Faire des affaires au Canada : lois sur la concurrence et antitrust

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15 décembre 2020

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Lois sur la concurrence et antitrust

La loi concernant la concurrence au Canada est énoncée dans une seule loi fédérale, la Loi sur la concurrence. Les règlements, directives, bulletins d'interprétation et jurisprudences connexes fournissent tous des indications sur la manière dont la Loi sur la concurrence est appliquée. La Loi est principalement appliquée par le Bureau de la concurrence (le Bureau) et le Service des poursuites pénales du Canada. Certaines dispositions de la Loi sur la concurrence autorisent également des parties privées à intenter des procédures d'exécution.

L'objectif de la loi est de maintenir et d'encourager la concurrence au Canada, et elle traite de trois catégories de comportement : les fusions, les affaires criminelles et les pratiques examinables.1


  1. Fusions
  2. Affaires criminelles
  3. Pratiques examinables

1. Fusions

La Loi sur la concurrence définit une fusion comme l'acquisition ou l'établissement (que ce soit par achat ou location d'actions ou d'actifs, par fusion, par une combinaison ou autrement) d'un contrôle complet ou partiel d'une entreprise ou d'une participation importante complète ou partielle dans une entreprise.

Le Bureau a adopté une interprétation large de cette définition. Il a indiqué qu'il ne considérait généralement pas l'acquisition de moins de 10 % des actions avec droit de vote d'une société comme une fusion. Il peut considérer que l'acquisition de 10 à 50 % des parts est une fusion, selon que les faits suggèrent que l'acheteur acquiert la capacité d'influer grandement sur le comportement économique de la cible. Le Bureau a également estimé que des arrangements contractuels, comme des conventions d'actionnaires ou des conventions de gestion, peuvent également être considérés comme des fusions, à condition qu'ils confèrent le contrôle d'une entreprise en tout ou en partie.

À moins que le Bureau ne délivre un certificat de décision préalable (mentionné plus loin dans cette section), il a le droit de contester toute fusion avant son achèvement et pendant un an après son achèvement. Ce droit s'applique à toutes les fusions, y compris à celles qui ne dépassent pas les seuils obligatoires de notification préalable (également mentionnés plus loin dans cette section). En conséquence, bien que cela soit rare, le Bureau a contesté certaines fusions qui ne dépassaient pas les seuils de notification préalable.

a. Fusions faisant l'objet d'une notification

Les fusions dépassant certains seuils doivent être notifiées au préalable au Bureau et peuvent ne pas être achevées tant i) que le délai d'attente légal n'a pas expiré et que le Bureau n'a pas obtenu d'ordonnance interdisant la clôture ou ii) que le Bureau a terminé son examen et rendu une disposition qui permet la clôture.

b. Seuils

Une notification est requise si les deux seuils suivants sont dépassés :

  • Taille des parties : Les parties, avec leurs sociétés affiliées, ont des actifs au Canada ou des revenus bruts annuels des ventes en provenance ou à destination du Canada (exportations et importations) qui dépassent 400 millions de dollars.
  • Taille de l'entreprise acquise : La valeur globale des actifs au Canada à acquérir ou les revenus bruts annuels des ventes en provenance ou à destination du Canada générés par ces actifs dépassent 96 millions de dollars.2

Des seuils supplémentaires s'appliquent aux acquisitions proposées de titres de participation ou de capitaux propres, notamment :

  • l'acquisition proposée d'actions avec droit de vote d'une société ouverte ne fera pas l'objet d'une notification à moins que, après la réalisation de la transaction, l'acheteur possède plus de 20 % des actions avec droit de vote (ou plus de 50 % si l'acheteur en possédait déjà plus de 20 % avant la transaction);
  • l'acquisition proposée d'actions avec droit de vote d'une société privée ne fera pas l'objet d'une notification à moins que, après la réalisation de la transaction, l'acheteur possède plus de 35 % des actions avec droit de vote (ou plus de 50 % si l'acheteur en possédait déjà plus de 35 % avant la transaction).

