COVID-19 : soins de santé virtuels Assurer la continuité des soins au Canada

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16 mars 2020

Dans le sillage de la maladie à coronavirus (COVID-19), les professionnels de la santé multiplient les efforts afin d'éviter toute interruption de service ou toute détérioration dans la qualité des soins offerts aux patients. Le ministère de la Santé de l'Ontario a publié un document d'orientation à l'intention du secteur de la santé en vue d'aider les établissements concernés à minimiser le risque d'infection au sein de leurs pratiques respectives[1].



Les directives de santé publique actuelles déconseillent les soins directs aux patients dans les situations non urgentes. Compte tenu des circonstances, les professionnels de la santé peuvent donc envisager la prestation de soins de santé par télémédecine.

La télémédecine – ou les soins virtuels – est la prestation de services de soins de santé à distance à l'aide de la technologie des télécommunications. Dans les circonstances appropriées, elle permet aux professionnels de fournir des soins continus tout en limitant la propagation potentielle du virus. La télémédecine permet d'évaluer et de traiter les patients sans qu'ils aient à se déplacer en clinique. Bien entendu, les professionnels doivent exercer leur jugement afin de déterminer si la télémédecine convient pour chaque patient. Si cette dernière ne convient pas et qu'il est impossible de fournir des soins en personne, les professionnels de la santé doivent mettre en place des plans avec leurs patients afin d'assurer la continuité de soins adéquats. 

Les établissements de santé et les propriétaires de cliniques doivent être conscients des risques potentiels et tenir compte de diverses questions, notamment les suivantes :

  • à quels patients peut-on offrir des services de télémédecine;
  • quelles sont les autorisations ou assurances requises;
  • quelle plateforme peut-on utiliser pour fournir des services de télémédecine;
  • comment faire pour communiquer l'existence de ce service optionnel à vos clients; et
  • si la télémédecine n'est pas une option, comment assurerez-vous la continuité des soins?

Les patients

Pour déterminer si vous êtes en mesure de proposer la télémédecine à vos patients, vous devez tenir compte de la nature des services que vous fournissez, de votre emplacement et de celui des patients.

En ce qui concerne la nature des services, prenez en considération les normes, lignes directrices et directives relatives à la pratique s'appliquant aux modalités des services que vous offrez, et exercez votre jugement professionnel pour déterminer si ces services peuvent être fournis sans contact physique direct.

En ce qui concerne l'emplacement, tenez compte de l'endroit où vous et vos patients vous trouvez lorsque le service est fourni. Étant donné l'évolution des restrictions de voyage et des quarantaines, il est possible que certains professionnels de la santé et leurs patients offrent ou demandent des soins alors qu'ils se trouvent hors de leur province ou territoire et soient temporairement incapables de rentrer chez eux. Lorsque vous fournissez des services de télémédecine, il est important que vous confirmiez votre position et celle de votre client au début de chaque séance de traitement et que cette information soit consignée dans vos dossiers cliniques. Lorsqu'une partie se trouve à l'extérieur du pays, vous devez déterminer s'il est nécessaire d'obtenir une autorisation spéciale auprès du pays étranger en question pour fournir les soins. Vous devez également comprendre les directives, les normes et les lois qui s'appliquent dans ce pays et vous assurer de vous y conformer. 

Dans certains cas, il se peut que les professionnels de la santé doivent être autorisés à pratiquer à la fois dans le pays où ils se trouvent et dans celui où se trouve le patient afin de pouvoir offrir des soins par télémédecine.

Bien qu'il n'existe actuellement aucun cadre national en matière de télémédecine, certaines associations médicales du Canada et des États-Unis ont publié des lignes directrices pour la prestation de services de télémédecine. Par exemple, en 2006, la Société canadienne de psychologie a publié un projet de lignes directrices déontologiques pour les psychologues fournissant des services psychologiques par voie électronique[2] (en anglais seulement). En 2011, l'Association des organismes canadiens de réglementation de la psychologie a publié des normes modèles pour la prestation de services de télépsychologie[3] (en anglais seulement). En 2015, l'Ontario Psychological Association a également publié un guide des pratiques exemplaires (en anglais seulement) pour la prestation de services de télépsychologie[4].

