Kavi Sivasothy
Associate
Article
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En 2020, le fabricant polonais de jeux vidéo CD Projekt Red (CDPR) a été confronté à un exemple extrême de la loi de Murphy. Peu après le lancement de Cyberpunk 2077, l'un des jeux vidéo les plus attendus des cinq dernières années, il a été la cible d'une attaque par rançongiciel qui a entraîné non seulement le gel de ses actifs, mais leur exfiltration également (lien, en anglais). Et comme un malheur ne vient jamais seul, les pirates l'ont menacé de vendre aux enchères certains de ses plus importants actifs de propriété intellectuelle, dont les codes sources de ses plus célèbres jeux vidéo (lien, en anglais), au moment même où le studio cherchait à composer avec les réactions négatives face au grand lancement de Cyberpunk 2077 et à son échec commercial.
Devant cette situation, CDPR a réagi de manière plutôt surprenante : le fabricant a refusé de payer la rançon. Moins d'un jour après avoir pris connaissance de l'attaque, il a publié une copie de la lettre de rançon ainsi qu'un communiqué dans lequel il déclarait non seulement n'avoir aucune intention de payer, mais défiait aussi les pirates d'exécuter leur menace et de vendre les données volées (lien, en anglais).
Ce refus n'est pas resté sans conséquences. En effet, la nouvelle de l'attaque a fait chuter le cours de l'action de CDPR, et les codes sources de ses jeux les plus populaires ainsi que les renseignements personnels de ses employés se sont mis à apparaître un peu partout. Le fabricant a admis que la fuite de données pourrait même compromettre ses prochains projets (lien, en anglais).
Ces répercussions n'ont étonné personne et étaient faciles à prévoir. La question se pose : pourquoi CDPR a-t-il exprimé son refus de céder si rapidement et si catégoriquement? Si j'étais consultant en matière de violation de données, je dirais que CDPR a été en mesure de tenir tête à ses rançonneurs parce qu'il était suffisamment préparé pour déterminer et évaluer les conséquences d'une telle attaque. D'ailleurs, CDPR n'est pas le seul à avoir refusé de se plier aux demandes d'auteurs de menace.
À l'époque des premières attaques par rançongiciels, il était commun pour les victimes de payer les rançons exigées. Aujourd'hui, de plus en plus d'organisations refusent de le faire (lien, en anglais). Craignent-elles de plus en plus que le fait de payer ne garantisse pas que leurs opérations seront rétablies de manière sûre et sécurisée? Ou sont-elles au contraire plus confiantes en leur propre capacité de se remettre d'un piratage?
Ceci étant dit, seule une poignée d'organisations peut se permettre de dire « non » à une demande de rançon. Pour citer un exemple, contrairement à un nettoyeur de quartier, un hôpital fait face à des enjeux bien différents, mais une chose est certaine : toutes les entités doivent se montrer proactives et s'assurer d'être en mesure 1) d'agir rapidement en cas de fuite, 2) de limiter les dommages et 3) de se réserver l'option de ne pas réagir à la menace.
Voici donc six mesures à prendre dès aujourd'hui pour mieux résister aux cybermenaces en tant qu'organisation :
En cas de cyberattaque, les organisations doivent être fin prêtes à rassembler rapidement les informations essentielles et agir en conséquence. Voici quelques questions auxquelles elles doivent pouvoir répondre sur le champ :
Faire l'objet d'une attaque par rançongiciel est comparable à être victime d'un vol à main armée perpétré par un fantôme, aussi surréel que cela puisse sembler. Les organisations qui ont l'habitude de mettre des jours voire des semaines à prendre des décisions doivent pouvoir agir dans l'espace de quelques heures seulement. C'est en ayant une feuille de route de gestion de crise et en analysant rapidement la situation qu'une organisation peut grandement améliorer sa capacité de réaction face à une menace, peu importe comment cette dernière se manifeste.
Dans le cas de CDPR, le fabricant de jeux vidéo a décidé en moins d'une journée qu'il allait (et qu'il pouvait) refuser de payer la rançon, une décision qui a dû être difficile à prendre. Il a dû soupeser d'une part les risques de se faire voler des informations importantes et confidentielles, et d'autre part, le fait de payer la rançon pour restaurer ses systèmes et récupérer ses actifs.
Fait à souligner, les organisations victimes d'une cyberattaque n'ont pas à se défendre seules. En effet, en réponse à la hausse des incidents de cybersécurité, toute une industrie de services est née. Des consultants versés en violation de données (qui sont souvent des avocats), des enquêteurs judiciaires et des négociateurs peuvent offrir une expertise et des conseils rapides aux organisations qui en ont besoin pour traverser une crise. Par ailleurs, les forces de l'ordre et les organismes de réglementation sont souvent prêts à intervenir lorsqu'on leur demande. Bref, les ressources sont nombreuses, et les avocats, par exemple, peuvent aider les organisations à être proactives en les aidant à créer une feuille de route, à définir les risques et à faire des simulations sur papier. Ainsi, plus une organisation se prépare avant une crise, plus il lui sera facile de dire, le moment venu : « Rançon? Pas question! ».
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