En août 2018, le Forum économique mondial (World Economic Forum ou « WEF ») a publié un rapport intitulé The New Physics of Financial Services qui se penche sur la façon dont l’intelligence artificielle (IA) transformera le secteur des services financiers.
En couverture du rapport : une image des « Piliers de la création » dans la nébuleuse de l’Aigle prise par le télescope spatial Hubble, ce qui est tout à fait approprié pour un rapport sur la façon dont l’IA va bouleverser le secteur financier. Le WEF fait l’analogie suivante : « L’IA est en train de changer la physique des services financiers en affaiblissant les liens qui unissaient traditionnellement les institutions financières, tout en créant de nouveaux centres de gravité où les capacités nouvelles et anciennes s’unissent de façon inattendue ».
Le rapport examine l’évolution des relations entre les acteurs du secteur financier, et aborde plusieurs questions relatives à la réglementation de l’IA dans ce secteur. L’un des objectifs du rapport est d’aider les organismes de réglementation à comprendre les défis auxquels ils font face et les interventions nécessaires à effectuer auprès des consommateurs tout comme dans l’industrie. Voici donc quelques observations et questions formulées à cet égard :
- Il n’existe aucune définition précise de l’IA, ce qui entraîne de la confusion et des désaccords.
- Les organismes de réglementation des données qui régissent la protection de la vie privée et la portabilité des données influeront sur la capacité des institutions à utiliser l’IA, et deviendront aussi importants que les organismes de réglementation financière actuels.
- Les fardeaux réglementaires actuels exercent une forte pression sur les institutions financières et une forme d’IA qui assurerait la conformité réglementaire pourrait aider à régler ce problème.
- Si la conformité réglementaire devenait collectivement centralisée grâce à l’IA, les institutions financières ne voudraient pas être tenues responsables du rendement centralisé, créant ainsi des tensions avec les organismes de réglementation qui voudraient les tenir responsables.
- Il faudra trouver des solutions aux différences transfrontalières en matière de réglementation financière et de réglementation des données, mais ces solutions seront-elles mises en œuvre?
- La réglementation des données affectera la façon dont les institutions concluront des partenariats (des partenariats de données seront requis). Les organismes de réglementation traiteront-ils les entreprises de technologie et les institutions financières de la même manière en ce qui concerne les normes de partage des données?
- La réglementation des données à l’échelle internationale connaît actuellement une période de changement sans précédent, puisque les gouvernements cherchent à protéger les citoyens. Les nouvelles règles ne sont pas les mêmes et les approches diffèrent dans chaque pays.
- La réglementation des données deviendra le facteur déterminant du rôle et du positionnement des intervenants du secteur des services financiers. La question de savoir si la réglementation leur permettra ou non d’accéder aux données des clients aura une incidence sur les fournisseurs de services financiers.
- Le partage des données complique la surveillance et la vérification réglementaires. La surveillance réglementaire de la gestion des données devra être renforcée à mesure que le risque de partage incorrect des données et d’atteinte à la protection de ces dernières augmente.
- Le déficit actuel des compétences des organismes de réglementation dans ce domaine est plus important que celui que connaissent les institutions privées, ce qui pose un défi pour les organismes de réglementation.
- La réglementation actuelle est peut-être trop complexe, incertaine dans l’attribution des responsabilités, fragmentée, axée sur la prévention des risques et peut nécessiter des vérifications (ce qui peut être difficile dans les systèmes IA). Il s’agit là d’obstacles à la mise en œuvre de l’IA.
- Les organismes de réglementation doivent répondre aux nouvelles tendances et protéger les clients tout en laissant la place à l’innovation.
- Une réglementation « immuable » est nécessaire pour assurer la clarté et faire en sorte que les acteurs du système financier sachent comment se conformer aux règlements. Les principes généraux de protection financière des consommateurs et d’équité actuellement en vigueur dans le système de réglementation sont solides et n’ont pas besoin d’être modifiés.
- Les différences régionales en matière de réglementation aggravent la coordination transfrontalière. (Ce point est très semblable à certaines conclusions du rapport du département du Trésor des États-Unis.)
Toutes ces observations sont bonnes. Le reste du rapport (en fait, la majeure partie) porte sur les effets de l’IA sur le système financier. Il est pertinent et résulte de l’apport de nombreux participants.
Cet article est la révision d’un résumé antérieur du rapport rédigé par Christopher Alam, qui tient un blogue sur la réglementation en matière d’IA.