Delphine Robert :
Mesdames et Messieurs, bonjour. Pour ceux qui viennent de se joindre à nous, merci d’avoir accepté notre invitation en si grand nombre. Je vous souhaite la bienvenue à l’Atelier légal, un rendez-vous proposé par Gowling WLG et ACC Québec.
Il est présentement 9 h 03, alors nous allons commencer sans plus attendre. Mon nom est Delphine Robert, je suis la directrice, Marketing et développement des affaires, chez Gowling WLG à Montréal et je serai votre maîtresse de cérémonie virtuelle pour la matinée.
L’Atelier légal, c’est un nouveau rendez-vous que nous avons développé conjointement avec ACC Québec et dont l’objectif principal est de se pencher sur la dernière tendance affectant la pratique juridique et plus particulièrement pour vous, conseillers juridiques en entreprise.
Pour la petite histoire, évidemment, cet événement devait se tenir en personne au mois d’avril dernier et vous savez ce qui est arrivé, ce qui nous a évidemment retardés dans nos plans, mais qui nous a aussi permis de changer la programmation et de nous concentrer aujourd’hui sur la pratique juridique à distance, une tendance qui s’est imposée en force et très rapidement, mais qui devrait vraisemblablement perdurer quoi qu’il arrive.
Nous allons aussi parler aujourd’hui de créativité, une qualité dont tout le monde sans exception a dû faire preuve ces derniers mois pour s’ajuster à une situation qui est encore constamment en mouvement.
Alors, le webinaire aujourd’hui sera divisé en trois parties. Nous allons débuter avec des conférences express portant sur la pratique juridique en mode virtuel. La deuxième partie se veut interactive, puisque malheureusement nous n’avons pas la chance de nous voir en personne. Nous voulions quand même favoriser les discussions et les échanges entre vous. Alors, on aura cet atelier collaboratif. Finalement, pour terminer, nous aurons la chance d’avoir un invité vraiment particulier et spécial. Nous aurons une présentation sur comment cultiver sa créativité, par Philippe Meunier, qui est chef de la création et cofondateur de l’agence publicitaire Sid Lee, une agence bien connue à Montréal, au Canada et à travers le monde.
Une période de questions sera prévue à la fin des conférences express et sera suivie d’une pause de 10 minutes. Donc, ça, c’est la première partie du webinaire. Une deuxième période de questions sera prévue à la toute fin de l’événement.
Avant de débuter, je dois partager quelques informations pratiques. Tout d’abord, merci de laisser vos micros et caméras fermés pendant les présentations. Lorsque nous passerons aux ateliers collaboratifs, nous vous encourageons à ouvrir caméras et micros pour échanger avec vos pairs. Pour ceux et celles qui ne voudraient pas participer aux ateliers collaboratifs, sachez que ces ateliers vont durer à peu près 25 minutes. Nous vous inviterons à revenir avec nous vers 10 h 25 pour la présentation de Philippe Meunier.
Une attestation de participation à cette activité vous sera également envoyée par courriel dans les prochains jours. Finalement, si vous éprouvez le moindre souci technique, normalement non, mais ça peut arriver dans les circonstances actuelles, je vous invite à communiquer directement avec Julie‑Han Angers, qui sera là pour vous assister et dont l’adresse devrait apparaître à l’écran tout de suite. Non. Bon. Vous pouvez également rejoindre à Julie Han par le moyen de chat de Zoom. Vous avez cette option qui est au bas de votre écran.
Comme je le mentionnais précédemment, cet événement vous est présenté en partenariat avec ACC Québec. Voilà l’adresse de Julie Han. Nous avons eu le plaisir de travailler avec l’équipe de l’ACC Québec depuis plusieurs mois sur cet événement. J’aimerais céder la parole à Mylène Lemieux, qui est membre du conseil d’administration de l’ACC Québec. Mylène, c’est à toi.
Mylène Lemieux :
<04:03> Merci, Delphine. Bonjour, tout le monde. Merci d’être parmi nous ce matin. Je me présente, Mylène Lemieux. Comme le disait Delphine, je suis membre du conseil d’administration de l’ACC Québec et conseillère juridique chez Cisco. J’aimerais également vous présenter mon collaborateur pour l’organisation de cet événement, Me Christian Khoury, qui est également membre du CA de l’ACC Québec et directeur des Affaires juridiques, éthique et conformité chez Nutreco.
L’Association des conseillers juridiques d’entreprises (ACC), c’est un organisme international qui veille à la promotion de vos intérêts professionnels et d’affaires à titre de conseillers juridiques d’entreprises. On organise des programmes de formation, de réseautage et de représentation. Les différentes sections de notre réseau ACC regroupent mondialement 75 pays, 42 000 membres qui travaillent dans près de 10 000 organisations. La section ACC Québec a été fondée en 2008 et elle est maintenant composée de plus de 300 conseillers juridiques internes, qui sont issus de la plupart des secteurs d’activité économiques du Québec.
Certains avantages. Si vous vous questionnez sur les avantages d’être membre de l’ACC, vous avez accès à la formation continue, une bibliothèque de documents légaux, donc des modèles de politique, de doctrine, contrats, une banque d’emplois pour les conseillers juridiques d’entreprises, des événements de réseautage, des événements exclusifs aux conseillers juridiques d’entreprises, un programme de mentorat, et j’en passe. On vous invite donc à nous suivre sur les médias sociaux, sur Twitter @accquebec et sur LinkedIn ACC Québec. Nous sommes d’ailleurs en période de recrutement pour le nouveau conseil d’administration de l’ACC. Donc, on vous invite à nous contacter si vous êtes intéressés à vous impliquer.
On remercie grandement notre partenaire pour l’organisation de cet événement, Gowling WLG, et on vous souhaite une bonne première édition de l’Atelier légal Gowling WLG/ACC Québec. Merci beaucoup, Delphine.
Delphine Robert :
<06:03> Merci beaucoup, Mylène. Excusez-moi. Nous sommes maintenant prêts à débuter les présentations. Pour ouvrir le bal, j’ai le plaisir de vous présenter Me Alexandre Forest, qui va vous parler ce matin du secret professionnel de l’avocat, mais en mode télétravail.
Me Forest est associé à notre bureau de Montréal où il pratique au sein de notre groupe de réorganisation Faillite et insolvabilité et Litige commercial. Il œuvre plus particulièrement en matière de droit immobilier, de construction et en louage commercial. Mais vous le connaissez peut-être en tant que bâtonnier du Barreau de Montréal en 2019 et 2020. Sur ce, Alexandre, je te cède la parole.
Alexandre Forest :
<06:43> Merci beaucoup, Delphine. Je vais assumer que tout le monde m’entend bien. Merci beaucoup pour l’opportunité. C’est particulier, donc en ce moment je discours devant la fenêtre, donc devant le pont Champlain. C’est particulier. Donc, ce sera très intéressant.
Je vais tenter, évidemment, de faire vite. Le sujet dans le secret professionnel est évidemment au cœur de notre profession. Je ne vais pas vouloir faire le tour des 10-15 minutes qui me sont octroyées. Je vais toutefois quand même au départ parler du concept de base, des fois qu’on oublie du secret professionnel, pour ensuite aller un petit peu plus dans le détail. Tout en passant, j’irais faire un crochet un peu à l’international pour vous dire que l’aspect de l’avocat en entreprise ou du juriste en entreprise concernant son secret professionnel est grandement différent, que l’on soit au Québec ou en France, par exemple.
Tout d’abord, première diapositive. Qu’est-ce que le secret professionnel? Secret professionnel, évidemment, trois critères de base. Tout d’abord, communication avocat-client. Critère, somme tout, assez objectif. Par communication, on peut entendre évidemment verbale, écrite, donc courriel également, qui comporte une consultation ou un avis juridique. Dans ce cas-ci, on doit évidemment avoir cet aspect-là où la nature professionnelle du conseil était impliquée dans la discussion, encore une fois qu’elle soit verbale ou écrite. Et finalement le dernier critère qui est le plus objectif, qui est donc de nature confidentielle, à savoir que les parties entre elles considéraient également que la conversation se tenait sous le sceau du secret professionnel.
Comme vous pouvez vous en douter, c’est la plupart du temps les deux derniers critères, je dirais, qui sont les plus débattus de manière jurisprudentielle, en ce sens que parfois certains échanges vont être considérés en fait comme des échanges d’affaires particulièrement dans le cadre d’un avocat en entreprise. Donc, des discussions qui sont stratégiques et non de type juridique. C’est surtout à ce moment-là qu’il peut y avoir un débat dans le cadre de la jurisprudence, à savoir est-ce que oui ou non il s’agit ici d’une consultation d’un avis juridique ou plutôt d’un échange sur l’entreprise et sur la stratégie que l’entreprise doit adopter.
La nature confidentielle, même chose. Elle se passe moins dans le cadre de l’entreprise quoiqu'encore une fois, tout dépendamment de la nature de la discussion, il peut y avoir certaines variances quant à l’attente de confidentialité. On parle souvent de ça, en fait, le dernier critère. C’était peut-être l’exemple le plus classique de discussion de bar entre amis, où on vient dire qu’entre deux personnes on a une discussion, on parle d’un problème juridique, on a certains conseils qui sont donnés, mais est-ce que c’était vraiment de nature confidentielle compte tenu du cadre de la discussion, compte tenu des éléments qui étaient autour et de la nature de l’information qui a été donnée? C’est souvent ce qu’on utilisait à l’école du Barreau comme exemple, en ce sens que c’est là où le débat : y avait-il une attente de la part de la personne concernant la confidentialité, la nature confidentielle de la discussion, de un? De deux, s’agissait-il d’un client? Donc, c’est souvent ces questions-là qui sont posées.
Si on passe à la prochaine diapositive, je ne veux évidemment pas aller dans le trop légaliste, on a vraiment une pléthore d’articles ici qui définissent un peu le secret, la nature des renseignements confidentiels et la protection des renseignements confidentiels. Je voudrais surtout, en fait, utiliser cette diapositive pour faire un crochet un peu à l’international et parler un peu de la France, en ce sens que vous avez peut-être des interactions avec vos collègues français qui sont également juristes en entreprise et non pas avocats en entreprise. Et c’est très particulier.
