Le 8 avril, le Bureau de la concurrence du Canada a publié une déclaration affirmant que compte tenu de la crise de la COVID-19, l'établissement rapide de collaborations d'envergure et de durée limitées entre entreprises afin d'assurer la fourniture et prestation des produits et services essentiels peut s'avérer nécessaire. Le Bureau ne souhaite pas que des préoccupations liées à l'application de la loi en matière de concurrence puissent « potentiellement réfréner » des activités possiblement nécessaires pour aider les Canadiens. 

Points essentiels selon Gowling WLG

Dans sa déclaration, le Bureau a affirmé qu'il s'abstiendra généralement d'exercer un contrôle quant au respect de la Loi sur la concurrence lorsque la collaboration entre les entreprises est clairement nécessaire et à court terme en vue de contribuer à la réponse à la crise (plutôt que d'atteindre un avantage concurrentiel), pourvu que la collaboration soit entreprise et effectuée de bonne foi, sans dépasser ce qui est absolument nécessaire. Ceci dit, le Bureau a également souligné qu'il n'aura aucune tolérance envers toute tentative d'abuser de cette flexibilité en vue de dissimuler un comportement non nécessaire qui enfreindrait la Loi. Par conséquent, toute entreprise qui envisage de s'écarter de ses pratiques habituelles doit agir avec prudence.

Orientation fournie par le Bureau

Le Bureau a également reconnu que certaines entreprises souhaiteront sûrement obtenir des réponses précises avant d'établir une collaboration proposée avec un concurrent. Le Bureau a donc créé une équipe d'intervention rapide chargée de fournir une « orientation informelle » à cet égard. Les entreprises qui désirent obtenir une telle orientation doivent écrire un courriel au Bureau, à l'adresse spéciale CB-COVID19-BC@canada.ca et fournir les renseignements suivants :

  • les entreprises impliquées et les paramètres de la collaboration, notamment l'envergure et la durée proposées;
  • une description détaillée de la façon dont la collaboration atteindra un objectif clair relativement à l'intérêt public par rapport à la COVID-19;
  • une explication de la nécessité de la collaboration afin d'atteindre cet objectif;
  • une description de toute orientation demandée auprès des autorités pertinentes sur la question de savoir si la collaboration envisagée contribuera effectivement à renforcer la réponse du Canada en ce qui a trait à la COVID-19.

Le Bureau a indiqué que les considérations opérationnelles suivantes s'appliqueront aussi en lien avec toute demande d'orientation informelle :

  • Le Bureau peut solliciter la rétroaction d'autres instances gouvernementales à tous les échelons, de parties prenantes et de personnes-ressources du marché en ce qui concerne la collaboration proposée;
  • Le commissaire peut exiger des conditions afin de veiller à ce que l'incidence sur la concurrence soit limitée au strict nécessaire pour répondre aux besoins primordiaux en cette période d'urgence;
  • Toute orientation informelle sera limitée dans le temps et sera revue après la période initiale si les parties demandent à ce qu'elle soit prolongée;
  • L'orientation fournie ne protégerait pas un comportement contre une éventuelle action privée;
  • Il sera du ressort du commissaire de rendre publique l'orientation par souci de transparence;
  • À la fin de la période, si elle n'est pas prolongée par le commissaire, chaque partie devrait fournir au commissaire une confirmation écrite que la collaboration a pris fin.

Aucune estimation précise n'a été fournie par le Bureau quant au délai de réponse aux demandes d'orientation informelle (le délai dépendra entre autres de la rapidité avec laquelle les parties fourniront au Bureau les informations requises et répondront à d'éventuelles questions). Le Bureau a toutefois affirmé que l'« objectif de cette équipe sera de faciliter une prise de décision rapide afin de permettre aux entreprises de contribuer aux efforts de réponse à la crise. »

Mise en œuvre d'une collaboration entre concurrents

Nonobstant la déclaration du Bureau, avant la mise en œuvre d'une quelconque proposition de collaboration entre concurrents en réponse à la crise de la COVID-19, nous conseillons à toute entreprise qui envisage de s'écarter de ses pratiques habituelles relativement à la loi en matière de concurrence d'examiner la proposition avec son propre conseiller juridique. À partir de là, on sera en mesure de décider s'il convient de demander une orientation informelle spécifique au Bureau, en fonction de la nature de la collaboration proposée et de la tolérance au risque des parties. De façon générale, toute proposition de collaboration avec un concurrent qui constituerait normalement une infraction criminelle (p. ex., la fixation des prix, le partage de la clientèle ou des marchés, la limite ou le contrôle de l'offre) présente un risque plus élevé. En revanche, certaines autres formes de collaboration entre concurrents, ainsi que les liens hiérarchiques entre fournisseurs et clients, présentent un risque plus faible.