Faire des affaires au Canada : enquêtes et droit pénal des affaires/corruption

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02 octobre 2018


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Enquêtes et droit pénal des affaires/corruption

Au Canada comme partout dans le monde, les organismes de réglementation et les autorités chargées de l’application des lois prennent des mesures draconiennes contre les pratiques commerciales irrégulières ou contraires à l’éthique. Presque chaque jour, les médias relatent une nouvelle enquête sur la corruption, la subornation ou la collusion.

Dans un cadre juridique complexe et afin de se conformer aux lois, réglementations et exigences en matière de gouvernance ainsi qu’à la détection et à la prévention d’infractions potentielles, les entreprises doivent consulter une équipe de professionnels juridiques aux compétences et à l’expérience nationales et internationales.


  1. La corruption d’agents publics étrangers
  2. Le droit de la concurrence/antitrust
  3. Les poursuites en matière de valeurs mobilières
  4. Les fraudes
  5. La responsabilité criminelle des personnes morales
  6. Les poursuites en matière réglementaire
  7. La lutte contre le blanchiment d’argent et la lutte contre le financement du terrorisme

1. La corruption d’agents publics étrangers

En réponse à la loi américaine intitulée Foreign Corrupt Practices Act (la Loi FCPA), le Canada a mis en œuvre la Loi sur la corruption d’agents publics étrangers (la LCAPE) en 1998. À l’instar de la loi FCPa, la LCAPE criminalise le fait de donner ou d’offrir, directement ou indirectement, une récompense ou un avantage à un agent public étranger en contrepartie d’un acte ou d’une omission dans le cadre de l’exécution de ses fonctions officielles, ou pour le convaincre d’utiliser sa position pour influencer les actes ou les décisions de l’État étranger ou de l’organisation internationale publique qu’il représente.

La portée de la compétence du Canada en matière de corruption d’agents étrangers est vaste. En effet, la LCAPE traite les actes commis n’importe où dans le monde par :

  • Un citoyen canadien;
  • Un résident permanent canadien;
  • Une société de personnes, une société par actions, une entreprise ou une association créée ou organisée en vertu de lois au Canada ou dans une province.

Contrairement à la FCPA, la LCAPE canadienne est une loi de nature exclusivement pénale, ne comportant pas d’élément en matière civile. Parmi les sanctions potentielles auxquelles les sociétés s’exposent, on retrouve des amendes illimitées, l’imposition de probation à des sociétés, l’exclusion de contrats gouvernementaux et la confiscation de produits de la criminalité.

Les particuliers, eux, s’exposent à des sanctions potentielles pouvant aller jusqu’à 14 ans d’emprisonnement, des amendes illimitées, l’imposition de probation et l’exclusion de contrats gouvernementaux.

Alors que le Canada a mis un certain temps à appliquer la LCAPE, depuis 2011, on note cependant une augmentation des mesures d’application. En 2011, Niko Resources Ltd. a plaidé coupable aux termes de la Loi, a été condamnée à payer une amende de 9,5 millions $ et s’est vu imposer une probation de société de trois ans. En 2013, Griffiths Energy ─ une société pétrolière canadienne possédant des opérations au Tchad ─ a été condamnée à payer une amende de 10,25 millions $ en vertu de la Loi. En outre, en 2013, au terme d’un procès, Nazir Karigar a été reconnu coupable d’avoir versé des pots-de-vin au ministre indien de l’Aviation civile et à des employés d’Air India dans le but d’exercer une influence sur la conclusion de la vente d’un logiciel de reconnaissance faciale. Karigar a été le premier individu à être condamné en vertu de la LCAPE et il a reçu une sentence de trois années d’emprisonnement. En juillet 2017, la condamnation de Karigar a été maintenue par la Cour d’appel de l’Ontario.

Les sociétés du secteur extractif au Canada sont maintenant tenues de se conformer à la Loi sur les mesures de transparence dans le secteur extractif, entrée en vigueur en 2015. Cette Loi exige que les sociétés du secteur assurent le suivi de certains paiements et les signalent au gouvernement du Canada et aux gouvernements étrangers. Tout défaut de conformité à la Loi risque d’entraîner l’imposition d’amendes allant jusqu’à 250 000 $. Ce processus pourrait aussi être utilisé pour enquêter sur des paiements versés à des agents publics étrangers et potentiellement mener à une enquête en vertu de la LCAPE ou la FCPA, ou les deux.

2. Le droit de la concurrence et droit antitrust

Au Canada, le droit antitrust est régi par la Loi sur la concurrence, élément central et bien établi de la politique économique canadienne. La Loi a pour objet d’éliminer les activités nuisant à la concurrence sur les marchés. Globalement, la Loi incarne un schéma complexe de réglementations économiques, et établit et définit la conduite anticoncurrentielle. Elle prévoit une grande variété de recours pénaux et administratifs à l’encontre de sociétés qui se conduisent de manière anticoncurrentielle.