Donc, du côté des Barreaux français, un avocat qui va transférer de la pratique privée vers une entreprise ne va pas conserver son titre d’avocat. Il va plutôt devenir le juriste en entreprise et cela cause beaucoup de problématiques, car il n’a pas les mêmes obligations de confidentialité par rapport à un véritable avocat en entreprise, comme on connaît la notion au Québec. Lorsque l’on arrive, par exemple, en France ou en général lorsqu’on rencontre différents collègues de France, ils sont particulièrement surpris de voir que le secret professionnel, nous, est conservé. C’est d’ailleurs un point de vente souvent des avocats en pratique privée français de venir dire : vous allez protéger dès que vous avez une problématique, entrer un avocat externe dans le cadre des discussions pour les protéger, parce que votre avocat, votre juriste à l’interne, lui, ne pourra pas protéger ce secret professionnel. Et on voit aussi loin que, par exemple, permettre la divulgation d’avis juridiques à l’interne qui ont été rédigés par le juriste en entreprise par rapport à, évidemment pour nous, un avis très clair où on va souvent même mettre la version confidentielle « secret professionnel », donc privilégié, on ne peut aucunement l’obtenir, versus l’aspect français où c’est plutôt le contraire. Donc, je voulais simplement peut-être faire un petit lien à ce propos-là. Si vous avez des collègues ou si vous discutez avec des avocats qui sont des fois à l’extérieur du Québec, toujours avoir en tête que leur notion de Secret professionnel n’est pas la même, tout dépendamment du lieu où ils se trouvent.
Maintenant, si on passe à la prochaine diapositive, la protection en tant que tel des documents. C’est ici où on rentre un peu en cette ère pandémique. Le défi d’aller protéger de la même manière comme on était au bureau pour les mêmes secrets qu’on devait protéger lorsqu’on le faisait, lorsqu’on était directement au sein de son employeur. Évidemment, pour un avocat en entreprise, le seul client est l’employeur. C’est vraiment le secret professionnel, c’est son secret professionnel, c’est lui qui détient ce secret professionnel. L’avocat, lui, a la responsabilité de protéger ces informations qui sont privilégiées.
Je faisais une petite liste qui n’est pas évidemment pas exhaustive ici, qui parle de qu’est-ce que l’on doit protéger, qu’est-ce qui est de nature confidentielle. On parle des différents échanges, comme je le mentionnais, que ce soit courriel ou autre, conversation téléphonique, correspondance et les rapports ou opinions qui vont être remis à l’avocat, à son client, donc à l’employeur.
Très important, dans ce cas-ci, assurer la protection à l’extérieur, on a toujours évidemment les protections classiques en ce sens que, évidemment, ne pas laisser son ordinateur n’importe où, toujours avoir un contrôle sur l’ordinateur, avoir des méthodes de protection adéquates. Si on parle, que ce soit de l’information confidentielle ou non, je vous dirais que c’est des conseils qui sont bons à donner à toute personne qui fait du télétravail.
Pour aller un peu plus loin dans le cadre des rapports remis ou dans des relations de nature juridique, très important, le plus possible lorsque l’on sait déjà qu’on a des informations qui vont être confidentielles ou qui vont être de nature d’un conseil juridique, lorsque l’on a des correspondances, l’écrire le plus possible en début de courriel. Le fameux « confidentiel » ou le fameux privilège avocat-client « Protégé par le privilège avocat-client ». Parfois on l’oublie, parce que c’est évident, par exemple lorsqu’on a une discussion directement avec l’employeur ou avec la personne à qui on envoie le courriel. La problématique, c’est que parfois ce même courriel ou cette même opinion pourrait circuler, et lorsqu’on n’a pas mis très clairement son caractère privilégié, parfois on peut avoir une problématique lorsque viendra le temps si un jour on se rend jusqu’à litige pour la protection. La cour, je vous dirais, est quand même assez stricte. Donc, la plupart des décisions vont dans le sens que même si une opinion juridique qui a été partagée au-delà du destinataire, elle reste confidentielle et protégée par le secret professionnel. Mais, quand même, les bonnes méthodes voudraient que le plus possible, lorsqu’on a vraiment une opinion en bonne et due forme, lorsque c’est très clair, on va le mettre. Et je vous dirais pour pousser encore plus loin, le plus possible en général, lorsque les informations sensibles où on sent que notre aspect professionnel ou le conseil professionnel est donné dans le cadre d’une communication, le mettre, l’aspect, que c’est confidentiel.
Un peu plus loin, prochaine diapo, je parle un peu d’un devoir qui est moins strict, mais qui est l’aspect de la discrétion. L’avocat doit être discret. C’est dans sa nature même. L’aspect de ne pas discuter de dossiers, ne pas discuter même de portions de dossiers ou généralement ne pas évoquer les dossiers d’aucune manière, c’est un given, comme on dit. Donc, c’est la première chose qu’on nous apprend. Le fameux exemple de discuter dans un ascenseur. On parle ici, par exemple, à Place Ville-Marie, où on pourrait avoir un collègue d’un autre bureau qui entend, ne serait-ce qu’une bribe d’un dossier. Le simple fait des fois d’évoquer un dossier peut faire en sorte de briser le secret professionnel et surtout l’aspect du privilège avocat-client, le devoir de discrétion.
Je pense aussi maintenant en télétravail. Je vous dirais, la première problématique, c’est un peu difficile à dire parce que je veux parler des contrats conjoints. Évidemment, les conjoints/conjointes ne sont pas problématiques en eux-mêmes. Mais le fait de travailler avec un conjoint, une conjointe rend ce facteur de protection des renseignements confidentiels un peu plus difficile. J’aime bien ici faire la blague, parce qu’on n’utilise presque jamais le fait que pour les couples mariés le conjoint ou la conjointe n’est pas contraignable en cour. C’est quand même particulier dans le fond de le mentionner. C’est très drôle, j’ai fait de la petite recherche sur les conjoints de fait. Vous êtes contraignables. Sachez que c’est Lola contre Éric encore, pour le secret professionnel.
Bref, ce qui est important, c’est évidemment, blague à part, la protection des renseignements de son conjoint puis sa conjointe. Évidemment, les confidences de l’oreiller, on parle toujours de la journée de travail, c’est difficile. Sauf que là ici on a vraiment l’ordinateur souvent qui est parfois dans une pièce centrale lorsque les bureaux n’ont pas été, par exemple, aménagés ou qu’on a vraiment un(e) conjoint(e) qui va passer dans la salle ou qui pourrait entendre des conversations. Donc, évidemment, le plus possible, et c’est toujours les conseils qui sont donnés tenter de vous isoler le plus possible dans une pièce séparée pour vous permettre de garder des informations confidentielles seulement entre vous et votre client. C’est sûr que lorsque ce n’est pas toujours possible, par exemple, deux pièces d’isoler, essayez de potentiellement soit trouver des manières de faire des appels téléphoniques de façon plus isolée, donc de vous déplacer. On donnait parfois l’exemple d’aller dans la toilette pour faire votre appel. Mais quand même c’est dans des situations plus extrêmes, évidemment. Le but, c’est de toujours garder cette discrétion entre le client et vous pour les courriels. Le but, honnêtement, c’est de simplement être sensible à la particularité qu’il y a une autre personne qui peut passer. Lorsqu’on quitte son poste, juste généralement fermer, donc clapper l’ordinateur portable, avoir des petits gestes de protection quotidiens comme ça. On ne pense pas qu’il y a quelqu’un qui veut foncièrement regarder les courriels, mais parfois même quand on travaille, évidemment c’est encore pire lorsqu’on travaille à l’extérieur, des fois on se place d’une manière où quelqu’un derrière pourrait voir ce que l’on tape, voir des bribes, des portions de dossier, comprendre qu’on travaille sur quelque chose. Dans ce temps-là, le but c’est de garder le plus possible aucune personne qui puisse voir les informations que l’on rédige, que l’on date.
Pour la prochaine diapositive, j’ai fait les deux en une, si on le mentionne. On parlait de protéger. C’est cette confidentialité autant les échanges que des documents. Je donnais les deux exemples, comme je le mentionnais, soit les appels téléphoniques et les aménagements qui sont requis. Dans un cadre comme celui-là, je pense même qu’on peut passer à la prochaine diapositive directement, ça va aller plus vite. Un peu comme je le mentionnais, l’importance, le mot clé ici, c’est vraiment l’aspect restreint. Il faut toujours penser, essayer de recréer le plus possible la confidentialité que l’on a déjà au bureau, donc au travail directement qu’on va le faire à la maison. C’est vraiment penser la même chose. Quand on a des aspects, par exemple, lorsqu’on a un bureau fermé au bureau mais pas à la maison, c’est de penser à cette différence et de trouver des manières de palier à cette différence. Donc, je le mentionnais, parce que verrouiller le poste, juste clapper l’ordinateur, prendre ces réflexes-là comme si systématiquement quand on quittait le poste, quelqu’un pouvait venir directement devant, parce qu’il y a accès. C’est des fois un peu du zèle, mais ce temps-là on est sûr de ne pas se tromper lorsque l’on fait ce type de protection, lorsqu’on a toujours en pensée l’aspect de la protection des renseignements. Comme je le mentionnais, des fois qu’on oublie, c’est même pendant le travail, lorsqu’on est à l’extérieur, de toujours s’assurer de prendre un bon angle pour ne pas avoir, évidemment également, personne qui puisse regarder par-dessus notre épaule pour voir ce que l’on fait. Il faut être vraiment, dans le fond, trouver notre nature plus suspicieuse et toujours être à l’affût de tout ce qui pourrait arriver dans le cadre de notre travail et surtout dans le cadre des informations que l’on partage.
Je crois que je suis dans mon temps. Je pense que j’ai fait mes 10 minutes. Je n’ai pas volé de temps à personne. Je resterai disponible s’il y a des questions pour la suite. Merci beaucoup à tous.