L'assurance

Avant de mettre en place des services de télémédecine, veuillez vous assurer de détenir une assurance adéquate pour fournir des services de soins virtuels. Renseignez-vous également auprès de votre courtier pour savoir si l'assurance vous couvrira si vous ou vos patients vous trouviez en dehors de votre province ou territoire d'origine.

Les plateformes

Il incombe ultimement aux professionnels de s'assurer que les services virtuels qu'ils proposent peuvent être fournis de manière à protéger la confidentialité et la sécurité des renseignements personnels sur la santé de leurs patients.

Bien que le recours à des plateformes facilement accessibles comme Skype pour pratiquer la télémédecine puisse sembler intéressant, il s'avère que Skype ne respecte pas la LPRPS[5]. Les dépositaires de soins de santé doivent étudier soigneusement les contrats d'utilisation de tout programme ou application qu'ils ont l'intention d'utiliser pour la prestation de services de télémédecine. À titre d'exemple, l'Ontario Psychological Association recommande de se servir de plateformes offrant un chiffrement de bout en bout comparable à celui des banques pour la prestation de services de télépsychologie.

En plus de faire en sorte que des plateformes adéquates soient utilisées pour fournir des soins aux patients grâce à la télémédecine, les praticiens et les cliniques doivent déployer des efforts raisonnables pour présenter une description complète et claire des services de télémédecine qu'ils sont en mesure de fournir. Ces descriptions devraient notamment inclure les coûts éventuels associés aux services virtuels pour les usagers, ainsi que les limites des services offerts.

Si la télémédecine se révèle appropriée, les établissements de soins et les professionnels de la santé doivent obtenir le consentement éclairé des patients qui souhaitent y recourir et consigner ce consentement. Les patients doivent être informés des avantages et des risques liés aux soins virtuels proposés pour qu'un consentement éclairé puisse être obtenu. Une pratique exemplaire pour les cliniques consisterait à élaborer des modalités générales normalisées en matière de télémédecine et à demander aux patients de les lire puis de signer leur formulaire de consentement à ces modalités. En outre, le consentement ainsi que toute discussion connexe avec le patient doivent être consignés dans le dossier médical de ce dernier.

Les communications avec les clients

Dès le premier contact avec le patient, où on lui propose des services de télémédecine, jusqu'à la visite réelle du patient par télémédecine, la communication doit se faire à l'aide de moyens sécurisés.

Même s'il est possible d'envoyer un courriel à vos clients pour leur faire part des options qui s'offrent à eux, la communication électronique comporte néanmoins des risques. Par exemple, on ne peut pas garantir la réception et la lecture du courriel par le destinataire. En outre, il existe des risques d'interception dans l'envoi de messages électroniques. Si vous n'êtes pas en mesure d'envoyer une communication sécurisée par courrier électronique crypté, vous devez d'abord obtenir le consentement verbal (ce peut être par téléphone) des patients avant de communiquer avec eux par courrier électronique non crypté. Une fois le consentement obtenu, la quantité et le type d'informations personnelles sur la santé qui sont incluses dans un courriel non crypté devraient être limités. La simple identification d'un patient comme tel peut constituer une violation de la législation applicable en matière de protection de la vie privée; il est donc important qu'aucun identifiant de patient (nom, âge, date de naissance, adresse, etc.) ne soit inclus dans les communications par courrier électronique.