L'analyse des seuils financiers est basée sur les derniers états financiers audités disponibles, à condition qu'ils soient suffisamment récents. Si les états financiers audités sont obsolètes, n'existent pas ou ne contiennent pas d'informations suffisamment détaillées, l'analyse est basée sur des états financiers non audités ainsi que des livres et registres internes. L'analyse de seuil doit être mise à jour pour refléter les évolutions matérielles (comme les acquisitions, les dessaisissements ou les dépréciations) intervenant après la date de clôture des états financiers sur lesquels l'analyse initiale était basée.

Si une transaction proposée dépasse les seuils applicables :

  • une notification est requise, même si la transaction ne soulève manifestement aucune préoccupation de fond en matière de loi sur la concurrence;
  • le non-respect des dispositions relatives à la notification peut entraîner une sanction administrative ou pénale substantielle.

c. Procédure de notification

La notification peut être effectuée de deux manières : i) le dépôt d'un formulaire de notification prescrit par chacune des parties ou ii) une demande de certificat de décision préalable. Il n'est pas rare de soumettre les deux types de notification.

i.  Formulaire de notification prescrit

Le formulaire de notification prescrit nécessite des informations sur les activités des parties et de leurs filiales, y compris une description narrative de l'entreprise et de ses activités, de ses états financiers et de ses listes de clients et de fournisseurs. Les documents stratégiques relatifs à la transaction (y compris les plans d'affaires et de marketing, les documents du conseil d'administration et l'analyse de la concurrence) doivent également être soumis. Cela doit être pris en compte lors de la préparation de ces documents.

Le dépôt des formulaires prescrits complets, comme déterminé par le Bureau, est suivi d'un délai d'attente légal de 30 jours. Pendant ce temps, les parties ne peuvent conclure la transaction à moins que le Bureau ne termine son examen et ne rende une décision permettant aux parties de la conclure.

Pendant la période initiale de 30 jours, le Bureau a le droit d'émettre une demande de renseignements supplémentaires (DRS). Les DRS sont généralement réservées aux transactions qui semblent soulever des préoccupations notables en matière de droit de la concurrence et sont relativement rares.

Les DRS exigent la production d'informations supplémentaires substantielles, et il n'est pas rare que les parties mettent plusieurs mois à fournir leurs réponses. L'émission d'une DRS a pour effet de prolonger le délai d'attente jusqu'à 30 jours après la mise en conformité avec la DRS, comme déterminé par le Bureau.

ii.  Certificat de décision préalable

Une autre manière de procéder à la notification consiste à demander un certificat de décision préalable (CDP). Une demande de CDP est une lettre (généralement soumise par l'avocat de l'acheteur) qui décrit les parties, la transaction et le secteur concerné, puis explique pourquoi la transaction ne devrait pas préoccuper le Bureau. Un CDP est le meilleur résultat possible pour les parties (en particulier pour l'acheteur), car il isole la transaction des contestations ultérieures, à condition que la transaction soit conclue dans l'année suivant l'émission du CDP. En conséquence, le Bureau n'émet généralement que des CDP relatifs aux transactions qui ne soulèvent pas de problèmes de fond importants.

Dans les cas où les informations fournies dans une demande de CDP sont suffisantes pour que le Bureau termine son examen, mais que le Bureau n'est pas suffisamment à l'aise pour distribuer un CDP ni suffisamment inquiet pour remettre en question la transaction, le Bureau produira normalement une lettre de non-intervention (LNI) et renoncera à l'obligation des parties de soumettre les formulaires prescrits.

Essentiellement, une LNI informe les parties que, même si le Bureau n'a pas actuellement l'intention de contester la transaction, il se réserve le droit de le faire dans un délai d'un an suivant la clôture. D'un point de vue pratique, les parties peuvent être très satisfaites d'une LNI, car le Bureau n'a pas d'antécédents de transactions contestées après la délivrance d'une LNI.

