Première décision rendue sur la Loi 96 : la Cour supérieure du Québec suspend deux dispositions de la loi linguistique controversée

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16 août 2022

Le 12 août 2022, la Cour supérieure du Québec a rendu une première décision dans le cadre d'un recours contre la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, communément appelée le projet de loi 96[1] (le « Projet de loi »), qui a apporté des changements importants à la Charte de la langue française du Québec[2].

L'action intentée par les demandeurs conteste la constitutionnalité de deux dispositions du Projet de loi :

  • l'exigence selon laquelle « une traduction en français certifiée par un traducteur agréé doit être jointe à tout acte de procédure rédigé en anglais émanant d'une personne morale », le tout aux frais de la personne morale en question[3];
  • la disposition selon laquelle un acte de procédure qui contrevient à l'exigence ci-dessus ne peut être déposé au greffe d'un tribunal ou au secrétariat d'un organisme de l'Administration qui exerce une fonction juridictionnelle[4].

Ces dispositions devaient entrer en vigueur le 1er septembre 2022. Dans sa décision, la Cour supérieure a toutefois suspendu leur entrée en vigueur jusqu'à ce que l'affaire soit entendue sur le fond, ce qui pourrait avoir lieu dès novembre 2022. 

En plus de l'argument constitutionnel, les demandeurs allèguent que les dispositions en cause entraveront l'accès aux tribunaux pour les entreprises dont les représentants sont anglophones et que les coûts et délais supplémentaires pour obtenir une traduction certifiée créeront un obstacle à la justice. Ils font également valoir que ces dispositions pourraient causer d'importants obstacles dans le contexte de procédures urgentes.

La Cour a accepté ces arguments et a conclu que les demandeurs s'étaient acquitté de leur fardeau de la preuve pour obtenir un sursis. Celle-ci a donc suspendu l'application des dispositions en cause jusqu'à ce qu'une décision finale soit rendue sur le fond, nonobstant appel.

Le sursis ordonné n'a toutefois aucune incidence sur les autres dispositions de la Loi qui entreront en vigueur dans les délais prévus.

Il convient de mentionner qu'un autre recours, déposé par la Commission scolaire English-Montréal, affirme que le projet de loi 96 empiète sur le droit des Québécois anglophones à la gestion et au contrôle de l'instruction dans la langue de la minorité garanti par la Charte canadienne des droits et libertés.

Gowling WLG suit de près les contestations en cours au projet de loi 96 et fera des comptes-rendus de tous les développements en la matière.


[1] Loi 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, 2e session, 42e législature, Québec, (sanctionnée le 1er juin 2022), LQ 2022 (le « Projet de loi 96 »).

[2] Charte de la langue française, RLRQ c C-11 (la « Charte »).

[3]  Projet de loi 96, article 5, modifiant l'article 9 de la Charte.

[4]  Projet de loi 96, article 119, introduisant l'article 208.6 de la Charte.


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