Alexander Camenzind
Associate
Lawyer and Patent Agent
Article
Si l'annonce, vendredi dernier, des modifications apportées au Règlement sur les médicaments brevetés (le « RMB ») n'a pas causé de véritable surprise, elle a cependant mis en évidence la profonde incertitude avec laquelle doivent composer les brevetés qui commercialisent des médicaments au Canada.
Un examen plus approfondi du libellé du règlement, ainsi que du résumé de l'étude d'impact de la réglementation (« REIR ») et de l'analyse coûts-avantages qui l'accompagnent, met en évidence l'ampleur du travail qui reste à accomplir pour assurer la mise en place au Canada d'un système de tarification équitable, prévisible et transparent.
Trois grandes catégories de changements sont envisagées dans le RMB modifié :
Selon les projections du gouvernement, les modifications au RMB devraient donner lieu à des économies sur 10 ans de 8,8 milliards de dollars, le montant économisé augmentant graduellement d'une année à l'autre. Sur ce montant projeté de 8,8 milliards de dollars d'économies, le gouvernement estime que l'ajout de nouveaux facteurs de réglementation du prix aura la plus grande incidence sur les dépenses en médicaments brevetés (3,8 milliards de dollars), suivi de la mise à jour de l'annexe des pays de comparaison (économies de 2,8 milliards de dollars) et de l'utilisation des revenus réels nets de tout rajustement (économies de 2 milliards de dollars).
Tous les médicaments vendus au Canada sont assujettis aux changements apportés aux pays de comparaison et à l'obligation de déclarer le prix « réel » des médicaments net de tout rajustement, rabais et remise. Toutefois, les médicaments qui obtiennent leur numéro d'identification du médicament (DIN) avant la publication du RMB dans la Partie II de la Gazette du Canada (le 21 août 2019) ne seront pas visés par les nouveaux facteurs devant être pris en considération pour l'établissement du prix et par les obligations additionnelles en matière de rapports concernant ces facteurs. On ignore si un breveté (défini au sens large comme étant toute personne tirant un profit du brevet, y compris les titulaires de licences) qui serait par ailleurs exclu à cause de la date d'attribution de son DIN pourrait invoquer ces facteurs additionnels s'ils lui permettaient d'établir que son prix est inférieur au plafond au-delà duquel il serait jugé excessif.
Fait intéressant à souligner, le fait d'exclure les seuls produits ayant obtenu leur DIN avant le 21 août 2019 revient à assujettir intégralement au RMB les médicaments commercialisés en vertu du Programme d'accès spécial, auxquels aucun DIN n'est attribué. En revanche, du fait que la délivrance d'un avis de conformité ne soit pas considérée comme un critère, les médicaments actuels à l'égard desquels de nouvelles indications sont homologuées (sans attribution d'un nouveau DIN) pourraient voir leur position sur le marché connaître des changements importants sans être assujettis à des changements correspondants quant aux exigences du CEPMB.
Il est intéressant de noter le choix d'utiliser comme critère la date d'attribution du DIN, qui échappe pour l'essentiel au contrôle du breveté. À la différence d'une date de présentation prévue par règlement, il est difficile pour le breveté de contrôler la date à laquelle un DIN sera attribué, celle-ci étant tributaire du processus d'examen de Santé Canada. Le délai entre l'annonce des modifications le 9 août 2019 et la date d'entrée en vigueur le 21 août 2019 est sans grande importance sur le plan de l'impact pour le breveté, car sa liberté d'action dans l'intervalle est extrêmement réduite.
Les modifications apportées au RMB s'inscrivent dans la tendance récente à assujettir les règlements édictés en vertu de la Loi sur les brevets à des dates sur lesquelles le breveté ne peut exercer aucun contrôle. Ainsi, dans le Règlement sur les certificats de protection supplémentaire, certaines procédures en matière de conflit de demandes sont tranchées en fonction de la date de délivrance du brevet. Toutefois, le breveté n'ayant aucun contrôle sur la date à laquelle son brevet sera délivré, contrairement à la date de dépôt d'une demande de brevet, il lui est pratiquement impossible de déterminer ses droits et obligations substantiels en vertu de la loi.
Le changement dont le champ d'application est le plus vaste est la modification apportée à l'annexe répertoriant les pays utilisés pour les comparaisons de prix. À l'heure actuelle, le prix d'un médicament est comparé à celui en vigueur dans les sept pays constituant le « CEPMB7 », à savoir les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne, la Suisse, l'Italie et la Suède.
