AMT déposée auprès de Service Canada de même que tout autre document exigé par le MICC.

Il a été annoncé en octobre dernier que le MICC cessera de traiter les demandes d’AMT soumises en anglais (à l’exception des demandes effectuées aux termes du Programme des aides familiaux résidants). Ainsi, les demandes d’AMT visant des travailleurs prévoyant s’établir au Québec et nécessitant l’approbation du MICC devront être présentées en français. Veuillez consulter le lien suivant pour plus d’information : Avis sur les exigences linguistiques des AMT

Examens de conformité des employeurs

Les employeurs ayant recours au PTET doivent également avoir en tête que Service Canada a augmenté ses activités de surveillance de la conformité. Un employeur peut être choisi aléatoirement et soumis à un Examen de conformité des employeurs (ECE). Dans le cadre d’un ECE, un agent de conformité étudie les AMT antérieures de l’employeur afin de s’assurer que celui-ci a fourni au travailleur étranger temporaire « essentiellement les mêmes » conditions que celles qui sont énoncées dans les demandes et confirmations d’AMT antérieures.

En cas d’une conclusion de non-conformité, l’employeur peut perdre le droit d’utiliser le PTET pendant une période de deux ans.

La tenue d’un ECE a pour effet de suspendre le traitement de la demande d’AMT en cours qui a déclenché l’ECE.  Il ne semble pas y avoir de protocole ni d’échéancier établis quant aux ECE, ce qui peut s’avérer très frustrant pour l’employeur, surtout lorsqu’il est question d’un candidat muni d’un permis de travail qui risque d’expirer avant que l’ECE ne soit menée à terme.  

Compte tenu de l’importance grandissante accordée à la conformité, il est essentiel que les employeurs s’assurent de fournir le salaire, l’horaire et les conditions d’emploi énoncés dans la confirmation d’AMT émise par Service Canada.  Il est donc conseillé aux employeurs de conserver des registres afin de prouver leur conformité. 

En outre, avant d’apporter une quelconque modification aux conditions d’emploi du titulaire d’un permis fondé sur un AMT, il faut procéder à une vérification afin de déterminer s’il est nécessaire d’obtenir un nouvel AMT. 

La « Déclaration de l’employeur » signée par l’employeur dans le formulaire de demande d’AMT comprend l’affirmation suivante : « J'aviserai immédiatement Service Canada de tout changement ultérieur lié aux conditions d'emploi du travailleur étranger. »

Par conséquent, les employeurs doivent penser à aviser Service Canada lorsqu’ils effectuent une modification quelconque aux conditions d'emploi afin que celle-ci soit consignée au dossier. Cette information sera utile si l’employeur doit faire l’objet d’un ECE subséquent et aidera également à déterminer s’il est nécessaire d’obtenir un nouvel AMT, car s’il s’agit d’une modification suffisamment importante, il pourrait s’avérer nécessaire d’évaluer le marché du travail afin de vérifier s’il y des Canadiens qualifiés qui sont intéressés au poste. 

Changements à venir – nouveaux règlements en vertu de la LIPR

De nouveaux règlements seront établis aux termes de la LIPR, probablement d’ici la fin 2013, lesquels auront pour effet d’amplifier encore davantage les obligations des employeurs en matière de conformité.  En vertu des nouveaux règlements, les pouvoirs d’enquête des agents de Service Canada et d’Immigration Canada seront considérablement augmentés. Par exemple, on prévoit que ces derniers seront investis du pouvoir d’entrer sur les lieux sans mandat et d’exiger des documents afin d’enquêter sur la non-conformité avec les règles du PTET. De plus, dans le cadre d’examens de conformité, il sera permis de remonter jusqu’à six ans en arrière, comparativement à la période actuelle, qui est fixée à deux ans.

Nous publierons une nouvelle mise à jour lorsque la version finale des règlements sera disponible.

Conclusion

 

En ce qui a trait à la conformité, la situation évolue en défaveur des employeurs. Les employeurs qui ont recours au PTET en vue de combler les besoins en ressources humaines et en aptitudes devront bien se renseigner sur les changements énoncés dans le présent article, compte tenu des pénalités pouvant être encourues pour non-conformité et des potentielles conséquences négatives qui en découleraient sur leurs activités.

Cette nouvelle réalité signifie que les employeurs doivent mettre en œuvre des politiques et des pratiques exemplaires à l’interne afin de minimiser le risque de non-conformité. Ces derniers doivent notamment adopter des politiques et pratiques liées au recrutement, à l’embauche et à la gestion d’employés étrangers temporaires. Il faut également mettre en œuvre des politiques sur la gestion et la conservation appropriées des documents, afin que les employeurs puissent réagir rapidement et efficacement lorsqu’on leur demande de fournir des documents dans le cadre d’un ECE ou d’une enquête. 


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