Une demande de CDP n'est pas suivie d'un délai d'attente légal. Toutefois, le Bureau a publié des lignes directrices indiquant qu'il s'efforcera de mener à bien son examen des transactions qu'il considère comme « non complexes » dans les 14 jours suivant la réception d'une demande complète de CDP et dans les 45 jours suivant la réception d'une demande complète de CDP pour les transactions qu'il considère comme « complexes ».

Les transactions non complexes sont facilement identifiables par l'absence évidente de problèmes de concurrence et incluent les transactions pour lesquelles il n'y a aucun ou presque aucun chevauchement concurrentiel entre les parties. Les transactions complexes concernent la fusion de concurrents ou la fusion de clients et de fournisseurs lorsqu'il existe des indications que la transaction puisse créer, maintenir ou renforcer le pouvoir de marché. La grande majorité des transactions sont classées comme non complexes, et le Bureau achève son examen dans les 14 jours suivant la classification.

Du point de vue des parties, et en particulier de l'acheteur, la clôture après une autorisation affirmative du Bureau sous la forme d'un CDP ou d'une LNI est généralement préférable à la clôture uniquement sur la base de l'expiration passive du délai d'attente légal. Néanmoins, les parties ont le droit de conclure à l'expiration passive du délai d'attente prévu par la loi sans avoir reçu la confirmation de ce que le Bureau peut faire.

d. Taxe de dépôt

La taxe de dépôt est de 75 055,68 $. Elle est appliquée indépendamment du fait que la notification soit effectuée au moyen des formulaires prescrits, de la demande de CDP ou des deux. La question de savoir quelle partie devrait payer la taxe de dépôt est une question de négociation commerciale entre les parties et devrait être traitée dans le contrat d'achat de la transaction. Les arrangements communs stipulent que l'acheteur paie 100 % de la taxe de dépôt ou que les parties acceptent d'en payer chacune la moitié.

e. Critère

Le critère utilisé par le Bureau pour déterminer s'il y a lieu de contester une transaction proposée consiste à établir si l'opération empêcherait ou réduirait (ou risquerait d'empêcher ou de diminuer) sensiblement la concurrence. Ce critère, selon la définition judiciaire, vise à déterminer si l'opération donnerait à l'entreprise fusionnée la possibilité d'augmenter d'un point de vue rentable ses prix dans l'environnement concurrentiel après la fusion ou créerait, maintiendrait ou renforcerait la capacité de l'entité fusionnée à exercer un pouvoir de marché.

f. Résultats possibles

Les résultats possibles d'un examen de fusion peuvent généralement être résumés comme suit :

  • Le Bureau rend une décision qui permet aux parties de conclure selon leur calendrier souhaité sans modifier la transaction. C'est ce qui se produit dans la grande majorité des cas.
  • Le Bureau prend plus de temps que les parties le souhaiteraient à terminer son examen. La clôture est retardée, mais finalement non contestée, et la transaction ne subit aucune modification substantielle. Bien que ce ne soit pas rare, ce n'est certainement pas typique.
  • Le Bureau convient de ne pas contester la transaction sur la base des concessions faites par les parties, comme la cession de certains actifs. Dans les situations relativement rares où la fusion proposée soulève des problèmes de concurrence importants, il s'agit d'un résultat fréquent.
  • Le Bureau conteste la transaction devant le Tribunal de la concurrence (le Tribunal), un tribunal quasi judiciaire spécialisé, en demandant une ordonnance interdisant son achèvement. Si la transaction est déjà terminée, le Bureau demande une ordonnance exigeant que la transaction soit annulée ou exigeant que l'acheteur vende une partie ou la totalité de l'entreprise acquise à un tiers. Ceci est extrêmement rare.

2. Affaires criminelles

À la suite des modifications importantes apportées à la Loi sur la concurrence qui sont entrées en vigueur en mars 2009 et en mars 2010, plusieurs infractions criminelles ont été abrogées ou converties en pratiques susceptibles de révision. En conséquence, la Loi sur la concurrence n'a été dotée que de deux dispositions en matière d'infraction criminelle : complot et truquage des offres3. Les deux infractions sont en soi illégales, ce qui signifie que l'effet du comportement sur la concurrence est sans pertinence. La norme de preuve est hors de tout doute raisonnable.