À compter du 1er juillet 2020, les comparaisons internationales se feront par rapport aux pays du « CEPMB11 », c'est-à-dire l'Australie, la Belgique, la France, l'Allemagne, l'Italie, le Japon, les Pays-Bas, la Norvège, l'Espagne, la Suède et le Royaume-Uni.
Outre l'ajout de nouveaux pays, un changement important est la suppression des États-Unis et de la Suisse. Ces deux pays étaient en général considérés comme pratiquant des prix de médicaments élevés et leur choix faisait l'objet de critiques au motif qu'il haussait artificiellement la valeur du prix plafond non excessif. L'inclusion de la Corée du Sud avait été proposée dans la liste initiale des nouveaux pays de comparaison, mais n'a pas été retenue dans sa version finale.
En conséquence de la mise à jour de l'annexe des pays de comparaison, à compter du 1er juillet 2020, toutes les comparaisons et les évaluations effectuées par le CEPMB le seront par rapport aux pays du CEPMB11, et non pas du CEPMB7. Cette règle s'appliquera sans égard à la date d'obtention du DIN du médicament.
Fait à souligner, aucune disposition transitoire n'est prévue dans les modifications apportées au RMB. Par conséquent, le CEPMB11 remplacera immédiatement le CEPMB7 à compter du 1er juillet 2020. On ignore quelles conséquences aura ce changement sur les ventes effectuées avant cette date. Malgré la présomption générale voulant que l'application des changements législatifs ne soit pas rétroactive, il serait important, au stade de la rédaction des lignes directrices du CEPMB, de faire préciser que les pays composant le CEPMB11 ne seront pas utilisés comme comparateurs pour les ventes effectuées avant le 1er juillet 2020.
Un changement important apporté aux exigences en matière de déclaration est l'obligation pour le breveté de déclarer le prix « réel » du médicament. Autrement dit, les prix « sortie d'usine » utilisés auparavant ne sont plus pris en compte et, dorénavant, le breveté devra plutôt déclarer le prix et les recettes nets de tout ajustement comme les rabais, les remises, ou encore les biens ou les services gratuits. Tout comme le groupe élargi de pays de comparaison, ce changement vise tous les médicaments pour lesquels des renseignements sur le prix doivent être transmis, sans égard à la date d'obtention de leur DIN.
Selon le REIR, en ayant connaissance du prix réel du médicament, le CEPMB sera en meilleure position pour calculer le prix moyen des transactions afin d'orienter les facteurs existants. De plus, est-il indiqué dans cette étude, la déclaration du prix réel, qui sera inférieur au prix sortie d'usine, aidera les brevetés à se conformer aux nouveaux plafonds de prix moins élevés qui devraient découler de l'application des nouveaux facteurs de réglementation du prix.
Aux termes des modifications apportées au RMB, le breveté n'est pas tenu de divulguer l'existence ou les modalités d'une entente d'établissement de prix ou d'une remise confidentielle. Le breveté doit plutôt fournir les renseignements suivants :
Le REIR souligne qu'un breveté ne sera pas tenu de divulguer d'information ou d'ententes confidentielles. Le titulaire de brevet ne sera tenu « que de déclarer le total des recettes nettes tirées des médicaments, le nombre d'unités vendues aux fins du médicament et le prix moyen de la transaction de tout marché au Canada, sans fournir les renseignements sur la taille ou l'existence de rabais consentis à de tierces parties. »
Toutefois, on ne sait pas exactement comment procédera le CEPMB pour évaluer cette information, puisque la seule façon de confirmer avec exactitude un prix net est d'avoir en mains le recettes brutes, le nombre d'unités vendues et les remises et rajustements consentis. On peut donc se demander si le CEPMB tentera d'exiger la divulgation de toute information autre que la valeur nette calculée par le breveté aux fins de vérifier la validité du prix net déclaré.
Le REIR indiquant clairement que l'existence et les modalités des ententes confidentielles n'ont pas à être divulguées, il semble que le CEPMB pourrait devoir accepter la valeur nette telle que déclarée par le breveté sans pouvoir demander de documentation justificative. À tout le moins, le REIR affirme sans ambiguïté que le breveté est en droit de protéger la confidentialité de l'existence et des modalités de ses ententes avec des tiers. Encore une fois, cette question fera vraisemblablement l'objet de débats animés au stade de l'élaboration des nouvelles Lignes directrices du CEPMB.
