La marque de commerce en forme de quatre doigts de Kit Kat n’a pas été validement enregistrée dans l’UE selon la CJUE

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28 août 2018

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La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) s’est prononcée quant à la validité de la marque de commerce du géant de l’industrie chocolatière suisse Nestlé, qui visait à protéger la forme de la tablette de chocolat Kit Kat.

En confirmant la décision du Tribunal, la CJUE a conclu qu’afin de prouver qu’une marque de commerce dépourvue d’un caractère distinctif inhérent a acquis un caractère distinctif par l’usage, le titulaire de la marque doit en faire la preuve dans chaque État membre au regard duquel le caractère distinctif inhérent fait défaut. Et si le caractère distinctif inhérent fait défaut dans chaque État, alors il faut en faire la preuve dans chacun d’entre eux.

Comme Nestlé n’a pas prouvé que sa marque a acquis un caractère distinctif dans chaque État membre visé, la Chambre de recours a erronément conclu que la marque était valide.



Il y a 16 ans, en mars 2002, Nestlé a demandé l’enregistrement d’une marque de commerce européenne afin de protéger la forme de sa tablette de chocolat Kit Kat à quatre doigts, pour les produits (biscuits et autres) relevant de la classe 30 :

Image of four finger chocolate bar

La marque a été enregistrée en juillet 2006. Moins d’un an plus tard, en mars 2007, un important compétiteur, Cadbury Schweppes (devenu Mondelez) a introduit une action en nullité à l’égard de la marque auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en invoquant que cette dernière était dépourvue de caractère distinctif.

Un recours similaire a opposé les mêmes parties au Royaume-Uni après que Nestlé ait demandé d’y enregistrer sa marque. En mai 2017, la Cour d’appel confirmait la décision de première instance du juge Arnold et refusait l’enregistrement, considérant que Nestlé n’avait pas prouvé l’acquisition d’un caractère distinctif au Royaume-Uni.

En comparaison, dans les procédures européennes, même si le Tribunal a convenu que la marque était dépourvue de caractère distinctif inhérent, il a conclu, en décembre 2016, que Nestlé avait fait la preuve de l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage, non seulement au Royaume-Uni, mais également au Danemark, en Allemagne, en Espagne, en France, en Italie, aux Pays-Bas, en Autriche, en Finlande et en Suède. Cependant, lors du dépôt de la demande d’enregistrement en mars 2002, l’EU comptait 15 États membres. La population des États membres où Nestlé avait fait la preuve de l’acquisition d’un caractère distinctif représentait presque 90 % de la population totale de l’UE de l’époque. Malgré cela, le Tribunal en est venu à la conclusion qu’une « fusion » de territoires était interdite. La question pertinente était de savoir si, dans toute l’UE, une partie importante du public pertinent percevait la marque comme une indication de l’origine commerciale du produit. Une reconnaissance lacunaire dans une partie du territoire ne pouvait pas compenser un plus haut degré de reconnaissance ailleurs. Le Tribunal a donc considéré que la Chambre de recours, qui avait conclu à l’acquisition du caractère distinctif par l’usage, sans décider si la marque avait acquis un caractère distinctif en Belgique, en Irlande, en Grèce et au Portugal, avait eu tort. Étrangement, le Tribunal semble avoir oublié le Luxembourg!

Dans son jugement rendu le 25 juillet dernier, la CJUE a confirmé la décision du Tribunal. La marque de Nestlé, soit la forme de sa tablette de chocolat à quatre doigts, sans la présence des termes « Kit Kat » en relief apparaissant sur le produit mis en marché, n’avait pas de caractère distinctif inhérent où que ce soit dans l’Union européenne (UE). Nestlé devait donc prouver l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage dans chaque État membre. Comme Nestlé ne l’avait pas fait, la Chambre de recours avait eu tort de reconnaître la validité de sa marque.


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