Le gouvernement du Québec a présenté la semaine dernière le projet de loi no 108, Loi favorisant la surveillance des contrats des organismes publics et instituant l’Autorité des marchés publics (ci‑après, le « Projet »). Le Projet vise la création de l’Autorité des marchés publics (ci-après, l’« Autorité ») qui sera chargée de surveiller l’ensemble des contrats des organismes publics. Pour les personnes ou entreprises souhaitant obtenir les contrats publics, il est important de prendre connaissance de ce Projet et de s'adapter aux changements importants dès que le Projet aura été adopté et sanctionné.

Missions et pouvoirs de l’Autorité

Le Projet prévoit que l'Autorité a notamment pour mission de surveiller les processus d'adjudication et d'attribution des contrats publics. À cette fin, toute personne intéressée peut porter plainte à l'Autorité relativement à un processus d’adjudication ou d'attribution d’un contrat public lorsqu'elle est en désaccord avec la décision de l'organisme public. L'Autorité peut même, de sa propre initiative ou sur demande du président du Conseil du trésor, examiner un processus d’adjudication ou d’attribution d’un contrat. De plus, les contrats publics conclus en contravention d'une ordonnance de l'Autorité seront résiliés de plein droit.

Afin de remplir ses fonctions, le Projet confère différents pouvoirs à l'Autorité, incluant des pouvoirs de vérification et d'enquête, des pouvoirs de rendre des ordonnances et de formuler des recommandations, ainsi que le pouvoir de conclure des ententes avec les organismes publics pour favoriser l'application du Projet une fois qu’il aura été adopté et sanctionné.

Dans le cadre d’une vérification et d’enquête, l'Autorité peut exiger des personnes présentes tout renseignement pertinent ainsi que la production de tout livre, registre, compte, contrat, dossier ou autre document se rapportant à un contrat public et en tirer copie. Toute personne qui a la garde, la possession ou le contrôle des documents pertinents doit en donner communication à l'Autorité et lui en faciliter l’examen.

En ce qui concerne les ordonnances et recommandations, l’Autorité peut notamment ordonner à un organisme public de modifier ses documents d’appel d’offres public, d’annuler l’appel d’offres public ou de ne pas donner suite à son intention de conclure de gré à gré un contrat public. De plus, l’Autorité peut suspendre l’exécution ou résilier un contrat public dont elle assume la gestion contractuelle si elle est d'avis que la gravité des manquements justifie une telle suspension ou résiliation.

Changements importants

Le Projet apporte des changements importants à la Loi sur les contrats des organismes publics, le cadre juridique des contrats publics présentement en vigueur. En vertu du Projet, l'Autorité, en remplaçant l'Autorité des marchés financiers (ci-après, l’« l’AMF »), va dorénavant être responsable d’émettre les autorisations requises pour une entreprise souhaitant conclure un contrat avec un organisme public. L'Autorité pourra même déterminer qu’une autorisation de contracter est requise à l’égard des contrats publics ou sous-contrats publics même s’ils comportent un montant de dépense inférieur. Elle pourra aussi exiger d’une entreprise partie à un contrat public ou à un sous-contrat public qui est en cours d’exécution d’obtenir une autorisation de contracter dans le délai qu’elle indique.

Par ailleurs, le registre des entreprises non admissibles aux contrats publics, présentement sous l'administration du Conseil du trésor, sera géré par l’Autorité. Le registre indique non seulement chaque entreprise inadmissible aux contrats publics, mais aussi (i) la décision de l’Autorité quant au refus ou à la révocation d’une autorisation; (ii) la déclaration de culpabilité d’une entreprise incluse dans un jugement définitif; (iii) les actionnaires détenant 50% des droits de vote d’une entreprise inadmissible. 

Un autre changement important proposé par le Projet sera que les organismes publics devront publier un avis d’intention permettant à toute entreprise de manifester son intérêt avant la conclusion de certains contrats de gré à gré. Les contrats visés seront ceux prévoyant une dépense égale ou supérieure au seuil d'appel d'offres public. Les organismes publics estiment qu’un appel d’offres public à l’égard de ce type de contrat ne servirait pas l'intérêt public.

Commentaires

En instituant l’Autorité et en y conférant divers pouvoirs pour gérer l’ensemble des contrats des organismes publics, le Projet renforce la surveillance du marché des contrats publics et augmente le niveau de transparence dans le processus d’adjudication ou d’attribution des contrats publics. De plus, le Projet prévoit un processus plus structuré de plainte pour toute personne en désaccord avec la décision de l’organisme public tout en assurant la confidentialité et la protection du plaignant. Ceci milite en faveur des entreprises désirant un traitement juste et équitable de leurs soumissions pour des contrats publics.

Toutefois, avec le changement de gouvernance de l’AMF à l’Autorité et des exigences plus rigoureuses, le Projet va néanmoins alourdir le fardeau de la conformité pour les entreprises souhaitant contracter avec les organismes publics. En effet, l’Autorité pourra exiger une autorisation de contracter même pour des contrats ayant un montant de dépense inférieur au montant déterminé par le gouvernement, ou même si une entreprise est en cours d’exécuter un contrat public. Par ailleurs, lors de sa vérification, l'Autorité pourra exiger d’une entreprise tout renseignement pertinent ainsi que la production de tout livre, registre, compte, contrat, dossier ou autre document en rapport au contrat public en question.

En conclusion, malgré le fait que le Projet demeure sujet à des débats parlementaires, il est important pour toute personne ou entreprise ayant un intérêt à contracter avec les organismes publics de se mettre à jour. Le texte intégral du Projet est disponible sur le site de l’Assemblée nationale ici.

Nous, Gowling WLG, restons disponibles pour répondre à toutes vos questions relativement au Projet. Nous allons suivre les développements à cet égard et les analyserons dès l’adoption et la mise en vigueur du Projet.