On ignore également de quelle façon le CEPMB utilisera le prix « réel » d'un médicament. Fait à souligner, le gouvernement fédéral prévoit réaliser des économies de 2 milliards de dollars grâce à la déclaration du prix réel des médicaments; les autorités sont donc convaincues que ce changement aura pour effet de réduire les prix plafonds non excessifs fixés par le CEPMB. Cependant, plusieurs obstacles à leur utilisation pourraient réduire le montant des économies possibles.
Selon le cadre d'analyse actuel du CEPMB, les prix sont comparés aux prix de vente dans d'autres pays (ceux qui constitueront bientôt le CEPMB11) ou aux prix d'autres médicaments canadiens appartenant à la même catégorie thérapeutique. Actuellement, le CEPMB s'appuie sur les prix dans d'autres pays déclarés par le breveté lorsqu'il utilise les pays de comparaison et sur l'information disponible publiquement dans le cas d'une comparaison à l'intérieur d'une catégorie thérapeutique.
Aux termes des nouvelles exigences en matière de fourniture de renseignements intégrées au RMB modifié, le breveté devra désormais déclarer les prix nets uniquement pour les médicaments vendus au Canada. Par conséquent, la comparaison avec les prix dans d'autres pays reviendra à comparer les prix nets canadiens aux prix « sortie d'usine » (en général plus élevés) du groupe de pays du CEPMB11. À défaut de remanier les critères de comparaison avec les prix pratiqués à l'étranger, il est donc probable que les prix canadiens seront inférieurs au prix plafond non excessif en raison de la possibilité de se fonder sur les remises, les rabais et les autres rajustements pour leur évaluation. Une telle éventualité semble être en contradiction avec les économies projetées par le gouvernement fédéral.
En ce qui concerne la comparaison fondée sur la catégorie thérapeutique, on ignore comment procédera le CEPMB pour se fonder sur le prix net des produits de remplacement. À l'heure actuelle, pour effectuer une comparaison fondée sur la classe thérapeutique, le CEPMB s'appuie sur les prix publics affichés par différentes sources canadiennes comme les distributeurs ou les listes de médicaments remboursés. Dans le REIR du RMB modifié comme dans son analyse coûts-avantages, il est indiqué que les prix réels déclarés par les brevetés seront utilisés pour établir un prix plafond (théoriquement moins élevé) pour les nouveaux médicaments de la même classe thérapeutique. Une telle éventualité expliquerait les économies projetées par le gouvernement grâce aux modifications; toutefois, il reste à déterminer la mesure dans laquelle le CEPMB est autorisé par la loi à utiliser cette information confidentielle pour effectuer une comparaison fondée sur la catégorie thérapeutique.
Aux termes de la Loi sur les brevets (article 87), les renseignements sur les prix fournis au CEPMB sont protégés et ne peuvent être divulgués à une autre personne. Le CEPMB n'est autorisé à utiliser cette information que pour informer certains représentants du gouvernement en particulier, et pour établir son rapport annuel. La Loi sur les brevets ne semble pas autoriser l'utilisation de ces renseignements confidentiels pour fixer un prix plafond pour une catégorie thérapeutique donnée.
Selon toute vraisemblance, le CEPMB pense être en droit d'utiliser ces renseignements protégés pour fixer par voie interne un prix plafond applicable à une catégorie thérapeutique donnée dans la mesure où il ne divulgue pas cette information confidentielle à un tiers. Toutefois, un breveté pourrait alors être assujetti à une restriction du prix fondée sur des renseignements secrets auxquels il n'a pas accès. S'il est possible pour le CEPMB de divulguer un prix plafond non excessif établi à partir de renseignements confidentiels sans violer la Loi sur les brevets, la restriction de l'information fournie au breveté empêcherait ce dernier d'exercer un réel contrôle sur les calculs du CEPMB ou de contester d'éventuelles irrégularités. Une telle situation engendrerait d'importants problèmes d'équité procédurale lors de toute audience devant le Conseil. De plus, dans le cas d'une catégorie thérapeutique comptant un nombre restreint de médicaments, la connaissance des prix courants publics et la divulgation par le CEPMB du prix plafond non excessif pour cette classe pourraient avoir pour effet conjugué de rendre publics des renseignements sur les prix d'une partie qui sont protégés.
Enfin, si le CEPMB ne publie pas les nouveaux prix plafonds non excessifs pour toute catégorie thérapeutique donnée, il sera difficile pour le breveté de prévoir le résultat d'une comparaison fondée sur cette catégorie jusqu'à ce que le Conseil institue un examen des prix, puisque ce dernier s'appuie sur des renseignements secrets. En définitive, cela aura pour effet de réduire la transparence et la prévisibilité du processus.