Delphine Robert :
<20:16> Merci beaucoup, Alexandre. Très intéressant. Nous allons maintenant continuer avec Benoît Yelle. Benoît est associé et agent de brevet au bureau de Montréal. Il va vous parler d’une autre forme de secret cette fois, le secret commercial, qui est évidemment un actif extrêmement important pour toutes les entreprises, et comment on protège ces actifs en mode télétravail.
Benoît est donc agent de brevet agréé au Canada et aux États-Unis, avec une formation en génie informatique. Il fait partie de notre groupe de propriété intellectuelle à Montréal. Il est également le cochef de notre groupe Technologie, à Montréal. Sa pratique se concentre sur la rédaction et la poursuite des demandes de brevets et de demandes de dessins industriels. Son expertise technique développée au fil des années s’étend des inventions mécaniques aux technologies quantiques, en passant par les outils manuels, les appareils médicaux, les protocoles réseaux, les télécommunications les applications mobiles et l’informatique quantique. Donc, évidemment, il en sait beaucoup plus que moi. Je vais tout de suite lui céder la parole. À toi, Benoît.
- Delphine : Benoit, tu es en mode « mute ». Benoît, est-ce que tu nous entends? On a perdu le son.
- Voix masculine : Peux-tu aller chercher Sébastien?
- Delphine : C’est bon.
- Voix masculine : Ça fonctionne? OK, c’est bon.
- Delphine : Oui. Parfait.
Benoît Yelle :
<21:47> C’était un problème avec Zoom. Je suis désolé. Oui, donc, bien, merci de l’opportunité.
On peut déjà passer à la première diapositive. Ce que je voulais faire avec vous un peu ce matin, c’est tout d’abord passer quelques secondes sur la propriété intellectuelle 101, parler des différentes formes de protection propriété intellectuelle qui peuvent être applicables en entreprise, puis de voir de quelle façon la protection peut être affectée par le fait qu’on travaille tous différemment depuis déjà plusieurs mois. Ce qu’il faut dire de la propriété intellectuelle comme d’autres formes de protection qu’on va aller chercher activement ou qui vont être données automatiquement à une entreprise, c’est que ça reste un outil d’affaires, un outil business, puis c’est sous cet angle que, nous, on tente de protéger avec nos clients la propriété intellectuelle des entreprises. Donc, l’objectif quand on travaille que ce soit à la maison ou ailleurs, c’est d’aller maximiser la protection de ce qui est disponible comme propriété intellectuelle. Il y a plusieurs aspects différents quand on va développer un produit ou un service. Il y a plusieurs aspects différents qui se passent en même temps et qui peuvent donner lieu à différentes formes de protection.
J’ai numérisé trois principales choses qu’on voit. C’est soit l’aspect visuel, le look d’un produit ou d’un service. Quand on parle d’un service, on va parler par exemple d’une interface usager pour un logiciel ou d’un aspect davantage ergonomique, par exemple. On va parfois avoir des choix de design qui vont avoir été faits dans nos interfaces, qui peuvent être protégés par du dessin industriel. Sinon, quand c’est un produit physique, la forme telle quelle du produit peut être protégée. Quand on parle de dessin industriel, industrial design, aux États-Unis de design patents, qu’on va vraiment cibler, c’est les caractéristiques d’un produit qui sont attrayantes pour l’œil. Dès qu’on cible quelque chose qui est attrayant pour l’œil, on va parler de design. Quand on développe un produit, on veut le vendre, on veut s’assurer qu’on peut le différencier de nos compétiteurs souvent par la marque, soit par l’image soit par le nom. La marque de commerce souvent va être centrale à la mise en marché. Il y a aussi la fonction du produit qu’il ne faut pas perdre de vue. La plupart du temps, on a une fonction qui va être essentielle à la vente du produit. Quand on va parler de fonction, on va surtout protéger la fonction soit par une protection par brevet, mais aussi par secret commercial. C’est là où ça va être intéressant de discuter des aspects de la pandémie quand vient le temps de parler de brevets et de secret commercial.
Donc, la fonction d’un produit, si on prend un produit, on peut prendre une compagnie comme Coca-Cola, par exemple, qui est bien connue et ils ont des produits dans toutes les catégories. Le meilleur secret commercial dont on parle sans cesse, c’est la recette du Coca-Cola. Croyez-moi, si la recette du Coca-Cola était publique, le cola dans les épiceries goûterait vraiment meilleur. Clairement, le secret n’a jamais été divulgué sur la recette du Coca-Cola. Quand on regarde la mise en marché de Coca Cola, les bouteilles de Coca Cola qui ont une forme très particulière ont été protégées jadis, naguère, parce que ça fait longtemps qu’ils sont sur le marché, par du design patent aux États-Unis ou de l’industrial design au Canada et la forme de la bouteille a acquis une renommée suffisante pour être protégée par la suite par une marque de commerce. C’est un exemple de produit ou on voit les trois aspects. Les procédés de Coca Cola, je suis à peu près certain qu’ils ont des brevets aussi pour les protéger. On peut passer à la prochaine diapositive.
Quand vient le temps maintenant de parler de secret commercial en tant que tel, le plus grand enjeu, c’est l’aspect du secret. Même si c’est évident qu’il faut garder le secret commercial secret, ce n’est pas toujours facile de le faire. L’enjeu principal, c’est la divulgation publique et surtout parce que dans la jurisprudence le public est défini de façon très, très large. En fait, c’est dès qu’il n’y a pas une obligation de confidentialité entre les parties, on considère que c’est public. Je fais référence à ce qu’Alexandre disait tantôt. Si vous êtes à la maison en train de travailler, votre conjoint ou conjointe, vos enfants sont présents, il y a une présomption que c’est une divulgation publique dès que vous parlez des enjeux technologiques d’une solution. Ça pose des problèmes autant pour le secret commercial que pour le brevet éventuellement ou d’autres formes de protection.
C’est certain que contrairement au secret professionnel dont Alex parlait, il faut que cette divulgation publique, pour qu’elle ait une conséquence, il faut qu’elle puisse être prouvée en cour, ce qui n’est pas nécessairement quelque chose qui est évident à faire, quand c’est dans un contexte personnel que la divulgation peut avoir eu lieu. Sauf qu’on peut penser que ça pose quand même un risque. Puisque mesurer le risque ça fait beaucoup partie du rôle du conseiller juridique, bien, c’est quelque chose qui peut être intéressant de discuter à l’interne chez vous, à savoir est-ce qu’il y a vraiment un risque. De quelle façon est-ce qu’on le mesure? C’est encore une bonne question que vous pourrez poser dans vos organisations.
C’est une obligation de moyens aussi qu’on a quand vient le temps de parler du secret commercial. L’enjeu, c’est d’être capable, s’il y a une fuite ou s’il y a un vol de secret commercial, de pouvoir prouver que ce secret commercial avait une valeur ou était important pour l’entreprise et que la fuite a eu des conséquences ou pourrait avoir des conséquences. Et là on a une obligation de moyens, pas nécessairement une obligation de résultat, ce qui est souvent le cas en droit, mais on a une obligation de moyens dans ce cas-ci, puis il va falloir pouvoir démontrer à la cour qu’on a mis en place les moyens nécessaires pour protéger. Mêmes bonnes pratiques qu’Alex mentionnait en ce qui concerne le fait de verrouiller le poste de travail, le fait de s’assurer que nos documents ne sont pas accessibles ou sont le moins accessibles possible. Moi, ce n’est pas l’exemple des toilettes que j’ai vu, mais j’ai carrément vu dans une conférence quelqu’un donner sa conférence à partir de son auto, parce que c’est un lieu confidentiel fermé, isolé. C’est sûr que ça dépend du modèle de voiture que vous avez. Il y en a qui sont moins étanches au son, alors faites attention quand même. Mais non, bref, il y a des moyens qu’on peut prendre pour assurer la confidentialité et c’est vraiment une obligation de moyens. Si vous n’êtes pas en mesure de montrer que vous avez mis, par exemple, en place des procédures pour s’assurer qu’uniquement les personnes qui doivent avoir accès à vos secrets commerciaux ont accès, que ce soit électronique ou physique. Si vous n’avez pas de politique sur de quelle façon on accède aux secrets commerciaux, ça peut être problématique éventuellement. Tout ça, ce sont les meilleures pratiques dans le marché et vous devrez pouvoir prouver ces choses-là en cours si jamais il y a un litige au sujet d’un bris de confidentialité sur un secret commercial.
Évidemment, même si on est capable de prouver qu’il y a eu un bris de confidentialité sur un secret commercial, ça ne rend pas l’aspect divulgué secret à nouveau. Donc, la perte de l’état de secret va avoir eu lieu quand même. Ça, c’est aussi le danger primordial. Peu importe que vous ayez des recours éventuellement si un secret est divulgué, la pâte à dents est sortie du tube, on ne peut pas la remettre, il est trop tard. Ça fait qu’il faut faire vraiment très attention. On peut passer à la prochaine diapositive.
Je vais aussi vous parler d’un autre enjeu important quand on travaille de la maison. C’est l’aspect d’inventorship, en bon français. Je ne pense pas qu’il y ait de terme français, en fait, pour inventorship, malheureusement. C’est un enjeu, parce que quand on développe une solution, généralement on va la développer avec les moyens de l’employeur. C’est-à-dire qu’on va être sur les lieux de l’emploi, on va utiliser les outils qui sont fournis par l’employeur. Dans ce contexte-là, la jurisprudence est assez claire. Si on a été engagés pour inventer et qu’on utilise les moyens de l’employeur, automatiquement l’invention est propriété de l’employeur. Par contre, en période de pandémie c’est un peu plus compliqué de démontrer que ce sont les outils de l’employeur qui ont été utilisés. Parfois, c’est l’ordinateur personnel de la personne, mais même quand ce n’est pas l’ordinateur qui est en jeu, on a quand même un enjeu au niveau du lieu qui a été utilisé. Normalement, quand on est sur les lieux de travail, il n’y a pas de doute sur le fait que c’est l’employeur qui fournit l’ensemble des outils qui sont nécessaires au développement. Là, c’est moins clair. La meilleure pratique à ce moment-là, même si elle reste vraie sans le contexte de pandémie, elle est exacerbée par la pandémie, c’est d’avoir des contrats de travail qui stipulent clairement que les inventions ou les solutions qui vont avoir été développées vont automatiquement être cédées à l’employeur. Mais malgré ça, il faut aussi faire signer une cession explicite dans la chaîne de développement du produit, parce que sinon il n'y a aucune difficulté quand vient le temps de faire valoir nos droits devant une cour, parce qu’à ce moment-là, la preuve qui va devoir être faite est plus complexe à faire que si on a une cession explicite signée par l’inventeur.
