Le 26 juin 2024, le gouvernement du Québec a publié la version finale tant attendue du Règlement modifiant principalement le Règlement sur la langue du commerce et des affaires (le « Règlement final »). Malgré l'espoir de certains de voir l'entrée en vigueur reportée, le Règlement final est prévu entrer en vigueur le 1er juin 2025 (à l'exception du nouvel article 27.3 sur les contrats d'adhésion, qui entrera en vigueur le 11 juillet 2024, soit 15 jours après la publication du Règlement final).

À titre de référence, veuillez consulter notre version annotée du Règlement sur la langue du commerce et des affaires, modifié en conformité avec le Règlement final.

Si la grande majorité des modifications proposées dans le projet de règlement publié en janvier dernier ont été conservées dans le Règlement final, il reste toutefois quelques points importants à souligner.

Prolongation du délai de grâce de deux ans pour tenir compte des nouvelles lois fédérales sur l'étiquetage

En plus de maintenir le délai de grâce de deux ans accordé aux produits fabriqués avant le 1er juin 2025 qui ne sont pas conformes à l'article 51.1 de la Charte (dans la mesure où aucune version française de la marque de commerce « reconnue » au sens de la Loi sur les marques de commerce n'a été enregistrée en date du 26 juin 2024), le Règlement final prolonge aussi ce délai de grâce pour :

  • Les produits fabriqués entre le 1er juin et le 31 décembre 2025 qui sont visés par les nouvelles normes d'étiquetage prévues par le Règlement modifiant le Règlement sur les aliments et drogues (symboles nutritionnels, autres dispositions en matière d'étiquetage, vitamine D et graisses ou huiles hydrogénées) ou le Règlement modifiant le Règlement sur les aliments et drogues et le Règlement sur le cannabis.

Pour en savoir plus sur la nouvelle réglementation fédérale en matière d'étiquetage, cliquez ici (article en anglais).

Retrait de l'exception proposée pour les marques de commerce « en cours d'enregistrement »; réintroduction du concept de marque « reconnue »

Dans la version initiale du Règlement, on proposait d'élargir le champ d'application de l'exception visant les marques de commerce « déposée » en ce qui concerne l'emballage et l'étiquetage des produits afin d'inclure les marques de commerce « en cours d'enregistrement » auprès de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada. La version finale du Règlement ne prévoit aucune exception pour les demandes en cours.

En revanche, le Règlement final a réintroduit la notion de marque de commerce « reconnue » aux termes de la Loi sur les marques de commerce pour laquelle aucune version française correspondante n'a été déposée. Une certaine incertitude plane depuis longtemps quant à la façon de déterminer ce qui constitue une marque de commerce « reconnue » en vertu du Règlement. Les tribunaux ont interprété cette exception comme s'appliquant aux marques déposées et non déposées protégées par la Loi sur les marques de commerce (loi fédérale). D'autre part, l'Office québécois de la langue française (OQLF) a toujours soutenu que pour qu'une marque de commerce bénéficie de l'exception de « marque de commerce reconnue », celle-ci doit être enregistrée.

Cela dit, la nouvelle décision de réintroduire le concept de marque de commerce « reconnue » dans le Règlement final semble indiquer une volonté d'exempter également les marques de common law non déposées.

Redéfinition des paramètres de l'expression « un générique ou un descriptif du produit » pour l'emballage et les étiquettes de produits

En prévoyant que :

  • Le « nom de l'entreprise et le nom du produit tel que commercialisé » sont exclus des définitions de « descriptif » et de « générique ».
  • Les « appellations d'origine et les noms distinctifs à caractère culturel » sont également exclus de la portée des notions de « descriptif » et de « générique » en vertu du projet de loi 96 (le « PL 96 »).