Les sanctions pour violation de ces dispositions sont sévères. La condamnation peut entraîner une amende substantielle pour la société et les particuliers coupables, des peines d'emprisonnement pour les particuliers coupables, des recours collectifs, des dommages-intérêts civils et une atteinte à la réputation. Au Canada, la tendance semble entraîner des poursuites plus fréquentes, des amendes plus élevées et des peines d'emprisonnement plus nombreuses.

Une enquête ou une allégation qui n'aboutit pas à une condamnation est généralement coûteuse, préjudiciable et porte atteinte à la réputation. En conséquence, il est généralement prudent d'éviter toute conduite pouvant donner l'apparence même d'une violation des dispositions criminelles de la Loi sur la concurrence.

a. Conspiration

Il est illégal pour les concurrents de conclure une entente pour :

  • Fixer, maintenir, augmenter ou contrôler les prix (y compris les remises, rabais, allocations, concessions ou autres avantages);
  • Allouer des ventes, des territoires, des clients ou des marchés;
  • Fixer ou contrôler la production ou la fourniture d'un produit.

Un « concurrent » est défini au sens large comme incluant toute personne qu'il est raisonnable de croire susceptible de concurrencer un produit. La définition inclut les concurrents existants ainsi que les concurrents potentiels.

L'accord présumé n'a pas besoin d'être écrit (souvent, il ne l'est pas) et peut être prouvé uniquement sur la base de preuves indirectes. Il doit y avoir la preuve d'un accord pour qu'il y ait une condamnation.

La Loi sur la concurrence établit une défense de restriction accessoire et une défense de conduite réglementée. La défense de restriction accessoire s'applique lorsque l'accord contesté est accessoire et nécessaire pour donner effet à un accord plus large qui n'est pas en soi illégal. Un exemple de ceci serait une clause de non-concurrence temporaire dans un contrat d'achat d'actifs, en vertu duquel le vendeur s'engage à ne pas faire concurrence à l'acheteur en ce qui concerne l'entreprise achetée. La défense de conduite réglementée s'applique lorsque des actes qui contreviendraient à la Loi sur la concurrence sont autorisés et expressément requis par d'autres lois. Un exemple de ceci serait une loi provinciale sur les offices de commercialisation des produits agricoles qui oblige les producteurs à limiter les quantités et à vendre à des prix précis.

La peine pour complot est une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à 14 ans ou entraînant une amende pouvant atteindre 25 millions de dollars.

b. Truquage d'offres

Il est question de truquage d'offres lorsque :

  • deux personnes ou plus conviennent qu'une ou plusieurs d'entre elles ne présenteront pas une offre ou une soumission ou présenteront puis retireront une offre ou une soumission en réponse à un appel d'offres ou de soumission;
  • les offres ou soumissions sont soumises à un accord entre deux ou plusieurs soumissionnaires.

Il y a exception si l'accord est porté à la connaissance des personnes qui ont demandé les offres avant leur soumission. La peine pour truquage d'offres est une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à 14 ans ou entraînant une amende à la discrétion du tribunal.

c. Immunité

Le Bureau a établi un programme d'immunité en vertu duquel le premier conspirateur à signaler un complot peut être immunisé contre les poursuites criminelles (mais non les dommages civils découlant de causes d'action privées) si ce conspirateur, entre autres, n'a pas forcé d'autres personnes à participer au complot et coopère à la poursuite des autres conspirateurs. Les demandeurs d'immunité ultérieurs peuvent recevoir une forme de clémence sous la forme d'amendes réduites, mais ne peuvent prétendre à une immunité totale.

d. Actions privées

La Loi sur la concurrence confère aux parties privées le droit d'intenter des poursuites pour recouvrer les dommages réels subis à la suite d'une violation des dispositions criminelles de la Loi. En théorie, les parties privées ont le droit d'engager des poursuites pour prouver à la fois la violation d'une disposition criminelle et les dommages. Sur le plan pratique, les parties privées ont tendance à invoquer des déclarations de culpabilité ou des réponses à l'accusation qui résultent du gouvernement (c.-à-d. le Service des poursuites pénales du Canada) pour prouver la violation, et leurs actions se limitent à prouver les dommages. Les réclamations privées prennent généralement la forme de recours collectifs.

