Procès sommaire aux termes du Règlement sur les médicaments brevetés (Avis de conformité) : le brevet INVEGA SUSTENNA de Janssen jugé contrefait

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24 janvier 2022

Depuis 2019, la Cour a vu plusieurs requêtes en jugement sommaire ou en procès sommaire dans le cadre d'actions en contrefaçon de brevet. La décision récemment rendue par le juge Manson dans l'affaire Janssen c. Pharmascience, 2022 FC 62 (en anglais seulement) s'inscrit dans le même courant. Toutefois, cette nouvelle décision se distingue par le fait qu'il s'agit de la première décision de procès sommaire sur la contrefaçon dans une affaire pharmaceutique en vertu du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité).

Dans l'action sous-jacente, Janssen allègue la contrefaçon du brevet canadien no 2 655 335 (le « brevet 335 ») contre Pharmascience. Le brevet 335 porte sur les schémas posologiques de formulations injectables de palmitate de palipéridone à action prolongée pour le traitement de la schizophrénie et des troubles connexes. Le brevet 335 est inscrit au registre des brevets relativement au produit INVEGA SUSTENNA® de Janssen.

Cette décision découle de la requête de Pharmascience pour un procès sommaire portant sur la non-contrefaçon. Pharmascience n'a pas obtenu gain de cause dans le cadre de la requête puisque le juge Manson a conclu que Pharmascience commet effectivement une contrefaçon par incitation.

Bien que Janssen ait finalement eu gain de cause lors du procès sommaire, elle avait contesté le format du procès sommaire, évoquant notamment un appel en instance dans une affaire concernant le même brevet (Janssen c. Teva, 2020 CF 593, dont il est question ci-dessous), des témoignages d'experts contradictoires et la remise en cause de la crédibilité desdits experts, ainsi qu'un préjudice présumé dû à un interrogatoire préalable incomplet (bien que certains interrogatoires préalables aient été effectués). Non convaincu par ces arguments, le juge Manson a conclu qu'un procès sommaire était approprié puisqu'il y avait suffisamment de preuves pour rendre un jugement et que toute question de crédibilité ou de preuve contradictoire pouvait être déterminée à partir du dossier écrit.

Le juge Manson s'est ensuite penché sur une question non résolue de la jurisprudence, à savoir à qui incombe le fardeau du bien-fondé de la ou des questions soulevées dans une requête pour procès sommaire? Par exemple, si un contrefacteur accusé présente une requête en jugement sommaire, est-ce à lui que revient le fardeau d'établir l'absence de contrefaçon? Ou est-ce que le fardeau habituel s'applique, lequel incombe au breveté?

Après avoir examiné la jurisprudence, le juge Manson a conclu qu'il incombe à la partie requérante de démontrer qu'un procès sommaire est approprié. Si la Cour juge que le procès sommaire est approprié, le fardeau de la preuve s'applique alors aux questions sous-jacentes de la façon habituelle. Dans le cas de cette motion, Pharmascience avait le fardeau de démontrer que le procès sommaire était approprié (et l'a fait avec succès). Le fardeau est ensuite passé à Janssen, qui devait prouver la contrefaçon selon la prépondérance des probabilités.

Dans le contexte de cette discussion, le juge Manson a réitéré l'obligation pour les parties de « présenter leurs meilleurs arguments » lorsqu'elles déposent une requête en vue d'une décision sommaire. La preuve et les arguments relatifs à l'affaire faisant l'objet d'une requête en jugement sommaire ne doivent pas être conservés pour plus tard.

L'analyse substantielle de la contrefaçon par incitation par le juge Manson s'avère également intéressante pour l'industrie pharmaceutique. Janssen n'a plaidé que la contrefaçon par incitation. Bien que la décision soit fortement expurgée, le juge Manson semble avoir conclu à la contrefaçon par incitation en se fondant largement, voire exclusivement, sur la monographie de produit proposée par Pharmascience.

Une déclaration de contrefaçon a donc été émise. L'action de Janssen ne portera plus que sur les défenses d'allégation d'invalidité.

Tel que susmentionné, ce n'est pas la première fois que Janssen revendique le brevet 335 en vertu du Règlement, ni la première fois que le juge Manson entend des arguments de contrefaçon relativement à ce brevet. Dans l'affaire Janssen c. Teva, 2020 CF 593, le juge Manson a conclu que le produit palmitate de palipéridone proposé par Teva constituerait une contrefaçon directe, mais non une contrefaçon par incitation, du brevet 335. Cette décision fait l'objet d'un appel. Il ressort que l'expérience passée de la Cour en ce qui concerne le brevet 335 a vraisemblablement contribué à simplifier cette requête en procès sommaire.

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