Par conséquent, en ce qui concerne l'emballage et l'étiquetage des produits :

  • Un « descriptif » réfère à un ou plusieurs mots décrivant les « caractéristiques » d'un produit, à l'exception du « nom de l'entreprise et du nom du produit tel que commercialisé » et des « appellations d'origine et noms distinctifs à caractère culturel ».
  • Un « générique » réfère à un ou plusieurs mots décrivant la « nature d'un produit », à l'exception du « nom de l'entreprise et du nom du produit tel que commercialisé » et des « appellations d'origine et noms distinctifs à caractère culturel ».

Redéfinition des paramètres de l'expression « un générique ou un descriptif du produit » pour l'affichage public et la publicité commerciale

En prévoyant que :

  • Un « descriptif » réfère à un ou plusieurs mots décrivant les « caractéristiques des produits ou des services visés ».
  • Un « générique » réfère à un ou plusieurs mots décrivant « la nature des produits ou services visés ».

Nous constatons que les définitions susmentionnées pour l'affichage public et la publicité commerciale n'ont plus la même signification que celles pour l'emballage et l'étiquetage des produits.

En effet, les exclusions relatives au « nom de l'entreprise et au nom du produit tel que commercialisé » et des « appellations d'origine et noms distinctifs à caractère culturel » dans la définition de « descriptif » et de « générique » pour l'emballage et l'étiquetage des produits n'ont pas été transposées aux définitions des mêmes termes dans le contexte de l'affichage public ou de la publicité commerciale.

Abrogation de la modification proposée à l'exemption pour les inscriptions « en relief » sur les produits (pour l'instant)

Est notamment absente du Règlement final la modification proposée concernant l'exemption de traduction pour les inscriptions gravée[s], cuite[s] ou incrustée[s] dans le produit lui-même, [qui] y [sont] rivetée[s] ou soudée[s], ou encore [qui] y [figurent] en relief, de façon permanente, laquelle devait être considérablement restreinte par l'exigence de traduction des inscriptions sur un produit qui sont « nécessaire[s] à l'utilisation du produit ». 

La modification proposée concernant l'exception pour les inscriptions « en relief » sera abordée lors d'une modification distincte. Le ministre de la langue française a fait part aux médias que des consultations sont en cours et qu'il étudie la meilleure approche pour mettre en œuvre la nouvelle exigence proposée. Un règlement distinct sur cette question suivra.

Espace réservé au texte français sur l'affichage visible depuis l'extérieur : au moins deux fois plus grand que les autres langues

En vertu du Règlement final, le seuil de « nette prédominance » est atteint lorsque « le texte rédigé en français a un impact visuel beaucoup plus important que le texte rédigé dans une autre langue ». Le Règlement précise par ailleurs que l'impact visuel du texte rédigé en français est beaucoup plus important si les conditions suivantes sont réunies dans le même champ visuel :

  • L'« espace consacré au texte rédigé en français est au moins deux fois plus grand que celui consacré au texte rédigé dans une autre langue ».
  • La lisibilité et la visibilité permanente du texte français sont équivalentes à celles du texte dans une autre langue.

En ce qui concerne l'« affichage dynamique » où le texte anglais et le texte français sont affichés en alternance (comme sur les écrans numériques), le texte rédigé en français doit être « visible au moins deux fois plus longtemps que celui rédigé dans une autre langue » afin de donner au français un impact visuel beaucoup plus important.

Prochaines étapes

Nous nous attendons à ce que l'OQLF publie d'autres documents d'orientation dans les prochaines semaines.

Gowling WLG suit l'évolution du PL 96 (y compris toute contestation constitutionnelle ou juridique potentielle). Nous vous fournirons des mises à jour à ce sujet dès qu'elles seront disponibles.

Compte tenu des importantes répercussions du projet de loi sur les entreprises exerçant leurs activités au Québec, nous vous recommandons de consulter votre conseiller en marques de commerce ainsi qu'en publicité, marketing et réglementation des produits chez Gowling WLG pour discuter des mesures concrètes à prendre afin de réduire les risques et d'assurer votre conformité à la loi.