Michael Crichton
Associé
Agent de brevets
Article
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Les titulaires de brevets ont de plus en plus tendance à faire protéger leurs droits de brevets hors des frontières des États-Unis. D’aucuns diraient que le processus de révision inter partes ainsi que diverses décisions récentes de la Cour suprême américaine ont rendu la protection de droits de brevets aux États-Unis plus difficile depuis cinq ans au moins. Les titulaires de brevets qui se tournent vers l’étranger pour trouver une solution de rechange choisissent principalement l’Europe, l’Allemagne en particulier. Dans d’autres cas, ils jettent leur dévolu sur le Japon, et même la Chine est dorénavant prise en considération au vu du développement et de l’amélioration de son régime de protection de la propriété intellectuelle (PI).
Le Canada est en outre souvent entrevu comme une solution de remplacement en raison de sa proximité aux États-Unis et de son solide système judiciaire fondé sur la common law. La liste ci-dessous présente les 10 principales différences entre le litige en matière de brevets au Canada et aux États-Unis :
C’est à la Cour fédérale du Canada que la presque totalité des actions en contrefaçon de brevets sont intentées au Canada. Contrairement aux États-Unis où les litiges se déroulent dans diverses cours de district, il est très rare au Canada d’avoir à procéder au « magasinage » d’un tribunal favorable (« forum shopping »). La Cour fédérale est une instance unique pancanadienne possédant des bureaux et des tribunaux dans toutes les grandes villes canadiennes, et dont le siège social a pignon sur rue à Ottawa, la capitale nationale. La Cour fédérale compte de nombreux juges chevronnés en matière de dossiers de contrefaçon de brevets. Les décisions de la Cour fédérale sont susceptibles d’appel de plein droit devant une formation de trois juges de la Cour d’appel fédérale. Les décisions de la Cour d’appel fédérale peuvent quant à elles faire l’objet d’appels devant la Cour suprême du Canada avec l’autorisation de cette dernière. Bien qu’il soit possible d’intenter des actions en contrefaçon de brevets devant des cours provinciales, les juges de ces instances ne possèdent pas d’expérience dans des dossiers de brevets et toute injonction provinciale ne serait pas de portée nationale. À la Cour fédérale, c’est tout le contraire, car elle est à même d’octroyer des injonctions permanentes de portée nationale, et n’est pas soumise aux mêmes contraintes contre l’octroi d’injonctions permanentes comme il en existe aux États-Unis, en raison de la décision eBay. De plus, il n’y a pas d’équivalent de la U.S. International Trade Commission au Canada pour traiter les litiges de brevets liés au commerce.
Au Canada, il n’y a pas de procès devant jury à la Cour fédérale. Toutes les actions en contrefaçon de brevets sont entendues par un seul juge.
La communication des documents est moins détaillée ou approfondie au Canada en comparaison des États-Unis. De plus, les interrogatoires préalables au Canada (appelés dépositions aux États-Unis) ne nécessitent qu’un seul représentant par partie (ce qui s’apparente à la Règle 30(b)(6) relative aux témoins aux États-Unis), et parfois l’(les) inventeur(s) du brevet en litige dans certains cas. Il est très rare que des tiers ou autres témoins factuels soient interrogés/appelés à faire une déposition. De plus, au Canada, les experts ne sont pas tenus de faire une déposition. Leurs rapports d’experts sont plutôt échangés juste avant le début du procès et ils sont contre-interrogés dans le cadre de ce dernier.
Au Canada, il n’existe pas d’équivalent du processus de révision inter partes. Même s’il y a une procédure canadienne de réexamen du brevet après délivrance, elle demeure impopulaire, car sur le plan statistique et procédural (du moins en partie à cause de sa nature ex parte), elle s’avère plus favorable aux titulaires de brevets. Qui plus est, la Cour fédérale suspendra probablement tout réexamen en faveur d’une procédure parallèle en matière de litige de brevets. Cette suspension du réexamen est fondée sur le fait qu’une poursuite complète avec interrogatoire préalable, communication des documents et contre-interrogatoire au procès est perçue comme étant le meilleur moyen d’évaluer la validité d’un brevet.