Certains organismes publics, tels que le Commissaire à l'information et à la protection de la vie privée de l'Ontario, attendent également des dépositaires qu'ils élaborent et mettent en œuvre une politique écrite pour l'envoi et la réception d'informations personnelles sur la santé par courrier électronique[6]. En outre, ils attendent des dépositaires qu'ils informent leurs patients de cette politique et qu'ils obtiennent leur consentement avant de communiquer avec eux par courrier électronique non crypté.

La continuité des soins

En considérant votre population de patients et vos obligations de veiller à ce qu'ils ne se sentent pas abandonnés pendant cette période où les soins en personne ne sont pas recommandés, il est important de faire tous les efforts possibles pour qu'ils aient le plus grand nombre d'options possible.

Il s'agit notamment d'assouplir les politiques de report et d'annulation des rendez-vous, et d'élaborer un plan et un protocole de traitement – qui peut ou non inclure la télémédecine – pour permettre aux patients de traverser cette période. Ce plan peut prévoir de fournir aux patients des ressources supplémentaires, des coordonnées à utiliser en temps de crise, de l'orientation vers d'autres professionnels disponibles pour fournir des soins d'urgence ou continus en votre absence, et un dialogue ouvert pour assurer la continuité des soins.

La plupart des Collèges provinciaux qui régissent les professionnels de la santé ont mis en place des politiques de continuité des soins. Par exemple, l'Ordre des psychologues de l'Ontario exige que les psychologues qui peuvent être affaiblis pour des raisons de santé veillent à ce que leurs clients soient informés et reçoivent de l'aide pour obtenir des services de remplacement. Les établissements de soins de santé doivent se référer à ces politiques et normes s'ils prévoient une interruption des services. Un certain nombre de Collèges ont également récemment publié des déclarations destinées à aider et à orienter les professionnels quant aux questions de soins aux patients dans le contexte de la COVID-19[7].

L'objectif au cœur de ces politiques et déclarations est de prévenir les défaillances dans les soins aux patients, et de leur fournir les outils dont ils ont besoin pour naviguer dans le système de soins de santé.


[1] Ministère de la Santé et des Soins de longue durée : http://www.health.gov.on.ca/fr/pro/programs/publichealth/coronavirus/2019_guidance.aspx

[2]Société canadienne de psychologie; Fournir des services psychologiques par voie électronique : projet de lignes directrices déontologiques pour les psychologues fournissant des services psychologiques par voie électronique; https://cpa.ca/fr/aproposdelascp/comites/ethics/psychserviceselectronically/ (en anglais seulement)

[3]http://www.acpro-aocrp.ca/documents/ACPRO%20Model%20Standards%20for%20Telepsychology%20Service%20Delivery.pdf (en anglais seulement)

[4]Ontario Psychological Association; OPA Communications and Member Services Committee, avril 2015 : Guide des pratiques exemplaires pour la prestation de services de télépsychologie : http://www.psych.on.ca/Policy-Public-Affairs/OPA-Guidelines (en anglais seulement)

[5]https://www.ocswssw.org/wp-content/uploads/2014/12/b2_-_debra_grant_-_b2.pdf; https:/www.cmpa-acpm.ca/en/advice-publications/browse-articles/2015/videoconferencing-consultation-when-is-it-the-right-choice

[6]Nicole Minutti, analyste des politiques de santé, Commissaire à l'information et à la protection de la vie privée de l'Ontario; 11 mai 2017 : « Electronic Communication of Personal Health Information, A presentation to the Porcupine Health Unit », (Timmins, Ontario). 

[7] Voir par l'Ordre des infirmières et infirmiers de l'Ontario : https://www.cno.org/en/trending-topics/novel-coronavirus/ (en anglais seulement) le College of Physicians and Surgeons of Ontario : https://www.cpso.on.ca/Physicians/Your-Practice/Physician-Advisory-Services/COVID-19-Information-for-Physicians (en anglais seulement), le College of Registered Psychotherapists of Ontario : https://www.crpo.ca/advice-to-rps-regarding-covid-19/ (en anglais seulement)


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