L'utilisation de prix nets confidentiels par le CEPMPB sera probablement un sujet de discussion et de débat important lors de l'élaboration des nouvelles lignes directrices du Conseil.
Les modifications réglementaires les plus importantes s'appliquent à tous les médicaments vendus au Canada, à l'exception de ceux ayant obtenu leur DIN avant le 21 août 2019. Celles-ci prévoient l'ajout de nouveaux facteurs dont le CEPMB doit tenir compte pour décider si un médicament est vendu à un prix excessif. Concrètement, le CEPMB doit désormais tenir compte également des facteurs suivants :
Pour déterminer si le prix d'un médicament est excessif, le CEPMB doit à présent tenir compte de la valeur pharmacoéconomique de celui-ci. Le principal paramètre utilisé sera le rapport coût-efficacité différentiel (RCED), qui évalue le coût du médicament par année de vie ajustée en fonction de la qualité (QALY). Selon le REIR, cela permettra au CEPMB de tenir compte du coût d'option du nouveau médicament dans le cas du remplacement d'un traitement existant. Les modalités précises selon lesquelles les paramètres pharmacoéconomiques seront évalués par le CEMPB n'ont pas encore été définies.
La prise en compte par le CEPMB des paramètres pharmacoéconomiques impose au breveté une exigence additionnelle en matière de fourniture de renseignements, celle de transmettre toute analyse coût-utilité préparée par un organisme canadien financé par l'État qui a été publiée et communiquée au breveté et dont les résultats sont exprimés en fonction du coût par QALY pour chaque indication. Cette disposition vise d'une manière générale les demandes déposées auprès de l'Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS) (tant le Programme commun d'évaluation des médicaments [PCEM] que le Programme pancanadien d'évaluation des anticancéreux [PPEA]) et de l'Institut national d'excellence en santé et services sociaux (INESSS). Le breveté doit également fournir tout renseignement visant le médicament qui a été caviardé dans l'analyse publiée par ces organisations. Ici encore, on ignore de quelle façon le CEPMB utilisera ces renseignements confidentiels et si une telle utilisation est interdite par l'article 87 de la Loi sur les brevets.
Alors que le breveté a l'obligation de fournir uniquement les analyses coût-utilité effectuées par des entités financées par l'État, aucune restriction correspondante ne s'applique à l'information sur laquelle le CEPMB doit s'appuyer pour déterminer si le prix d'un médicament est excessif. Il semble donc que le breveté pourrait présenter des données pharmacoéconomiques additionnelles, par exemple des analyses effectuées par des firmes privées, que le CEPMB serait tenu de prendre en considération.
Il demeure certaines incertitudes importantes quant à la prise en compte des données pharmacoéconomiques pour déterminer si un prix est excessif. Outre le poids à accorder à une telle analyse, le RMB passe sous silence les éléments suivants :
De plus, la présentation des résultats des analyses pharmacoéconomiques n'est une obligation que pour les médicaments dont les coûts au cours d'une période de 12 mois (au prorata) dépasseraient un seuil de 50 % du produit intérieur brut (PIB) par habitant au Canada au moment de la publication de l'analyse. Toutefois, le PIB par habitant n'est pas un chiffre officiel publié quotidiennement ou facile à obtenir auprès d'une source fiable, ce qui engendre une certaine incertitude pour déterminer si le coût d'un médicament dépasse un tel seuil. Il reste à savoir si le CEPMB publiera un PIB par habitant aux fins du présent article ou s'il laissera au breveté le soin de faire appel à son bon sens pour déterminer s'il y a lieu ou pas de fournir cette information. Enfin, on ne sait pas ce que le CEPMB considérera comme étant le « coût » du médicament aux fins des exigences en matière de communication d'information (p. ex., prix courant ou prix net), hormis le fait qu'il soit calculé au prorata sur une période de 12 mois.
Pour déterminer si le prix d'un médicament est excessif, le CEPMB tiendra également compte de la taille du marché de celui-ci. Autrement dit, le nombre de ventes effectuées aura une influence sur la question de savoir si un médicament est vendu à un prix excessif ou non. Selon le REIR, le fondement de cette exigence est que la taille du marché pourrait entraîner le déplacement de technologies plus rentables. Toutefois, on ignore dans quelle mesure le déplacement et le coût d'option diffèrent de ce qui est déjà pris en considération dans n'importe quelle analyse pharmacoéconomique.