On retrouve les objectifs clés des dispositions pénales de la Loi dans les articles 45 et 47, lesquels interdisent respectivement la conduite anticoncurrentielle sous forme de fixation des prix et la collusion dans les soumissions. Suivant les modifications apportées à la Loi en 2009, les sanctions pour les offenses criminelles peuvent dorénavant se traduire par des peines allant jusqu’à 14 ans d’emprisonnement et/ou des amendes allant jusqu’à 25 millions $. La jurisprudence récente laisse croire que les tribunaux feront usage de ces modifications pour pénaliser sévèrement certaines conduites anticoncurrentielles « pour faire passer le message que la Cour reconnaît la nature très grave de ce genre de comportement illégal, son incidence très négative sur l’économie et la répulsion qu’inspire ce crime à la société. »

3. Les poursuites en matière de valeurs mobilières

Au Canada, contrairement à la plupart des autres pays, la réglementation des valeurs mobilières ne relève pas du fédéral, mais bien de chacune des provinces séparément. Chaque loi sur les valeurs mobilières provinciale comporte des dispositions quasi criminelles ─ comme des interdictions visant les délits d’initiés et la communication d’information privilégiée ─ en plus des dispositions visant les fraudes en valeurs mobilières et les fraudes comptables. Les sanctions pour les poursuites quasi criminelles touchant des valeurs mobilières comportent des peines d’emprisonnement et des amendes. Il existe aussi des dispositions liées aux valeurs mobilières aux termes du Code criminel qui se chevauchent comme en ce qui a trait au délit d’initié, mais elles sont rarement utilisées.

4. Les fraudes

En raison de son interprétation élargie dans la jurisprudence, la fraude criminelle est l’une des infractions faisant le plus souvent l’objet d’une poursuite dans le contexte d’affaires canadien. Les infractions peuvent être commises par une société ou contre une société.

Il y a fraude criminelle lorsque, quiconque, par supercherie, mensonge ou autre moyen dolosif, constituant ou non un faux semblant au sens de la présente loi, frustre le public ou toute personne, déterminée ou non, de quelque bien, service, argent ou valeur. Si la valeur de l’objet de l’infraction dépasse cinq mille dollars, le coupable est passible d’un emprisonnement maximal de quatorze ans. Lorsque l’objet de l’infraction dépasse le million de dollars, elle est assortie d’une sentence minimale de deux ans d’emprisonnement.

5. La responsabilité criminelle des personnes morales

La Cour suprême du Canada maintient depuis longtemps que les véhicules corporatifs occupent une place si grande dans les secteurs industriel, commercial et sociologique, que la soumission à nos règles de droit criminel est tout aussi essentielle pour la personne morale que la personne physique.

Le Code criminel contient des dispositions relatives à la responsabilité des personnes morales lorsqu’un cadre supérieur ─ un agent qui joue un rôle important dans l’établissement des politiques de l’organisation, ou qui assume la responsabilité de la gestion d’un aspect important des activités de l’organisation ─ est impliqué dans l’acte criminel. Pour établir la responsabilité criminelle, il faut que le cadre supérieur ait l’intention même partielle, d’en faire profiter l’organisation.

Le cadre supérieur peut être jugé responsable aux motifs suivants :

  • Il participe à l’infraction dans le cadre de ses attributions
  • Il fait en sorte, dans le cadre de ses attributions, qu’un agent de l’organisation accomplisse l’infraction
  • Il omet de prendre les mesures voulues pour empêcher un agent de l’organisation de commettre l’infraction

6. Les poursuites en matière réglementaire

Au Canada, il existe plusieurs régimes réglementaires disposant de pouvoirs pénaux et quasi pénaux. Ces régimes réglementaires comprennent des législations en matière de santé et sécurité au travail, d’environnement, de même qu’une grande variété de législations économiques.

7. La lutte contre le blanchiment d’argent et la lutte contre le financement du terrorisme

Les mesures visant à éliminer le financement offert aux groupes criminalisés et terroristes occupent une part de plus en plus importante de la lutte mondiale contre ce type de menaces. Le Canada, pour sa part, a mis en œuvre la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes en juin 2000. Cette dernière vise à détecter, et finalement dissuader le traitement des produits de la criminalité, ou le transfert d’argent visant à financer des activités terroristes. Pour ce faire, la Loi impose un certain nombre d’obligations (parfois onéreuses) sur des catégories particulières de sociétés. Des pouvoirs d’enquête sont aussi conférés aux autorités pour la faire respecter. Le défaut de se conformer aux dispositions de cette Loi peut donner lieu à des sanctions pécuniaires ou des peines d’emprisonnement significatives.

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