Il y a aussi une différence importante entre le fait d’être inventeur et le fait d’être titulaire ou le fait d’être demandeur d’une demande de brevet. On peut être demandeur parce que notre employé nous a cédé les droits. Ça, ça va bien. Mais on ne peut pas changer le fait d’être inventeur ou pas. Être inventeur, c’est une question de fait; être titulaire du brevet, c’est une question de cession. C’est important aussi à considérer puis d’avoir les titres qui soient le plus clair possible. Quand on vient faire des vérifications diligentes, c’est souvent le genre de choses qui vont échapper, les cessions étant mal rédigées ou étant mal signées. C’est toujours un enjeu qu’on voit dans nos vérifications. Donc, c’est un enjeu qui était important dans le contexte, parce que la conséquence de mal avoir assigné les demandes de brevets peut faire en sorte que le brevet complet tombe. Si l’inventorship est mauvais, par exemple aux États-Unis en particulier, le brevet au complet pourrait être jugé invalide. C’était le message principal que je voulais vous donner ce matin. On pourra revenir aux questions à la fin s’il y a quoi que ce soit. Je cède la parole à Delphine pour la suite des choses.
Delphine Robert :
Merci beaucoup, Benoît. Comme le disait Benoît, nous allons avoir une période de questions à la fin de présentation. On va continuer nos conférences express avec Me Marc Tremblay et suite à ça vous pourrez nous poser des questions ou leur poser des questions plutôt via le chat dans Zoom.
Ce matin, Marc va nous parler des considérations importantes avant de signer un contrat avec un fournisseur de services technologiques et, évidemment, c’est une tendance qui s’est grandement accentuée pour un grand nombre d’entre vous, j’imagine, ces derniers mois. Marc a la particularité d’être ingénieur et avocat. Il est associé en droit des affaires au bureau de Montréal de Gowling WLG. Il œuvre principalement dans le secteur des technologies, notamment les technologies de l’information et les fintech. Il est depuis de nombreuses années recommandé dans les guides Lexpert et Best Lawyers comme un expert dans ces domaines. Donc, nous sommes entre de très bonnes mains. Alors, Marc, je te cède la parole.
Marc Tremblay :
Merci, Delphine. Ça va, le micro. Tu m’entends?
Delphine Robert :
On t’entend très bien.
Marc Tremblay :
Bon, excellent. Alors, on m’a demandé de parler des éléments importants à garder en tête lorsqu’on négocie avec un fournisseur de services technologiques. Évidemment, la COVID n’a pas changé ces éléments-là, mais je pense que l’idée aujourd’hui était parce qu’il y a une recrudescence. La COVID a causé beaucoup de demandes dans ce secteur et ça appelle plusieurs organisations à devancer des achats, etc. Alors, aujourd’hui, j’ai quatre éléments dont je veux vous parler, qui à mon sens doivent justement être conservés en tête ou à garder en tête quand on approche ces contrats-là. Pour nous amener à ce qui doit être fait pour un avocat en matière de techno, je pense, c’est de nous aider à bien identifier le risque premièrement, deuxièmement, de bien nous aider à proposer une allocation de risque au client et la contextualiser par rapport aux pratiques d’affaires et pratique de l’industrie en matière d’allocation de risque et, finalement, être capable de communiquer ce risque aux équipes d’affaires pour qu’il puisse être pris en compte dans l’analyse-bénéfice globale qui est faite au niveau affaires. Prochaine diapositive, s’il vous plaît. Oui.
Avant de traiter de ces quatre questions, je me proposais de faire une petite remarque préliminaire qui s’applique dans tous les contrats, mais en matière techno c’est encore plus fondamental. Je pense qu’on a tous été confrontés, pour ceux qui ont négocié des contrats dans le domaine de la technologie, d’avoir des clients qui nous demandent des fois de ne traiter qu’une particule du dossier avec un contexte minimal sinon inexistant. C’est un simple rappel. Je pense que tout le monde est sous la même pression et c’est de toujours se battre pour avoir ce contexte-là, parce qu’évidemment la même clause ou le même contrat, mais dans un contexte différent nos avis vont être différents. Donc, c’est important toujours, je pense, qu’un rappel soit là. Les questions de base : qui, quoi, comment, qui, pourquoi et quand. En matière techno, qui est le fournisseur? Est-ce que c’est une multinationale, un grand fournisseur comme IBM, CSC ou on parle d’un fournisseur local? L’analyse de risque va être différente sur des questions différentes et on va peut-être moins mettre d’emphase sur la vérification continue de la qualité versus mettre plus d’emphase sur la portée des obligations.
Donc, « qui » est fondamental de savoir de quel genre d’entreprise on parle. Le « quoi », bien, est-ce que c’est un système ERP ou un système CRM? Qu’est-ce qu’on fait? Est-ce que le client ultime de l’entreprise voit cette interface-là ou pas? Donc, l’analyse de risque doit rendre compte de ça également. Le « comment », est-ce que c’est une solution qu’on implante ou c’est une solution qu’on va développer? Encore là, analyse d’un risque différent qui va avoir beaucoup d’impact sur qu’est-ce qu’on va faire au niveau du contrat. « Où » concerne plus les données. On va y revenir tout à l’heure. Le « pourquoi », c’est quoi l’objectif stratégique? Est-ce qu’on veut au niveau technologique, par exemple, une solution techno, une solution logicielle? Est-ce qu’on veut améliorer la robustesse de l’entreprise ou, au contraire, on veut augmenter la vélocité? Donc, la question de timing et d’échéancier va être importante. Finalement, le « quand », comme je viens d’en faire allusion, l’échéancier c’est important et c’est quoi les transitions de sorties- entrées. Je viens y venir tout à l’heure. Le grand défi dans la techno, souvent c’est d’aller au-delà de ce qu’on appelle les buzzwords et d’essayer de comprendre ce qui se passe en arrière. Évidemment, le but n’est pas de devenir un docteur en génie électrique ou en génie informatique, mais d’au moins comprendre les grands éléments et l’interaction de ça. Prochaine diapositive.
Ça m’amène au premier grand point dont je voulais traiter avec vous, un des grands éléments. Quand on parle techno, il faut rapidement être capable comme avocat de comprendre comment cette solution-là s’intègre dans l’environnement global de l’entreprise. De façon simpliste, évidemment, si vous avez à vous acheter un laptop puis vous installez un logiciel, la seule interaction que ce logiciel va avoir théoriquement, c’est avec votre système d’opération très simple. Donc, les défis au niveau de l’intégration, les risques associés à ça sont relativement minimes. Par contre, comme vous savez, dans une grande entreprise, si vous implantez un système de gestion de paye, il va avoir de l’interaction avec votre système ERP potentiellement avec plein de systèmes autres, ce qu’on appelle des API. Donc, la complexité des risques augmente de façon exponentielle avec le nombre de ces interactions avec vos autres systèmes. Au niveau de la gestion des données, du transfert des données, etc. ça peut devenir extrêmement complexe. Donc, il faut, nous, comprendre ça comme avocats pour pouvoir gérer les évolutions. Exemple, en matière SaaS de plus en plus si vous avez implanté un système de gestion de paye en mode SaaS, bien, cette solution va évoluer dans le temps. Les updates/upgrades vont être souvent faits de façon continue par le fournisseur. Alors, si vous avez plein d’API qui vont suivre, de quelle façon ça va être fait, est-ce que la compatibilité va demeurer? Ce sont toutes des questions qui semblent techniques, mais qui ont un impact majeur sur les opérations dans l’éventualité où ils deviennent incompatibles. Prochaine diapositive.
Deuxième point rapide dont je voulais vous parler. Dans tous les cas, il faut comprendre c’est quoi la stratégie d’entrée, la stratégie de sortie et les échéanciers. Dans tout projet techno, il y a une implantation, il y a un moment où on met ça en œuvre. Ça peut prendre une journée comme ça peut prendre 24 mois. Donc, il faut avoir une conscience non seulement de la durée mais de la complexité. C’est quoi le critical path, puis c’est quoi les éléments qui vont mener à la livraison de la solution. De façon encore plus importante, il faut comprendre c’est quoi le plan de sortie. Curieusement dans bien des cas, vous seriez surpris, ceux qui en ont fait beaucoup, les gens techniques ne sont pas trop sûrs qu’est-ce qu’on veut dire par la stratégie de sortie. Souvent, on est pris avec le fournisseur, on ne peut plus sortir. Alors, dans les cas de grandes solutions technologiques, comme dans les grands contrats d’impartition, la sortie c’est sur 18, 24, 36 mois. Au niveau légal, il faut avoir ça en tête, parce que d’avoir des recours juridiques il va falloir être capable de s’assurer qu’on est capable de continuer les opérations d’affaires puis d’avoir les leviers aux contrats pour faire ça. Autre diapositive.
