Les investisseurs étrangers qui souhaitent acheter des terres agricoles au Canada devraient consulter leurs conseillers juridiques avant de faire une offre. En effet, certaines provinces ont imposé des restrictions quant au nombre d'acres que les particuliers ou les sociétés de l'étranger peuvent posséder, alors que d'autres provinces permettent à des non-résidents d'acheter des terres agricoles sans aucune restriction.

Vous trouverez ci-dessous un tableau résumant les restrictions relatives à la propriété étrangère, de la Colombie-Britannique au Québec. Le reste de cet article fournit de plus amples détails quant aux régimes législatifs ou aux politiques en place dans ces provinces.

Colombie-Britannique Aucune restriction quant à la propriété étrangère. Les utilisations des terres de la réserve des terres agricoles (Agricultural Land Reserve) sont réglementées par l'Agricultural Land Commission.
Alberta Les non-résidents et les sociétés sous contrôle étranger peuvent détenir jusqu'à 20 acres de terres agricoles, sous réserve de certaines restrictions pour les entreprises commerciales (y compris des limites sur l'extraction ou le traitement de ressources naturelles et les complexes d'habitation).

Foreign Ownership of Land Regulations, Alta Reg 160/1979
Saskatchewan Les non-résidents et les entités étrangères peuvent détenir jusqu'à 10 acres de terres agricoles en Saskatchewan. Les entités qui sont partiellement sous contrôle étranger, mais contrôlées par des résidents de la Saskatchewan ou leurs sociétés d'exploitation agricole, peuvent détenir jusqu'à 320 acres.

The Saskatchewan Farm Security Act, SS 1988-89, c S-17.1, The Saskatchewan Farm Security Regulations, RRS c S-17.1 Reg 1
Manitoba Les non-résidents et les entités étrangères peuvent détenir jusqu'à 40 acres de terres agricoles.

Loi sur la propriété agricole, CPLM c F35
Ontario Il n'y a aucune restriction sur la propriété étrangère. Les utilisations des terres agricoles à fort rendement sont réglementées par les autorités chargées de la planification en vertu de la Déclaration de principes provinciale de 2005.
Québec Les non-résidents et les entités sous contrôle étranger doivent obtenir une permission pour acheter plus de 4 hectares (ou environ 10 acres) de terres agricoles de la Commission de la protection du territoire agricole du Québec.

Loi sur l'acquisition de terres agricoles par des non-résidents, RSQ c A-4.1

Colombie-Britannique

En Colombie-Britannique, il n'y a aucune loi qui impose des restrictions sur la propriété étrangère de terres agricoles. Il existe cependant une agence en Colombie-Britannique qui réglemente les utilisations non agricoles de certaines terres agricoles. L'Agricultural Land Commission a intégré environ 4,7 millions d'hectares de terres dans la réserve de terres agricoles de la Colombie-Britannique, qui est en fait une zone d'utilisation des terres dans laquelle l'agriculture a priorité.1

L'Agricultural Land Commission a produit un rapport en novembre 2010 qui soulignait que les intervenants avaient partagé leurs préoccupations relativement à la propriété étrangère de terres dans la réserve de terres agricoles lors de consultations sur les façons d'améliorer l'organisme. Cependant, ni le rapport de 2010, ni de plus récentes publications de l'Agricultural Land Commission ne recommandent la mise en œuvre de modifications législatives pour contrôler la propriété de terres. Donc, pour le moment, on ne prévoit aucune modification aux lois de la Colombie-Britannique en ce qui a trait à la propriété étrangère de terres agricoles.

Alberta

La législation de l'Alberta impose une limite de deux parcelles de 20 acres au total en ce qui a trait à la propriété étrangère de terres agricoles (à l'exception des mines et des minéraux). Seuls les citoyens canadiens, les résidents permanents et les sociétés constituées au Canada et sous contrôle canadien sont soustraits à ces règlements. Si un particulier étranger acquiert une participation dans des terres contrairement aux règlements, un tribunal peut ordonner la vente judiciaire de la participation du propriétaire étranger dans cette terre.