3. Pratiques examinables

Les dispositions sur les pratiques examinables de la Loi sur la concurrence traitent de comportements présumés licites. Une telle conduite ne peut être interdite que si le Tribunal conclut que, selon la pratique examinable en cause, la conduite empêche ou réduit sensiblement la concurrence ou a un effet défavorable sur la concurrence. La norme de preuve est la prépondérance des probabilités.

Pour toutes les pratiques examinables sauf une, le seul recours disponible est une ordonnance d'interdiction. La théorie sous-jacente est que les parties ne devraient pas être punies pour s'être livrées à une conduite présumée licite. L'abus de position dominante est l'exception et elle peut entraîner une ordonnance de dessaisissement ainsi que des sanctions administratives pécuniaires potentiellement importantes.

Le Bureau peut engager des procédures devant le Tribunal concernant toutes les pratiques examinables. Les parties privées ont le droit d'engager des procédures devant le Tribunal pour certaines pratiques examinables (mais elles doivent d'abord obtenir l'autorisation du Tribunal).

a. Accords entre concurrents

Cette disposition s'applique à tous les accords entre concurrents, autres que ceux spécifiquement couverts par la disposition relative au complot criminel précédemment décrite. Des exemples de tels accords incluent les coentreprises et les alliances stratégiques. Bien que ces accords favorisent souvent la concurrence et améliorent l'efficacité, ils peuvent être anticoncurrentiels dans certaines circonstances.

Si, à la demande du Bureau, le Tribunal conclut qu'une entente proposée ou existante entre concurrents a ou est susceptible d'avoir pour effet d'empêcher ou de réduire sensiblement la concurrence, le Tribunal peut ordonner la résiliation ou la modification de l'accord.

Le Tribunal ne peut pas rendre une ordonnance à l'encontre d'un accord susceptible d'entraîner des gains d'efficacité supérieurs aux effets de toute prévention ou réduction de la concurrence (et qui les compenseront), à condition que les gains d'efficacité ne soient probablement pas atteints si une ordonnance était émise.

b. Abus de position dominante

Au départ, il convient de noter que la domination à elle seule n'est pas problématique en vertu de la Loi sur la concurrence; c'est l'abus de position de domination que la Loi sur la concurrence cherche à régler. Pour que le Bureau ait gain de cause dans un cas d'abus de position dominante, il doit convaincre le Tribunal de ce qui suit :

i. Une ou plusieurs entreprises ont un pouvoir de marché sur un ou plusieurs marchés pertinents au Canada ou dans une partie du Canada.

Le pouvoir de marché est la capacité de facturer de manière rentable les prix au-dessus des niveaux concurrentiels pendant une période prolongée. La constatation d'un pouvoir de marché nécessite généralement la combinaison d'une part de marché élevée et de barrières à l'entrée, par exemple des coûts irrécupérables élevés ou des restrictions réglementaires. Il y a eu moins de 10 poursuites engagées en vertu de la disposition relative à l'abus de position dominante depuis son ajout à la Loi sur la concurrence en 1986, et presque toutes concernaient des parties dont la part du marché dépassait 80 %. De plus, le Bureau a émis des précis d'information technique ou des énoncés de position concernant diverses enquêtes sur les abus de position dominante auxquelles il a mis fin.

ii. L'entreprise ou les entreprises en position dominante se sont livrées, ou se livrent, à une pratique d'actes anticoncurrentiels.