Au niveau des données. Évidemment, en techno maintenant il n’y a pratiquement plus de contrats où la question des données n’est pas traitée, qui n’y ait pas un élément important. Donc, il faut évidemment avoir ça en tête, mais ça, ce n’est pas surprenant. Pour les fins d’aujourd’hui, ce que je dirais, ce qu’il faut avoir en tête, puis on aborde ça évidemment toutes les questions d’intelligence artificielle de big data, les questions de données et de renseignements personnels au niveau de GDPR ou PIPEDA au Canada et j’en passe, afin d’avoir une vision de ça, c’est qu’il faut absolument, je pense, dès le départ demander aux équipes techniques et d’affaires de bien comprendre et d’avoir même des exemples très précis de quelle sorte de données le fournisseur va avoir accès. Et en fait il faut le voir de façon exhaustive pour bien comprendre, parce que souvent le problème en ce moment c’est qu’il y a tellement d’emphase sur les données, on part des dossiers, et souvent on assumait qu’il y allait avoir des renseignements personnels, mais dans le fond soit il n’y en avait pas ou quand il y en avait c’était des données qui étaient cryptées de façon très, très solide, qui diminuaient de façon exponentielle le risque qui était relié à ça. Alors, on peut perdre un fou à gérer ça alors que c’est un risque qui était très, très minime. Je ne dis pas qu’il n’y en a pas, mais il faut au moins l’évaluer rapidement. Maintenant en ce moment, comme vous le savez, il y a toute la question liée à l’usage par le fournisseur de services des données anonymisées, parce que ça vaut beaucoup d’argent souvent. En ce moment, comme vous le savez pour ceux qui suivent ces questions-là, avec le recoupement des bases de données maintenant, même une base de données anonymisées qui était très bien faite, il y a de plus en plus de possibilités de reconstruire et de les retourner, être capable d’identifier des usagers ou des utilisateurs. Ça fait en sorte que vous, comme clients, si c’est vos données, de plus en plus en voit des clauses d’indemnisation perpétuelles très larges qui vont vous permettre de gérer ces questions-là. Mais enfin je pense que c’est des grandes questions qu’il faut avoir en tête. Il y a évidemment plein de façons de régler ça. Dernier point. Prochaine diapositive, s’il vous plaît.
C’est l’intégration de l’allocation de risque et des risques associés dans un contrat comme ça avec le risque global. Je pense que c’est un élément qui manque souvent parce que, je pense, il y a beaucoup de gens en technologie, tant l’équipe technique que l’équipe juridique, qui vont souvent plus voir les arbres que la forêt. Par exemple, au niveau les gens techniques avec qui vous traitez, ils vont souvent mettre beaucoup d’emphase si vous êtes en mode service techno : OK, j’ai des niveaux de service, je veux des précisions sur leur time à 99,99, etc., je veux des pénalités associées au manquement, etc. Ce qui est bien, mais souvent c’est des petits bâtons pour des petits événements sur des durées longues, mais qui ne protègent pas vraiment le client sur les affaires majeures et qui sont souvent associés à des limites de responsabilité. Ce qui fait en sorte que ces limites de responsabilité, que ce soit pour les pénalités au niveau de service ou la limite de responsabilité qui est dans le contrat, vont souvent être très minimes par rapport aux dommages que vous pouvez subir d’un manquement contractuel du fournisseur de service. Ce qui fait en sorte que vous avez externalisé une opération et c’est très important d’expliquer aux gens d’affaires que vous n’avez pas externalisé le risque par ailleurs. Pas complètement, en tout cas. Vous en avez externalisé une partie, mais jusqu’à la limite de responsabilité ou, dans le cas des niveaux de service, jusqu’à la pénalité au niveau de service qui est souvent insignifiante par rapport aux dommages que vous allez subir. Donc, je pense que c’est une partie de communication, c’est le résultat de la négo, c’est celle-là. Bien s’assurer que les gens d’affaires comprennent ça et qu’ils traitent soit au niveau de l’assurance ou qu’ils traitent au niveau de l’analyse globale, des analyses coût-bénéfice du projet, puis qu’ils soient bien conscients que ce n’est pas le recours nécessairement légal qui va les protéger s’il y a un problème éventuellement.
L’autre façon de palier à ça, c’est le dernier point là-dessus. Dans ces contrats-là, souvent les contrats de SaaS, avec des petites limites de responsabilité, mais avec des grands dommages que vous pouvez subir si jamais il y a un manquement par exemple aux obligations de sécurité, qu’il y a des données qui sont divulguées, c’est de s’assurer évidemment que la vérification diligente soit faite de façon beaucoup plus exhaustive pour gérer ce risque et aussi qu’on peut avoir des clauses contractuelles pour s’assurer qu’il y a une continuité d’analyse continue de la conformité du fournisseur pour s’assurer que, quand je vous disais que le risque n’a pas été complètement externalisé, donc il faut avoir une vision que vous-mêmes, si la fonction était toujours internalisée, vous devriez avoir des politiques et des suivis internes pour vous assurer par exemple que les pare-feu existent, qu’ils sont toujours mis là puis que ce que vous aviez fait il y a deux ans, les équipes techniques continuent de le faire puis respecter ces politiques de responsabilité et de sécurité-là, bien, que vous continuiez de le faire même si ç’a été externalisé. Donc, c’est de mettre en place ces mesures-là. Je pense que c’est dans le temps que j’avais. Alors, comme on l’a indiqué tantôt, on sera prêts pour avoir des questions si vous en avez déjà plus tard. Merci.
Delphine Robert :
Merci beaucoup, Marc. Merci également à Alexandre et Benoît. Comme Marc vous l’indiquait, on a une courte période de questions maintenant. La manière de procéder, ça va être en utilisant le mode chat/conversation. Simplement écrire votre question et surtout à qui elle s’adresse. Nous allons également par la suite enchaîner sur une courte pause pour reprendre la suite de la programmation à 10 h. Nous allons suivre les questions s’il y en a. Sinon, nous reprendrons à 10 h pour la suite des événements.
Benoît Yelle :
On a tellement été clair qu’il n’y a aucune question?
Delphine Robert :
Il semblerait que oui.
Périodes de questions et réponses
Q1. J’avais une question pour Alexandre. Je voulais savoir si, dans le contexte familial, les enfants étaient contraignables en cour.
Julie-Han Angers :
Alexandre, on n’entend pas dans la salle. <pause> Alexandre, le micro est fermé dans votre salle. <pause>
Delphine Robert :
Oui, le micro est toujours fermé, Alexandre.
R1. <Alexandre> C’est revenu, voilà. Je ne sais ce qui a changé, mais… Donc, ce que je disais en fait, c’est que les enfants majeurs sont contraignables. Les enfants mineurs ont le même encadrement qu’il y a pour tout enfant mineur en termes de témoignage. C’est vraiment particulier, parce que l’aspect de la contraignabilité du conjoint(e) marié(e), c’est vraiment une section du Code du droit de la preuve qui est vraiment spécifique, puis on attend pour voir qu’est-ce qui se passe pour le conjoint de fait.
Julie-Han Angers :
J’ai une question pour Alexandre.
Q2. Comment assurer le secret professionnel dans une chaîne de courriels à laquelle l’avocat est ajouté.
R2. <Alexandre> Ça, c’est très intéressant. En fait, la Cour s’est penchée surtout dans un cadre où il y a vraiment un avis juridique. Donc, ca dépend évidemment de ce qui est discuté. Là où j’interviendrais un peu plus, c’est que je tenterais beaucoup plus d’utiliser le privilège relatif au litige. Donc, c’est dans ce cadre-là. Lorsqu’on est en préparation, lorsqu’il y a une intervention qui est faite, par exemple, d’un avocat où on désire entrer la conversation dans le cadre d’une préparation par exemple litigieuse ou potentiellement litigieuse, la Cour a confirmé que ce n’est pas obligé d’être un litige qui est factice, ça peut être une préparation pour un potentiel litige. Donc, utiliser l’argument du privilège relatif au litige est possible. Encore une fois, ça va dépendre des échanges. Si on avait des échanges stratégiques et que l’avocat est inclus pour une question particulière, il y a toujours une manière de mentionner que les portions qui sont faites concernant l’opinion juridique ou l’opinion du professionnel sont protégées. Encore une fois, le plus facile, lorsqu’on tente justement, si un jour le débat se fait devant la cour, c’est de le mettre très clairement que l’aspect privilégié ou confidentiel. Des fois, on trouve que c’est un peu abusif, un peu comme nous, les avocats, on met « sous toutes réserves » partout sur toutes nos communications, mais dans un cadre comme ça à tout le moins, lorsqu’on voit une chaîne et qu’il y a un avocat qui est mentionné, bien, la cour va déjà être plus frileuse et le débat va déjà être plus difficile pour rendre l’entièreté de la chaîne disponible. Ce que souvent l’adversaire va tenter de faire, ça va être de caviarder la portion qui serait confidentielle et de laisser les discussions stratégiques. Ça reste quand même un défi, gérer la présomption qui est référable, pardon, et que l’entièreté de la conversation va être protégée, et le plus clair on est, le mieux.
Julie-Han Angers :
Merci, Alexandre. J’ai maintenant une question pour Marc Tremblay.
Q3. Devrait-on exclure la limite de responsabilité des dommages résultant d’une fuite de données due aux manquements du fournisseur?
R3. <Marc> Évidemment, vous pouvez essayer, mais les fournisseurs sophistiqués, excusez-moi l’expression, les grands fournisseurs de logiciels ou de services informatiques vont systématiquement refuser d’avoir ce type de clause. Évidemment, pour le client de la demander, ça ne fait pas mal, mais les probabilités d’être capable d’avoir ce type de clause dans un contrat sont très faibles si le fournisseur de service est bien conseillé. La vision de ça est assez raisonnable, parce que ç’a beaucoup évolué dans les 25 dernières années. Le fournisseur de services, prenez par exemple un grand fournisseur qui fournit des services informatiques à une banque, ne fait pas de profit sur l’activité bancaire. Donc, s’il y a un problème informatique puis c’est un contrat qui fait peut-être 20 millions par année au niveau des revenus pour ce fournisseur-là, il ne peut pas être assujetti à une limite de responsabilité de milliards de dollars si jamais le système informatique tombe par sa faute. Donc, il y a une partie du risque reliée à l’exploitation du service informatique qui va demeurer à la banque. C’est un peu le point que je voulais faire, qui est vrai dans tous les cas, qui est vrai dans le SaaS, mais qui est vrai aussi dans les cas de grandes exploitations. Donc, la limite de responsabilité, oui. Ce qu’on voit en ce moment, par contre, c’est plus des supercaps. Il y a une limite de responsabilité qui, par exemple, est limitée à 12 fois la moyenne des 12 derniers mois mais que, pour les caps, il va y avoir des supercaps en matière de sécurité, en matière de renseignements personnels, qui vont être des fois deux ou trois fois la limite. Donc, si vous avez une limite à 10 millions, bien, vous allez avoir une limite à 20 ou 30 millions pour des manquements en matière de sécurité et/ ou manquement à des obligations reliées à la divulgation de renseignements personnels.