Le Canada est un pays dit de « perdant payeur ». Il est donc presque automatique qu’un perdant aie à payer les dépens du gagnant, mais jamais 100 % de ceux-ci. En effet, habituellement, la somme à payer est d’environ 20 à 30 % des dépens, en plus des débours raisonnables. De plus, un demandeur qui ne possède pas d’actifs au Canada doit déposer un cautionnement pour dépens. Le montant du cautionnement pour dépens peut varier d’une manière significative selon les circonstances particulières du dossier. Quoi qu’il en soit, on permettra à un demandeur de payer un cautionnement par versements échelonnés. Dans le cas où un demandeur est véritablement impécunieux et ne peut déposer le cautionnement, il peut en être dispensé seulement s’il est à même de démontrer à première vue le bien-fondé de sa cause à la cour.
La restitution des bénéfices d’un contrefacteur est un recours possible, assujetti à des considérations d’équité, comme celle voulant que le demandeur soit irréprochable en se présentant devant la cour. La possibilité d’exercer ce recours au Canada se distingue des États-Unis où l’octroi de dommages-intérêts est seulement disponible dans les cas de contrefaçon de brevets d’utilité. Un recours récent en restitution des bénéfices dans un dossier de contrefaçon a battu tous les records au Canada avec l’octroi de dommages-intérêts de 644 millions $ plus intérêts, la plus haute somme jamais accordée au pays. Pour en savoir plus, cliquez ici (en anglais seulement).
Au Canada, le titulaire de brevets n’est pas tenu de fournir un avis réel ou présumé de contrefaçon pour que les dommages-intérêts-responsabilité s’accumulent. Les dommages-intérêts-responsabilité s’accumulent plutôt dès la publication d’une demande de brevet. À ce titre, un titulaire de brevets peut obtenir une indemnité raisonnable (p. ex. : des redevances raisonnables) pour tous les actes de contrefaçon pendant la période de mise à la disposition du public, et peut choisir soit des dommages-intérêts (p.ex. : des redevances ou le recouvrement de profits perdus) ou la restitution des bénéfices pour tous les actes de contrefaçon ultérieurs à l’octroi du brevet. À l’instar des États-Unis, il existe un délai de prescription de 6 ans pour les actions en contrefaçon de brevets.
In Canada, there is no requirement that a patentee provide actual or constructive notice of infringement in order for damages liability to accrue. Rather, liability may begin accruing the moment a patent application is published. In this regard, a patentee may recover reasonable compensation (i.e., a reasonable royalty) for all laid open period acts of infringement, and may elect either damages (i.e., royalty or lost profits) or an accounting of profits for all post-grant acts of infringement. Like in the United States, there is a 6-year limitation period for patent infringement claims.
Les audiences de type Markman n’existent pas au Canada. C’est le juge du procès qui procède à l’interprétation des revendications au moment du procès ou après ce dernier, de même que de la contrefaçon et de la validité. De plus, contrairement aux États-Unis où les jugements sommaires sont relativement communs, les requêtes en jugement sommaire sont rares au Canada. Cette particularité s’explique par le fait qu’en présence d’opinions d’experts divergentes (comme c’est souvent le cas dans des litiges en matière de brevets), la Cour fédérale préfère envoyer une affaire en procès
Contrairement aux États-Unis où les titulaires de brevets s’exposent à des allégations de conduite inéquitable dans le cadre d’un litige s’ils ne respectent pas leur obligation continue de divulguer l’art antérieur pertinent au United States Patent and Trademark Office (USPTO), au Canada, il n’existe aucun mécanisme d’invalidation d’un brevet fondé sur le défaut de divulguer l’art antérieur pertinent à l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC). De même, les déclarations effectuées et les positions adoptées pendant la poursuite de demande de brevet devant l’OPIC ne peuvent être utilisées à l’encontre d’un titulaire de brevets dans un litige aux fins d’interprétation des revendications (p. ex. : il n’y a pas de dossier estoppel au Canada). Au Canada, l’interprétation de la revendication s’appuie uniquement sur un examen du brevet lui-même du point de vue d’une personne versée dans l’art. Nonobstant tout ce qui précède, lorsqu’un demandeur de brevet fait de fausses déclarations à l’OPIC avec l’intention d’induire en erreur, un brevet délivré peut être invalidé dans le cadre d’un litige.
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