L’assurance automobile fondée sur l’usage soulève des questions de protection de la confidentialité

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01 juin 2015

De nombreux conducteurs d’automobiles canadiens souscrivent dorénavant une assurance dont la tarification est fondée sur l’usage afin de profiter de rabais sur leurs primes d’assurance (TAFU : Tarification de l’assurance fondée sur l’usage). Au moyen de la télématique, ces programmes fondés sur l’usage enregistrent diverses données liées à des facteurs comme l’accélération, le freinage brusque, le kilométrage parcouru, les heures de déplacement et les virages serrés pour analyser le comportement au volant et récompenser la conduite sécuritaire. Il est en effet maintenant possible de surveiller ces comportements au volant grâce à de nouvelles technologies intégrées à des applications dans des téléphones intelligents.

Actuellement, seuls certains assureurs en Ontario et au Québec offrent de tels programmes de TAFU s’appuyant sur l’utilisation de données liées à la télématique. On prévoit que des programmes similaires seront lancés en Alberta et en Nouvelle-Écosse dans la prochaine année.

Cette technologie peut s’avérer très utile pour certains groupes de consommateurs, comme les jeunes conducteurs, permettant ainsi aux assureurs de fixer les primes selon les habitudes réelles de conduite de ceux-là plutôt que selon des statistiques élaborées à partir de données démographiques similaires. La Commission des services financiers de l’Ontario (« CSFO ») a déclaré que ces programmes incitent également à conduire prudemment et pourraient réduire le nombre d’accidents de la route.  

Cependant, des préoccupations ont été soulevées en ce qui a trait à l’usage de cette technologie, en particulier relativement à la protection de la confidentialité et à l’utilisation des données recueillies.

Renseignements personnels

Dans un bulletin publié en octobre 2013 traitant du programme de TAFU, la CSFO a déclaré que les données recueillies au moyen de technologies de TAFU devraient être traitées comme des « renseignements personnels » tels que définis dans la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, et que les assureurs devraient se conformer à toutes les lois applicables. Cette loi comporte des exigences selon lesquelles les organisations sont tenues d’obtenir le consentement d’un particulier pour recueillir, utiliser ou communiquer ses renseignements personnels ainsi que de mettre en œuvre des mesures de sécurité pour protéger tous les renseignements personnels détenus par les organisations. 

La CSFO exige que les assureurs divulguent les impacts liés à l’opération du véhicule par une personne autre que le titulaire de police. De plus, en Ontario, les programmes de détermination des prix relatifs aux assurances fondées sur l’usage de données doivent être déposés et approuvés par le surintendant de la CSFO. Dans les cas où le rabais à l’adhésion n’est offert que pour une période déterminée ou qu’il est prévu que le rabais réellement accordé au titre du programme est censé différer substantiellement du rabais offert à l’adhésion, les assureurs seront tenus de déposer des rapports annuels auprès du surintendant.

S’inspirant de la CSFO, l’Autorité des marchés financiers (l’« AMF »), qui réglemente l’industrie de l’assurance automobile au Québec, a publié le 9 avril 2015, un Avis relatif à l’offre de produits d’assurance automobile s’appuyant sur l’utilisation de données liées à la télématique (l’« Avis »), lequel énonce ses attentes en matière de produits d’assurance s’appuyant sur l’utilisation de données télématiques. L’AMF a donc abondé dans le même sens en énonçant que les données recueillies doivent être traitées comme des « renseignements personnels » et que les assureurs doivent respecter les dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Surveillance réglementaire

L’AMF estime que le cadre de surveillance existant, notamment, la Ligne directrice sur les saines pratiques commerciales et la Ligne directrice sur la gestion des risques liés à l’impartition s’appliquent aussi aux programmes de TAFU.

L’AMF, tout comme la CSFO, stipule que la participation des consommateurs à des programmes de TAFU doit être sur une base volontaire seulement, et que ces derniers doivent être bien informés au sujet du programme et de tout changement qui y est apporté pendant la durée du contrat d’assurance. Par exemple, l’AMF s’attend à ce que les consommateurs soient informés sur :

  • Les critères d’admissibilité au programme de télématique;
  • La nature des données qui seront collectées;
  • L’utilisation qui sera faite de ces données (p.ex. : dans le cadre d’une enquête visant le règlement d’un sinistre, le cas échéant);
  • L’incidence des données de la télématique sur la prime d’assurance automobile;
  • La période retenue pour la révision périodique de la prime d’assurance.

Les organismes de réglementation s’attendent aussi à ce que les assureurs leur donnent accès aux données de TAFU. À notre avis, l’arrivée des applications de données télématiques sur les téléphones intelligents facilitera la conformité à cette exigence. Ils s’attendent de plus à ce que les assureurs cessent de recevoir des données lorsque les consommateurs choisissent de ne plus participer à un programme de TAFU et que ces mêmes données ne soient pas utilisées pour décliner, mettre fin à ou refuser de renouveler une police d’assurance.

Fait intéressant à noter, plus tôt cette année, la Société d’assurance automobile du Québec (la « SAAQ »), le régime public d’assurance automobile du Québec, a annoncé qu’elle introduirait un programme de TAFU à participation volontaire en 2016. La SAAQ et le ministère des Transports du Québec ont aussi indiqué que le dispositif de suivi pourrait être obligatoire pour les conducteurs reconnus coupables de conduite dangereuse.

Nous sommes à même d’aider les assureurs à traiter toutes les questions réglementaires liées aux programmes de tarification de l’assurance automobile fondée sur l’usage ainsi que de les aider à veiller à ce que leurs programmes soient conformes aux lois de protection de la confidentialité applicables. Pour de plus amples renseignements, veuillez contacter Michael Garellek ou tout membre de notre équipe Assurance et responsabilité professionnelle.

Note: l’auteur souhaite remercier Joey Suri, stagiaire chez Gowlings, pour son aide à la rédaction de cet article.


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