Delphine Robert :
Parfait. Merci beaucoup, Marc. Je crois que nous n’avons plus de questions, donc nous allons pouvoir prendre une courte pause. Une simple consigne pour tous. Afin de vous assigner dans l’esprit de réunion pour la partie interactive, pour ceux qui ont un nom d’utilisateur dans leur profil Zoom, si vous pouviez simplement changer ça pour votre prénom et votre nom, ce sera beaucoup plus simple pour pouvoir vous assigner à une salle d’atelier. Voilà, sur ce, je vous souhaite une bonne pause. On se retrouve à 10 h. Merci.
<pause>
Delphine Robert :
Rebonjour à tous dans notre salle principale. Je pense qu’on a encore des personnes qui sont en train de se joindre à cette salle principale. J’espère que vous avez apprécié cette expérience d’échange en plus petit comité, en plus petit groupe, que les discussions étaient pertinentes et intéressantes. En tout cas, dans notre groupe à nous, ç’a été vraiment intéressant de pouvoir échanger. Rapidement, avant qu’on passe à notre invité spécial, on fait un petit debrief rapide sur les discussions.
De mon côté, nous avons parlé des trucs, astuces sur non pas la communication virtuelle mais sur la manière dont on essaie de ne pas se faire oublier, entre guillemets, par nos clients internes ou les collègues. Ce que je peux dire, dans nos discussions, différentes approches, mais ce qui est ressorti de tout ça finalement, c’est que oui on a moins les conversations sociales, moins les conversations autour de la machine à café ou dans le couloir qui sont parfois très pertinentes, on apprend beaucoup de choses, mais cela dit du coup on se concentre beaucoup plus sur le travail sans vouloir dire évidemment qu’on ne travaillait pas avant, bien sûr. Mais c’est sûr que ça peut créer des occasions où on manque des informations. Donc, on avait dans notre groupe certaines astuces, notamment quelqu’un qui sollicite des cafés virtuels avec juste une ou deux personnes. Donc, oui, y a les grands 5 à 7, on se retrouve à 10, 20, 30 pour vraiment avoir un moment plus social, mais avoir ces cafés avec une ou deux personnes, vous créez vraiment ces occasions de discussion. La bonne nouvelle aussi finalement, pas vraiment de personnes qui se sont fait oublier parce qu’il y a beaucoup plus de réunions, peut-être beaucoup plus de Zoom, de Teams, on se voit plus. Physiquement, on ne se voit pas, mais visuellement on se voit. Donc, ça rapproche.
Voix masculine non identifiée :
Oui, allô?
Delphine Robert :
Oui? Quelqu’un nous parle. Non, je pense que c’était un petit problème de son. Christian, Mylène et Mila, vous étiez également dans des salles. Rapidement, vos discussions, vos conclusions. Je vais commencer avec Christian.
Christian :
Oui. Alors, effectivement, dans notre cas on a partagé un petit peu le besoin de garder des fois la caméra allumée, parce que lorsque notre caméra est allumée on y porte plus attention que si on est seulement en mode audio. Mais en même temps, garder la caméra allumée trop de temps cause un Zoom fatigue. Alors, essayer de trouver une balance entre la caméra et de temps en temps permettre à l’équipe de ne pas l’avoir. On parlait souvent de l’importance d’avoir la caméra surtout lorsqu’on est avec sa propre équipe pour créer des liens et surtout lorsque c’est des nouvelles personnes qui se sont jointes à l’équipe depuis après le début de la pandémie. En même temps, on parlait d’essayer de créer des espèces de machines à café ou des 5 à 7 aussi en virtuel pour essayer de garder un esprit d’équipe plutôt motivé. Assez important aussi avec nos clients internes pour les garder captivés dans ce qu’on présente, vraiment le plus possible partager des fois des documents sur Teams ou sur Zoom et aller ensemble avec le document ça fait vraiment un travail d’équipe plutôt qu’écouter une personne qui parle et décrocher. C’étaient quelques-uns des points.
Delphine Robert :
Merci, Christian. Mila, rapidement parce qu’on a… On a Philippe, je crois, qui est prêt, mais on va juste terminer notre petit debrief. Donc, Mila.
Mila :
Oui. Bonjour, tout le monde. Ici, Mila. J’ai été modératrice pour l’atelier sur les clés du succès pour ne pas se faire oublier par nos clients. Relativement à ça, ce qu’on a discuté beaucoup, c’est vraiment qu’il faut créer des occasions pour réseauter, pour parler avec les clients, donc vraiment créer des contacts fixes. Donc, se fixer des moments, soit dire, mettons, une fois par semaine on fait des appels, appels hebdomadaires, quotidiens, soit à la même journée, à la même heure pour vraiment se réserver du temps pour parler des dossiers et/ou réseauter. Donc, faire des cafés virtuels one-on-one ou avec un groupe plus élargi. On pense qu’il ne faut pas laisser ça au hasard puis vraiment créer des initiatives et faire des touch points hebdomadaires avec des équipes.
Un autre point qu’on a soulevé notamment, c’est que la vidéoconférence est de plus en plus utilisée versus avant où on utilisait surtout le téléphone. La vidéoconférence permet de maintenir les relations à distance. Grosso modo, c’est de ce qu’on a discuté.
Delphine Robert :
Effectivement. Mylène, je te laisse terminer.
Mylène :
Oui, alors notre groupe, je résumerais principalement trois sujets. Ce qui est ressorti de nos discussions, premièrement, on a senti le besoin d’échanger sur comment ça se passait dans nos organisations, quelles étaient les politiques qui ont été adoptées pour le télétravail, des codes de conduite en courtoisie, par exemple ne pas booker des meetings le vendredi ou le vendredi après-midi. Donc, des pratiques qui se développent pour permettre aux gens de libérer leur agenda et de travailler sur autre chose. Également, comment ça fonctionnait pour accéder au bureau certaines journées par semaine.
Deuxième sujet qu’on a abordé, c’est l’équilibre entre avoir une réunion efficace pour avoir moins de réunions et des réunions moins longues, mais également favoriser les échanges humains lors de ces réunions-là.
Le troisième sujet qui est ressorti, c’est l’importance comme gestionnaire et comme organisation d’identifier peut-être les employés qui auraient une plus grande charge mentale du fait de travailler à 100 % de la maison, de sonder les employés et de pouvoir adresser justement les situations qui sont un peu plus problématiques pour favoriser la productivité et également une bonne santé mentale, bien-être psychologique de la part des employés.
Delphine Robert :
Merci. Très intéressant. Merci beaucoup. Merci à tous d’avoir participé à ces ateliers. Nous allons maintenant passer à la dernière partie de notre événement. Pour terminer cet événement en beauté, j’ai beaucoup de plaisir à vous présenter Philippe Meunier. Philippe est chef de la création et cofondateur de l’agence publicitaire Sid Lee. Sid Lee est une agence, comme je le disais en introduction, qui est d’envergure mondiale, qui est une belle histoire à succès. Il va nous parler aujourd’hui de la créativité, parce qu’évidemment c’est une qualité dont on a tous dû faire preuve ces derniers mois.
Pour vous présenter Philippe, donc, il est responsable de l’ensemble du produit créatif de l’agence. Donc, la créativité, je pense qu’il en connaît un petit bout. Son approche multidisciplinaire et son style de gestion ont permis à Sid Lee de récolter de nombreuses récompenses prestigieuses dans le domaine publicitaire. Philippe est reconnu pour son côté zen, probablement grâce à son amour pour le surf et le yoga, ce qui est particulièrement impressionnant considérant son rôle et son taux d’occupation qui doit être assez important parce que, on s’entend, diriger une grande équipe de créatifs un peu fous sur les bords, ce n’est pas de tout repos et ce n’est pas surprenant qu’il croit dur comme fer que ce sont les gens heureux qui travaillent le mieux. Devise à laquelle il fait honneur jour après jour. Philippe est également cofondateur de La Factrie, une école des sciences de la créativité qui offre des formations aux étudiants et aux professionnels pour forger des esprits créatifs à trouver des solutions inédites aux défis contemporains. Alors, Philippe, c’est un grand plaisir de t’avoir avec nous aujourd’hui et je te cède la parole.
Philippe Meunier :
Merci, Delphine. Merci beaucoup. Avant de commencer, je voulais juste m’assurer, est-ce que le son est bon?
Delphine Robert :
Le son est très bon de mon côté. Parfait.
Philippe Meunier :
Parfait. Bonjour tout le monde. C’est vraiment le fun de se faire inviter parmi vous. Ç’avait l’air très intéressant, votre lab. Je suis convaincu que vous avez appris plein de choses aujourd’hui, puis j’espère vous en donner un petit peu plus dans votre packsack avant de quitter pour la journée. Alors, je vais sauter tout de suite dans le vif du sujet, la créativité. La créativité pour moi, je crois que c’est une compétence clé pour le futur et surtout je pense qu’on vient de vivre de mois quand même assez intenses où on a dû susciter notre créativité un petit peu pour réinventer les choses. La mauvaise nouvelle là-dedans, c’est que ça n’arrêtera pas. On va être obligés de continuer à réinventer et transformer des choses et surtout aider vos clients aussi à être capables de cultiver cette créativité au sein de leur entreprise. Alors, aujourd’hui, je vais vous parler un petit peu de ça. Je vais vous parler de mes trucs de création et comment aussi je vois la créativité à l’intérieur d’une entreprise. Vous allez avoir des petites notes de cours, je vous le dis. Si vous avez un petit Post-it pas loin de vous et un crayon, je vous invite à les prendre ou ouvrir votre calepin. Vous allez avoir 10 notes de cours. Après ça, vous allez avoir un deuxième chapitre qui va être quatre points de vue sur la créativité. Alors, on commence comme ça. Aussi en même temps, c’est sûr que si vous avez des questions, il y a une période de questions qui est réservée à la fin. Vous pouvez me poser toutes les questions que vous voulez, que ça soit par rapport à votre entreprise, ce que vous avez vécu les derniers mois, comment, nous, on vit ça chez Sid Lee, comment on vit ça à l’international aussi, c’est quoi La Factrie, c’est quoi cette école de créativité. Vous pouvez me poser des questions sur comment on a fondé Sid Lee, c’est quoi les hauts, les bas et tout ça. Je vais pouvoir répondre à toutes ces questions-là.