Pour être considérés comme anticoncurrentiels, l'objet et le but des actes doivent être exclusifs, disciplinaires ou prédateurs. Dans la plupart des cas, l'acte anticoncurrentiel doit aussi viser un concurrent. Dans des circonstances bien précises, une partie qui n'est pas elle-même en concurrence sur un marché peut être considérée comme ayant commis des actes anticoncurrentiels contre des concurrents de ce marché. Parmi les actes potentiellement anticoncurrentiels, on peut citer la conclusion d'un accord d'exclusivité à long terme avec un fournisseur afin de rendre celui-ci inaccessible à un concurrent, ou l'application de prix inférieurs au prix coûtant à un client important d'un concurrent.

iii. Les actes anticoncurrentiels ont ou auront probablement pour effet d'empêcher ou de réduire sensiblement la concurrence.

La constatation d'une prévention substantielle ou d'une diminution de la concurrence repose sur un critère « sauf si », à savoir si les prix sur le marché applicable seraient inférieurs « sauf si » le comportement en question survient.

Si le Tribunal constate un abus de position dominante, il peut ordonner à l'entreprise ou aux entreprises en transgression de cesser les actes en question ou de prendre certaines mesures (comme la cession d'actifs ou d'actions) que le Tribunal estime nécessaires pour combattre la pratique anticoncurrentielle.
Le Tribunal peut également imposer une amende administrative pouvant atteindre 10 millions de dollars pour une première transgression et 15 millions de dollars pour chaque transgression subséquente.

c. Maintien des prix

Le maintien des prix se produit lorsqu'un fournisseur (par entente, menace ou promesse) influence l'augmentation ou décourage la réduction du prix auquel un vendeur vend, offre de vendre ou annonce un produit au Canada. Le maintien des prix se produit également lorsqu'un fournisseur refuse de fournir un produit à un vendeur ou fait preuve de discrimination à son égard en raison de la politique de bas prix de ce vendeur.

Si un fournisseur propose un prix de revente minimum à un revendeur, cette suggestion constitue un maintien des prix, à moins que le fournisseur ne précise également que le revendeur n'a aucune obligation de suivre la suggestion et que leur relation commerciale ne souffrira pas s'il ne suit pas la suggestion.

Si le Tribunal conclut que le maintien des prix a eu ou est susceptible d'avoir eu une incidence défavorable sur la concurrence d'un marché, il peut ordonner au fournisseur de cesser de se livrer au comportement contesté ou d'accepter le vendeur comme client en vertu des conditions commerciales habituelles. Le Bureau ou un vendeur concerné (avec l'autorisation du Tribunal) peuvent demander une telle ordonnance.

Avant le 12 mars 2009, le maintien des prix constituait une infraction pénale en soi. Plus de huit ans après sa conversion à une pratique examinable civile, de nombreux fournisseurs se sont engagés dans diverses formes de maintien des prix; pourtant, seulement un cas a été pris en compte par le Tribunal, et ce cas n'était pas un cas de maintien des prix typique. Divers frais imposés par Visa et Mastercard aux commerçants qui acceptent leurs cartes, plutôt qu'une situation où un fournisseur influence ou décourage la réduction du prix auquel un revendeur vend ou annonce le produit du fournisseur, étaient en cause.

d. Refus de vendre

Si un fournisseur refuse d'approvisionner un client potentiel, le Tribunal peut lui ordonner de l'approvisionner dans les conditions commerciales habituelles s'il constate :

  1. que les activités du client potentiel sont considérablement affectées ou qu'il ne peut pas exercer ses activités en raison de son incapacité à obtenir des fournitures adéquates dans les conditions commerciales habituelles;
  2. que la raison pour laquelle le client ou le client potentiel n'est pas en mesure d'obtenir des fournitures adéquates est la concurrence insuffisante entre les fournisseurs;
  3. que le client ou le client potentiel est disposé à respecter les conditions commerciales habituelles du ou des fournisseurs du produit concerné et capable de le faire;
  4. que le produit concerné est largement disponible;
  5. que le refus de faire affaire a ou est susceptible d'avoir un effet défavorable sur la concurrence d'un marché.