L'impact possible de la taille du marché contribue de façon importante à l'incertitude entourant le RMB et sera vraisemblablement à l'origine de discussions et de débats approfondis lors de la mise à niveau des lignes directrices du CEPMB. Ce facteur pourrait donner lieu à des situations où les médicaments peu coûteux mais à volume de vente élevé seraient traités différemment des médicaments très coûteux mais à faible volume de vente (comme les traitements des maladies rares).
La façon dont le CEPMB utilisera la taille du marché pour déterminer si un prix est excessif reste à préciser. L'analyse coûts-avantages présuppose que le CEPMB élaborera des critères d'impact du marché pour les médicaments susceptibles de poser aux assureurs des difficultés sur le plan de l'abordabilité en raison de la taille de leur marché. De plus, il est indiqué dans le REIR que la taille du marché permettra au CEPMB de réévaluer les prix des médicaments au fil du temps, à mesure que la taille de leur marché s'élargit ou se resserre.
En fin de compte, une clarification importante du rôle du facteur de la taille du marché sera nécessaire si l'on veut que les nouvelles lignes directrices du CEPMB donnent un minimum de certitude à chaque breveté.
Le REIR est tout aussi avare de détails sur la façon dont le PIB du Canada (et le PIB par habitant au Canada) influera sur la question de savoir si le prix d'un médicament est excessif. Le REIR indique que la croissance du PIB au cours d'une année donnée constitue un indicateur de ce que le marché peut payer relativement aux nouveaux médicaments brevetés. En parallèle, l'analyse coûts-avantages indique que la croissance du PIB du Canada est un indicateur du seuil de recettes maximales de l'ensemble des nouveaux médicaments introduits sur le marché au cours d'une année donnée.
Plus précisément, il est souligné dans l'analyse coûts-avantages que la croissance du PIB sera utilisée pour établir un seuil pour les nouveaux médicaments introduits sur le marché au cours d'une année donnée de sorte que ceux dont les recettes totales dépassent ce seuil verront leur prix diminuer. Il apparaît donc que la question de savoir si le prix d'un médicament est « excessif » sera tranchée en fonction de facteurs échappant totalement au contrôle du breveté.
La mise en application de ce facteur est entourée d'incertitudes. Le recours au PIB du Canada pour déterminer le prix d'un médicament a pour effet d'introduire une nouvelle variable qui échappe au contrôle du breveté et qui pourrait être appliquée rétrospectivement, lorsque les chiffres sont connus. Il sera très difficile pour un breveté de déterminer un prix en se fondant sur des facteurs inconnus comme la vigueur de l'économie canadienne, le nombre de lancements de nouveaux médicaments au cours d'une année donnée et les recettes générées par ces autres médicaments.
Ici encore, il faudra que les lignes directrices du CEPMB apportent des clarifications importantes afin d'assurer au breveté un minimum de certitude et de prévisibilité quant aux modalités d'application de ce facteur.
Le RMB modifié sera publié dans la Partie II de la Gazette du Canada le 21 août 2019. Le CEPMB a également publié sur son site des Questions et réponses au sujet du RMB modifié où il explique ses prochaines étapes. Le CEPMB a annoncé que les consultations concernant les nouvelles lignes directrices commenceront bien avant la date de mise en œuvre du 1er juillet 2020 et qu'une version préliminaire de ce document devrait être publiée cet automne. Toutefois, ni la nature exacte de ces consultations, ni l'ampleur des modifications devant être apportées à ces lignes directrices n'ont été précisées.
Comme nous l'avons mentionné plus haut, le libellé du RMB est entouré d'incertitudes, y compris quant à la façon dont il sera tenu compte de ces facteurs, et un pouvoir discrétionnaire appréciable semble avoir été laissé au CEPMB pour déterminer la manière dont il appréhendera son mandat modifié. À défaut d'une clarification suffisante, dans le cadre des consultations sur les lignes directrices, de la façon dont le CEPMB entend tenir compte de ces facteurs, la question de l'acceptabilité du prix des médicaments souffrira d'un manque de prévisibilité qui aura une incidence négative sur la décision d'un breveté de lancer de nouveaux produits.
Une période de consultation intense est à prévoir, car la date de mise en œuvre du 1er juillet 2020 approche à grands pas. L'industrie peut s'attendre à ce que les premières décisions rendues aux termes des nouvelles lignes directrices du CEPMB fassent l'objet non seulement de débats animés, mais aussi de demandes de contrôle judiciaire.
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