Alors, on commence. Pour débuter, pour les gens qui ne nous connaissent pas trop, je vais vous montrer un petit vidéo pour vous montrer un petit peu qu’est-ce qu’on fait chez nous, juste pour vous remettre un petit peu au parfum de ce qu’on fait dans notre quotidien. Bon, ç’a l’air que ça ne veut pas y aller. Attendez une seconde. Pourquoi? <pause> C’est bizarre. Ah, ça y est.
<présentation de la vidéo – 1:03:19- 01:05:35>
Philippe Meunier :
Bon, voilà. Alors, je vais voir si ça continue. Allez, petit keynote. Bon, je pense que ça fonctionne. Bon. OK. Donc, c’est quand la dernière fois que vous vous êtes posé la question « À quel point je suis créatif? ». C’est sûr que ce n'est pas une question qu'on se pose tous les jours, mais quand même je pense que c'est important qu'on se pose cette question-là. En plus quand on est tout seul chez nous dans notre bureau, on peut prendre une petite pause puis arrêter quelques secondes puis se pose la question : « Est-ce que je suis vraiment créatif? » ou « Est-ce que je suis en train de faire, je suis capable de susciter de la créativité dans mon équipe à l'intérieur de ce projet? ». La bonne nouvelle du jour, c'est que tout le monde peut être créatif, parce qu’on a un cerveau. Ça fait que si vous avez un cerveau, vous êtes créatif. Souvent, les gens disent : ah non, moi je ne suis pas créatif, ma belle-sœur est créative parce qu'elle fait de la peinture, ou mon beau-frère est créatif parce qu’il fait de la photo. Ce n'est pas exactement ça. C'est sûr qu’il y a des créatifs qui utilisent la photo, la peinture pour exprimer leur créativité, mais la créativité, ça appartient à tout le monde. Si on regarde par exemple les gens en affaires, les gens en droits, en ingénierie, ce sont des gens extrêmement créatifs. Les gens en mathématiques, les gens en chimie sont des cerveaux créatifs. Donc, la création se travaille à l'intérieur de notre tête de toutes les façons. C'est drôle, parce que souvent en droit on me dit : ah non, moi je ne suis pas créatif, mais il y a énormément de gens créatifs en droit. C'est un petit peu cette partie de notre cerveau que j’aimerais allumer aujourd’hui et surtout comment vous pouvez bâtir une culture créative à l’intérieur de votre entreprise. C'est très important, parce qu’on est en train de vivre une grande période de changement économique et on doit se servir de notre créativité. C’est comme un peu un soft skill qu’on n’apprend pas nécessairement à l'école. Souvent, la créativité c'est quelque chose qui est un petit peu à part, mais la créativité c'est quelque chose qui est complémentaire à tout ce qu'on fait.
Alors, aujourd'hui je vais vous parler de la créativité, mais à l'intérieur d’une entreprise. Pour vous donner une image un peu de la manière que, moi, je la gère, c’est un peu comme un jardin. Moi, je viens de la région des Cantons-de-l’Est et il y a beaucoup de fermes alentour de chez moi. Quand j'étais jeune, je voyais toutes ces fermes et il y avait des grands, grands champs où on plantait juste du blé d’Inde, tu sais. Pour moi, la créativité c'est un champ, mais avec des légumes, des fruits, des légumes exotiques. On met une rangée de tomates avec une rangée de basil, avec des courges. Pour moi, le jardin de la création c'est un mix de tout. C'est comme ça que j'aimerais que vous voyiez un petit peu votre entreprise puis comment cultiver la culture créative à l'intérieur de ça. Comme un grand jardin. La bonne nouvelle, c’est que vous êtes le jardinier de tout ça et vous êtes responsable de ce grand jardin. Un jardinier doit marcher son jardin tous les matins, doit prendre le temps de regarder chaque petite plante, s'assurer que s’il y a assez de soleil tant mieux, mais qu’il y a assez de pluie aussi pour faire grandir la création à l'intérieur de future entreprise.
Alors, je vous donne mes 10 conseils pour cultiver la créativité dans votre jardin. C’est là qu’on se prend des notes. On commence là-dessus. Le premier conseil. Better question, better answer. Je vous le dis tout de suite, ma présentation est en français, en anglais, parce que souvent je me promène un peu partout et je fais des conférences en anglais. Quand je fais des conférences en anglais, je mets un petit peu de français, puis quand je fais des conférences en français, je mets un petit peu d’anglais. Peut-être qu’un jour je vais réussir à mettre de l'espagnol, mais je ne suis pas encore rendu là. Le premier truc…
No 1 : Better Question. Quand je dis better question, c’est de poser des questions. Très souvent, on rentre sur des projets et on ne se pose pas la bonne question. On se pose plein de questions, mais est-ce qu'on se pose vraiment la bonne question. Puis se poser des questions, c'est d’être curieux. De poser une question, d’avoir une réponse et te reposer une question sur la réponse et questionner comme ça tout le temps. Tout le temps. Ce qui fait en sorte qu'à un moment donné, le problème descend, descend, descend, descend, descend à une question très, très, très simple. Je vous donne un exemple. Si vous êtes pris sur une île déserte, la question est très simple, c'est « comment je sors d'ici? ». Ça ne peut pas être plus simple que ça. C’est tellement simple que tu peux l'écrire sur un Post-it. La minute que tu peux écrire ton problème sur Post-it de façon très, très simple, le problème rentre dans ta tête et puis là notre cerveau se met à réfléchir constamment 24/7 tout le temps, tout le temps, tout le temps, parce qu'on essaie de trouver une solution au problème « il faut que je sorte de l’île d’ici, comment je vais sortir de cette île? ». Des fois, la réponse peut être : bien, je vais nager ou je vais bâtir un bateau ou je vais prendre des feuilles de bananier puis je vais me créer une voile ou je vais me téléporter ou je vais allumer un feu pour signaler ma présence.
Il y a plein de solutions créatives pour trouver une réponse à un problème. Mais ce qui est important, c'est de vraiment se poser la question : c'est quoi mon problème? Trop souvent en entreprise on voit une tonne de problèmes. On essaie de travailler trop large, on ne pose pas exactement la bonne question pour vraiment isoler le problème. Ça fait que faites l’exercice chez vous, peu importe le projet sur lequel vous travaillez. Posez‑vous la question : c'est quoi le problème? Qu'est-ce que j’essaie de résoudre ici? Est-ce que c'est d'augmenter la business chez un client? Est-ce que c’est d’offrir de meilleurs services? Est-ce que c’est d’offrir plus de services? Comment j’aide mon client à se transformer? Ce sont toutes des questions que vous devez vous poser. Puis faites l'exercice de l'écrire, prendre le temps de l'écrire et, s’il vous plaît, ne faites pas une présentation PowerPoint de 66 pages pour essayer d’expliquer c’est quoi le problème. Le problème peut s'écrire facilement sur un Post-it. Une fois qu’on l’a, là on se met à le travailler. Ce que je fais souvent, c’est qu'une fois que je l'ai sur mon petit Post-it, je le colle dans mon bureau à côté de mon ordinateur. Sans m’en rendre compte, mon cerveau travaille toujours, toujours, toujours pour essayer de trouver une solution à mon problème. Alors, une fois qu'on a quelque chose dans notre tête, notre cerveau n’arrêtera pas de travailler. Je ne sais pas si vous vous rappelez lorsque vous étiez au cégep ou à l’université, le premier cours, quand on entre dans la salle de cours le professeur nous donne son plan de cours, puis on sait qu’à la mi-session on a un travail de 25 pages à remettre, tu sais. On sait que c’est un problème, c’est dans notre tête, tu sais. Mais si on ne l’adresse pas un petit peu tous les jours, on n’est pas capable d’arriver la veiller puis sortir le travail. Il n’y a rien de bon là-dedans. C’est exactement ça. Ça, c’est un problème. On l’a, on l’écrit, on le place puis on le travaille un petit peu tous les jours. Mon deuxième truc…
No 2 : Do the Do with Purpose. Donc, c'est faire les choses avec une intention très saine. Pour moi, c'est une valeur qui a changé, en fait qui a pris une grande dimension depuis quelques mois. Je pense que c'est important de tout ce qu'on fait. On doit de le faire avec une certaine vélocité, une certaine conviction, mais il faut le faire aussi avec une vision, avec quelque chose qui peut être capable de rattacher les gens dans une vision, un point commun, qui fait du sens. C’est un partage de valeurs qu’on doit avoir auprès de notre équipe. Tout bon leader en création doit partager sa vision auprès de son équipe, de faire en sorte qu’on embarque ensemble. Lorsque je travaille avec mes créatifs, la première chose que je veux faire c'est de les inspirer par mon leadership. Mon leadership, pour moi, c’est vraiment de donner une vision claire, d’anticiper quel va être le futur puis comment on va changer les choses. Parce que, vous savez, la création ce n'est pas quelque chose de tangible. C'est quelque chose qui vit un petit peu dans l’éther, c'est quelque chose qui n’est pas concret comme un bilan financier ou un chiffre en bas d’une ligne. La création, c'est des idées qui vont peut-être arriver dans le futur, mais on ne le sait pas. On va travailler fort pour que ça arrive, puis on va tout faire pour mettre en branle le projet, mais on ne sait pas quelle forme ça va prendre au final. Mais ce qui est important, c'est de le faire avec des bonnes valeurs. De plus en plus dans les derniers mois, on s’aperçoit que les valeurs qu’on transmet auprès de nos équipes, auprès de notre entreprise, l’image de marque de notre entreprise a doublé au niveau de la valeur. Les gens ne sont pas dupes, ils veulent avoir un engagement social, quelque chose qui est constructif, quelque chose qui est capable de bâtir et faire du bien.
