Susan H. Abramovitch
Associée
Chef – Groupe du droit du divertissement et du sport
Article
L’année dernière a été le théâtre d’un nombre sans précédent de débats sur le sexisme, le racisme et les structures inégalitaires du pouvoir dans la société en général. L’industrie du divertissement avec l’avènement du mouvement #MoiAussi (#MeToo) a été particulièrement ciblée comme un domaine où règnent l’inégalité et la discrimination.
Dans son discours de remerciement pour son oscar de la meilleure actrice, Frances McDormand a déclaré ceci : « Nous avons tous des histoires à raconter et des projets que nous voulons faire financer », avant de clore son allocution par deux mots : « Clause d’inclusion », invitant ainsi l’auditoire à réfléchir à ce concept.
Selon un communiqué de presse publié par la Annenberg Inclusion Initiative (en anglais seulement), une clause d’inclusion est « un avenant ajouté au contrat d’un acteur/créateur de contenu qui stipule que les histoires et ceux qui les racontent doivent refléter le monde dans lequel nous vivons en réalité, et non pas une petite fraction du bassin de talents seulement. » [TRADUCTION]
Une clause d’inclusion stipulerait que les personnages dans un film doivent refléter le monde dans lequel nous vivons, ce qui comprend la parité des sexes à 50 pour cent, 40 pour cent d’inclusion pour les personnes de couleur, 5 pour cent pour les membres de la communauté LGBTQ, et 20 pour cent pour les personnes handicapées.
Pour que les clauses d’inclusion aident à combattre la crise de l’égalité au cinéma, elles doivent être appuyées par la crème de la crème des talents de l’industrie. Ce sont en effet ces derniers qui pourront utiliser leur pouvoir pour faire progresser la cause, en exigeant cette parité dans leurs contrats d’artistes, surtout ceux qui travaillent dans les plus prestigieux projets. Il reste que le concept de « clause » est plus souvent associé au domaine de la musique. Appelées « clauses de tournée », les musiciens y détaillent leurs exigences pratiques dans le cadre de leur tournée comme la sécurité et les assurances, et y dressent aussi parfois la liste de leurs exigences en matière de luxe et autres extras.
En s’inspirant de la clause traditionnelle, les acteurs les plus célèbres peuvent ajouter une clause d’égalité ou une clause d’inclusion à leur contrat, exigeant la représentation des groupes sous-représentés ou marginalisés dans un projet, et ce, tant devant que derrière la caméra. Dans le cas de la violation des dispositions d’une clause de ce type par un studio qui aurait omis de faire des efforts de bonne foi pour embaucher une distribution et une équipe reflétant la diversité réelle de la société, un acteur pourrait invoquer une violation de son contrat. Cette mesure pourrait avoir de graves conséquences financières pour le studio et entacher sa réputation.
Lors de la Semaine canadienne de la musique de 2018, des données présentées ont aussi démontré que l’inégalité est aussi courante dans cette industrie. Par exemple, la majorité des musiciens dans les festivals de musique sont des hommes blancs, peu de femmes occupent des postes de technique dans l’industrie, et les producteurs de disques sont habituellement des hommes. Un appel à l’action a été lancé aux membres de l’industrie pour trouver une solution au problème et créer un changement en profondeur et à grande échelle.
Dans la foulée de ce mouvement, nous nous demandons si les musiciens peuvent tirer parti de leur influence pour exiger des changements au sein de l’industrie de la musique, comme il a été suggéré que les acteurs le fassent dans l’industrie cinématographique.
À notre avis, les clauses d’inclusion pourraient également être utilisées de cette manière par les musiciens réputés. Ces derniers peuvent négocier l’ajout de clauses à leurs contrats avec les maisons de disque, les éditeurs de musique et les entreprises de tournée exigeant que la diversité fasse partie intégrante de leurs projets. Ils pourraient, par exemple, demander que les membres du personnel clé œuvrant sur ces projets reflètent raisonnablement la diversité du monde dans lequel nous vivons.
Toutefois, les clauses d’inclusion ne doivent pas être le seul outil utilisé au sein de l’industrie de la musique pour favoriser le changement en matière de diversité et d’égalité. Sur ce point, nous souhaitons attirer l’attention sur les importantes contributions de Keychange (en anglais seulement) – une organisation qui est parvenue à obtenir des engagements d’au moins 85 festivals de musique internationaux, y compris 10 festivals canadiens – en vue d’atteindre la parité entre les sexes d’ici 2022.
En exigeant la diversité et l’égalité au moyen de clauses d’inclusion et autres mesures, les musiciens et autres intervenants clés peuvent user de leur influence pour changer les structures traditionnelles du pouvoir au sein de l’industrie de la musique et mener ainsi, selon nous, à un espace plus tolérant, créatif, et profitable pour tous.
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