Le Bureau ou un client potentiel (avec l'autorisation du Tribunal) peut demander une telle ordonnance au Tribunal.

e. Vente liée

La vente liée est une forme de refus de vente dans laquelle un fournisseur accepte de fournir un produit à un client uniquement à la condition que le client :

  1. acquière un second produit du fournisseur;
  2. s'abstienne d'utiliser ou de distribuer, conjointement avec le produit du fournisseur, un autre produit qui n'est pas fabriqué ou désigné par le fournisseur.

La vente liée implique également d'inciter un client à accepter ces conditions en lui proposant de fournir un produit à des conditions plus favorables. Le Tribunal peut constater qu'un important fournisseur est engagé dans la vente liée, ou qu'il est répandu sur un marché, s'il est susceptible :

  1. d'empêcher l'entrée ou l'expansion d'une entreprise;
  2. d'empêcher l'introduction d'un produit ou l'expansion des ventes;
  3. d'avoir un autre effet d'exclusion avec comme résultat que la concurrence diminue ou soit susceptible de diminuer sensiblement.

Si tel est le cas, le Tribunal peut interdire la poursuite de la pratique ou imposer toute autre exigence nécessaire pour surmonter les effets anticoncurrentiels de la pratique.

Le Bureau ou un client concerné (avec l'autorisation du Tribunal) peut engager une procédure devant le Tribunal.

f. Vente exclusive

La vente exclusive a lieu lorsqu'un fournisseur exige d'un client, en tant que condition d'approvisionnement, qu'il négocie uniquement ou principalement des produits fournis ou désignés par le fournisseur ou s'abstienne de vendre un produit spécifié, sauf ceux fournis par le fournisseur. La vente exclusive consiste à inciter un client à accepter ces conditions en proposant de fournir au client des conditions plus favorables. La preuve requise et les mesures correctives sont les mêmes que celles décrites dans le cadre de la vente liée. Comme pour la vente liée, le Bureau ou un client concerné (avec l'autorisation du Tribunal) peut intenter une procédure devant le Tribunal.

Il n'y a eu que quelques cas de vente exclusive depuis l'ajout de ces dispositions à la Loi sur la concurrence en 1976. Le peu de jurisprudence existante suggère que, pour que le Bureau ou une partie privée touchée ait un cas viable, la vente liée ou la vente exclusive présumée doit rendre pratiquement impossible l'entrée ou l'existence d'un fournisseur concurrent sur un marché.

g. Restriction de marché verticale

La restriction de marché verticale se produit lorsqu'un fournisseur exige d'un client, comme condition d'approvisionnement, qu'il fournisse un produit uniquement sur un marché défini ou impose une pénalité au client si le produit est fourni en dehors d'un marché défini.

Si le Tribunal conclut que cette pratique est exercée par un fournisseur important ou est répandue sur un marché et risque de réduire sensiblement la concurrence, le Tribunal peut interdire la poursuite de la pratique ou imposer toute autre exigence nécessaire pour combattre les effets de la pratique anticoncurrentielle.

Le Bureau ou un client concerné (avec l'autorisation du Tribunal) peut engager une procédure devant le Tribunal.

Il n'y a eu aucune affaire concernant l'application directe de la disposition relative à la restriction de marché verticale depuis son ajout à la Loi sur la concurrence en 1976.

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1 La Loi sur la concurrence contient également des dispositions civiles et pénales relatives à la publicité et au marketing. Pour en savoir plus, voir le chapitre sur la publicité et le marketing.

2 Le chiffre de 96 millions de dollars s'appliquait en 2019. Il est ajusté annuellement en fonction de l'évolution du PIB du Canada.

3 Les dispositions relatives à la discrimination par les prix, aux prix d'éviction et aux indemnités promotionnelles ont été abrogées. La conduite applicable peut toujours être contestée en vertu de la disposition relative à la pratique examinable plus générale concernant les abus de position dominante. La disposition relative à la discrimination par les prix a été convertie en une pratique examinable. La Loi sur la concurrence contient également des dispositions criminelles concernant la publicité mensongère et trompeuse, qui sont examinées dans le chapitre sur la publicité et le marketing.


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