La réglementation ne s'applique cependant pas à certaines utilisations commerciales des terres, y compris les acquisitions de terres aux fins de :

  • toute activité pour laquelle une ordonnance d'accès aux terres peut être octroyée en vertu de la loi intitulée The Surface Rights Act (Alberta);
  • l'établissement d'installations industrielles ou commerciales visant le traitement, la fabrication ou le transport, si la zone pour toute installation distincte n'excède pas 80 acres;
  • la construction d'un pipeline, d'une raffinerie, d'une ligne de transmission, ou d'une usine de production d'électricité;
  • l'extraction de sable, de gravier, d'argile, de marne, si la zone pour tout projet distinct n'excède pas 160 acres; et
  • l'établissement d'une résidence sur un maximum de 20 acres ou l'élaboration d'un complexe d'habitations sur un maximum de 80 acres.

Toutefois, le propriétaire doit se départir de sa participation dans les terres dans les trois ans suivant l'achèvement de cet objectif ou l'abandon de ce dernier.

Saskatchewan

En Saskatchewan, les non-résidents peuvent acquérir jusqu'à 10 acres de terres agricoles de la Saskatchewan (à l'exception des minéraux et des terres servant principalement à l'extraction, au traitement ou au transport des minéraux). Les « résidents » sont des citoyens canadiens ou des particuliers qui résident au Canada au moins 183 jours par année.

Les entités partiellement détenues par des non-résidents, mais contrôlées par des résidents de la Saskatchewan ou leurs sociétés d'exploration agricole, peuvent acheter jusqu'à 320 acres de terres agricoles, alors qu'une limite de 10 acres est imposée aux sociétés sous contrôle étranger et autres entités. Le Farm Land Security Board peut accorder son consentement à des entités étrangères pour l'acquisition de plus de 10 acres selon n'importe quelle condition qu'il estime acceptable. Le conseil évalue l'intérêt public et l'effet potentiel sur la Saskatchewan dans l'octroi d'exemptions.

La sanction imposée pour défaut de se conformer à la réglementation est une amende allant jusqu'à 10 000 $ pour un particulier et jusqu'à 100 000 $ pour une société. Le Farm Land Security Board peut ordonner qu'un propriétaire étranger se départe des terres, et peut obtenir une ordonnance pour aider l'application, y compris une injonction, une déclaration de nullité ou une vente judiciaire.

Manitoba

La législation au Manitoba permet à des étrangers et à des entités étrangères d'acquérir jusqu'à 40 acres de terres agricoles, à moins de l'octroi d'une exemption par le conseil2 ou à moins que la terre agricole ne soit achetée dans le but de produire de l'énergie éolienne qui sera vendue à Manitoba Hydro. La notion de « terre agricole » exclut les minéraux (autres que le sable et le gravier), les terres utilisées pour l'extraction ou le traitement de ce type de minéraux et les terres utilisées pour les services de télécommunications, de chemins de fer et de pipeline. Au moment d'évaluer les demandes d'exemptions, l'Office de la propriété agricole du Manitoba tiendra compte de la question à savoir si l'acquisition pourrait apporter un avantage significatif à la province, ou si le demandeur prévoit résider au Manitoba pendant une période de temps raisonnable.

Seules les personnes suivantes peuvent acheter des terres au Manitoba sans restriction :

  • les citoyens canadiens et les résidents permanents;
  • les sociétés contrôlées par des fermiers canadiens et leurs familles;
  • les municipalités, les districts d'administration locale et les organismes gouvernementaux;
  • les sociétés privées et autre entités appartenant à des intérêts canadiens à 100 %;
  • les particuliers qui convainquent l'Office de la propriété agricole du Manitoba qu'ils ont l'intention de devenir résidents permanents ou citoyens canadiens dans les deux années suivant l'acquisition de leur participation dans la terre agricole.

Toute entité étrangère qui acquiert plus de 40 acres doit se départir de son excédent de superficie en acres en moins d'un an. L'Office de la propriété agricole du Manitoba peut obtenir une ordonnance de la cour pour procéder à une vente judiciaire ou annuler la participation dans la terre. Le défaut de se conformer à la législation peut donner lieu à l'imposition d'une sanction allant jusqu'à 50 000 $.

Ontario

La planification de l'utilisation des terres agricoles en Ontario est régie par la Déclaration de principes provinciale de 2005 issue de la Loi sur l'aménagement du territoire. Ni la déclaration de principes, ni la législation n'imposent de restrictions sur les investissements dans les terres agricoles en Ontario.

Le service de l'urbanisme régit cependant l'utilisation et l'ajustement des parcelles de terres dans les zones agricoles à fort rendement, lesquelles sont désignées en fonction du système de classification de l'Inventaire des terres du Canada.

Le ministre de l'Agriculture est tenu par la loi de réviser la déclaration de principes tous les cinq ans. Cet examen a commencé en mars 2010, et le gouvernement accepte en ce moment de la rétroaction relative à l'ébauche des politiques. Il n'y a actuellement aucune modification prévue aux politiques relatives à la propriété étrangère de terres agricoles.

Québec

Au Québec, les non-résidents doivent demander l'autorisation de la Commission de protection du territoire agricole du Québec pour acquérir plus de 4 hectares (ou environ 10 acres) de terres agricoles.

De récentes modifications à la législation ont davantage restreint l'accès à des terres agricoles pour les investisseurs étrangers. Pour être admissible à titre de résident du Québec selon les nouvelles règles, un particulier doit être citoyen canadien ou résident permanent, et avoir vécu au Québec pendant au moins 1 095 jours (c'est-à-dire trois ans) au cours des quatre dernières années précédant immédiatement l'acquisition de la terre agricole.

Une société ou toute autre personne morale est réputée être résidente du Québec si une majorité des actions de son capital-actions sont détenues par des résidents du Québec; une majorité de ses administrateurs sont des résidents du Québec; et qu'elle n'est pas directement ou indirectement contrôlée par des non-résidents.

Au cours de l'examen d'une demande d'acquisition d'une terre agricole par un non-résident, la Commission accordera son autorisation si :

  • la terre en question n'est pas propre à la culture du sol ou à l'élevage des animaux; ou
  • le non-résident prévoit s'installer au Québec et y habiter pendant trois années sur les quatre prochaines et deviendra un citoyen canadien ou un résident permanent à la fin de cette période.

Les modifications comprennent aussi l'introduction d'une limite annuelle sur le nombre d'hectares qu'un non-résident peut acquérir. La Commission peut autoriser l'acquisition de seulement 1 000 hectares de terres agricoles par année par des sociétés étrangères ou des particuliers étrangers qui ont l'intention de s'installer au Québec; elle peut cependant examiner des demandes additionnelles.

Toute acquisition de terres agricoles au Québec effectuée en contravention à la législation est frappée de nullité. La Commission peut ordonner à un non-résident de se départir de la terre agricole dans les six mois suivant la signification de l'ordonnance, à défaut de quoi elle peut demander une autorisation de procéder à une vente judiciaire de la terre. Acheter ou vendre une terre agricole en contrevenant sciemment à la législation peut donner lieu à une amende d'au moins 10 % de la valeur de la terre agricole pour un particulier ou d'au moins 20 % dans le cas d'une société ou de toute autre personne morale.


1 La loi intitulée Agricultural Land Commission Act, SBC 2002, c 36 fournit le cadre législatif de l'Agricultural Land Commission ainsi que pour la préservation des terres agricoles en Colombie-Britannique.

2 En vertu de la législation actuelle, le conseil pertinent est l'Office de la propriété agricole du Manitoba. Si le projet de loi 39 (Loi sur l'efficacité gouvernementale (modification ou remplacement de diverses lois - fusion d'organismes et non-participation aux nominations)) est adopté et promulgué, l'Office de la propriété agricole du Manitoba sera éliminé et ses fonctions et responsabilités seront cédées à la Commission agricole du Manitoba.