Alors, moi je vous dis : faites vos projets, faites-le avec beaucoup d’enthousiasme, mais surtout faites-le avec une intention. De partager vos valeurs de façon très claire, c'est important parce que vous allez bâtir une communauté alentour de votre projet. Vous allez voir que soudainement vos employés ne seront plus des employés, ils vont devenir des collègues de travail, puis vous allez bâtir une communauté avec plein d'énergie alentour de vos buts communs. C'est la même chose avec vos clients. Regardez vos clients comme étant des partenaires qui font partie de votre communauté, qui font partie d’un échange de valeurs puis que voulez parler mêmes choses ensemble. Très facilement vous allez voir comment vous allez bâtir la business comme ça, comment il va y avoir un lien de confiance, comment il va y avoir des échanges. Soudainement, les présentations ne seront plus des présentations, ça va être des sessions de travail avec vos collègues. Et puis tranquillement pas vite, vous allez bâtir quelque chose qui est beaucoup plus gros que vous avez réalisé au départ.
No 3 : Le confort. Je dis toujours : Comfort is a cozy ennemy. C’est tellement une phrase connue chez Sid Lee que j’en ai même fait des sweatshirts, des gros sweatshirts, des gros hoodies. Il est super comfy. C’est marqué dessus Comfort is a cozy ennemy. Parce que je crois fortement que lorsqu'on est dans notre zone de confort, on est bien. On fait les choses comme les choses allaient avant. On fait de la business, on fait de l'argent, puis tout roule. Mais c'est très dangereux, parce qu'on n’est pas porté à se réinventer, on n’est pas porté à voir de l’avant. Et puis là, depuis six mois, on s’aperçoit que tout doit changer, que soudainement tous nos modèles économiques, notre façon de faire des affaires, tout a changé. Alors, il faut se sortir de notre zone de confort. Qu'est-ce que ç’a fait? Il y a des gens qui étaient très, très à l'air de se sortir, puis ils disaient : enfin, on fait quelque chose. Il y a d’autres gens qui n’étaient pas tellement à l'aise. Ç’a créé des tensions, des tensions psychologiques, des tensions familiales, des tensions d'affaires, d’insécurité. Tout ça, c'est normal. C’est très inconfortable au départ de se sortir de sa zone, mais à un moment donné on se sent à l'aise, on prend nos aises puis on commence à comprendre, OK, c'est différent, mais sais-tu quoi? J’aime ça, je suis capable de vivre avec ça. Ça, moins, mais je l’ajuste. Ça fait que moi, je dis toujours : c’est très important de toujours repousser les limites en création, toujours être un petit peu inconfortable parce qu’il va faire en sorte qu’on ne sera jamais à une époque de dinosaure, qui va faire en sorte à un moment qu’on va mourir. Alors, se pousser comme ça, c’est bon. C'est normal, mais c'est quelque chose qu'il faut se rappeler tous les jours. Alors, posez-vous la question : est-ce que vous êtes confortable, probablement dans un bureau, probablement dans votre business? Puis dites-vous qu’est-ce que demain je pourrais faire pour être un peu moins confortable? C'est quoi la chance que je pourrais prendre, ouvrir la discussion? Ou me dire : ah, bien oui, peut-être que j’essaierais de faire ça, puis peut-être que j'avancerais un tout petit peu dans ma business. Oh, excusez, je n’ai pas tourné la slide trop vite. Mais comme j’expliquais, c'est sûr qu'au départ ce n’est pas plaisant, mais ne vous en faites pas, ça va passer et ça va être correct.
No 4 : Blue Mind vs Red Mind. Ça, ça vient un petit peu… tantôt, Delphine parlait que pour moi j’essaie d’avoir un équilibre dans ma vie en faisant du yoga puis en faisait du surf. Pour moi, c’est un peu mon moment où je suis capable de me recentrer, un moment où je suis capable d’être vraiment dans ma tête. Cette notion-là est venue à un moment donné quand j'ai réalisé que, j'étais assis sur ma plage puis je regardais l'horizon, comment tout se déposait dans ma tête. C'est comme l'équivalent de lorsque vous prenez un bain le soir, vous êtes couché dans votre bain, vous avez comme l’impression que tout tombe dans votre tête. On dirait que tout devient clair. Ou quand vous prenez une douche aussi, c’est le même effet. Quand vous prenez une douche, des fois vous sortez de la douche puis vous avez eu des idées. C’est ça le blue mind. C’est qu’on est capable de déposer notre esprit pour s’élever par la suite. Souvent, le problème c’est qu’on est dans le red mind. Le red mind, c’est ce qui vraiment au quotidien, c’est ce qui est notre agenda, les textos, les emails, on doit revenir là-dessus, nos objectifs. Tout ça nous amène dans un moment présent. On n’est pas capable de s’élever plus haut que ça. Ça, il faut faire attention parce que ça crée beaucoup de noise alentour de notre quotidien, on n’est pas capable de voir plus grand. Lorsqu’on rentre dans le blue mind où on prend le temps de se déposer, là on est capable d’anticiper le futur, on est capable de se dire : comment je vais ma business ou la business de mes clients évoluer. Est-ce que c’est possible? Est-ce qu’on est capable de se tirer vers le haut puis de se dire : est-ce qu’on est capable de se rendre jusqu’à, puis être capable d’avoir des idées puis des débats par rapport à ça? Puis essayer de s'éloigner un petit peu du quotidien qui encrasse un petit peu notre cerveau. Alors, je vous invite vraiment à prendre des pauses des fois dans la journée pour vous déposer puis essayer de focusser sur comment je peux m’élever puis comment je peux améliorer les choses.
No 5 : Do the Do with Speed. Ça, c’est drôle, parce qu’à un moment donné à l'agence on est dans la création, on a idées, ces choses-là, puis moi je dis toujours à mes équipes : Okay, now, let’s do the do, en voulant dire là il faut faire, il faut faire. C’est en faisant qu’on voit des choses. C’est en faisant qu’à un moment donné on avance. Mon associé disant dans le passé : c’est en gossant qu’on devient gosserons. Il a tout à fait raison, parce que c’est en faisant des choses qu’on réalise comment notre projet peut prendre forme. Ce qui est important, c'est de le faire avec rapidité. Souvent, lorsqu'on part quelque chose, puis là je reviens un petit peu à mon jardin, si on décide de partir un jardin, des fois c’est mieux de partir avec plus d’espèces, plus de plantes, plus de légumes. Plus on plante, plus on a la chance de découvrir quelque chose qui va être extraordinaire, puis après ça on peut revenir sur un petit nombre. Je dis souvent en création : il faut ouvrir la création dans une entreprise pour avoir le plus d’idées, le plus de projets en haut. Par la suite, on travaille puis on choisit nos projets et nos idées, jusqu’à temps qu'on en garde une ou deux puis qu’on est capable de les travailler.
Ce qui était important, c'est de le faire avec de la rapidité. Si vous ne le faites pas avec de la rapidité, vous allez perdre de l'énergie et à un moment donné vous allez avoir l’impression qu’on est encore sur ce projet-là. Ça fait trois ans qu’on parle encore de ça, puis il n’y a rien qui a avancé. Faites-le avec vélocité. Ce n’est pas grave si ce n’est pas parfait à 100 %. Ce qui est important, c'est de faire des petits bouts à chaque jour. Marchez votre jardin. Regardez pousser des projets. Essayez. Ça ne marche pas là? On fait autre chose. Il faut tout le temps, tout le temps pousser avec de la rapidité. La rapidité, souvent, même en session de brainstorming, c’est bon de vider son cerveau très rapidement et de tomber sur les bonnes idées. Ça fait que, dites-vous une chose, mettez-vous toujours en position où on fait des choses ç’est mieux de se rencontrer tous les jours un petit 20 minutes sur un projet pour garder la rapidité que de se dire on va se rencontrer dans deux semaines pour faire un point sur le projet. Ça, ce n'est pas tellement bon pour la culture créative. De garder une tension quotidienne sur un projet, c'est encore meilleur. Faites-vous des petits rendez-vous Zoom. Vous n’êtes pas obligés de faire des grands meetings de trois, quatre heures qui vont vous tuer, mais des petits meetings de vingt minutes des fois, puis ça fait la job.
No 6 : Look the Other Way. Ce que je dis par rapport à ça, c’est que souvent la vérité se trouve à l'opposé. Souvent, lorsqu'on travaille, spécifiquement dans une industrie, on regarde toujours dans la direction, dans la même lunette. C’est normal, parce qu’on est dans une industrie, nos collègues de travail regardent dans la même direction, nos compétiteurs regardent dans la même direction. Mais faites l’effort des fois juste d’arrêter un projet puis de dire : OK, faisons un 180, regardons voir ce qu’il y a à côté; si on faisait ça, ça donnerait quoi? Juste l’exercice de prendre le temps de regarder de l’autre côté, vous allez probablement trouver des solutions créatives qui peut être extrêmement intéressant pour votre entreprise. La majeure partie des entreprises qui ont du succès ont regardé à un moment de l’autre côté, que ça soit avec le Cirque du Soleil, où Guy s’est dit : bien, tout le monde fait des cirques avec des animaux, moi je vais faire du cirque avec des humains. RB&B, tout le monde dit : bon, moi je vais réinventer l’industrie de l’hôtellerie, on va offrir les maisons des gens. Uber : bon, le taxi est comme ça, nous autres, on va faire le taxi de l’autre ôté. Toutes les fois qu'on regarde de l'autre côté, c'est sûr qu'on va trouver une solution créative intéressante.
Ce qui est important quand on regarde de l'autre côté, on réalise que dans notre jardin on n’est pas obligé de seulement planter du blé d’Inde. Il y a peut-être un marché intéressant pour les zucchinis ou il y a peut-être un marché intéressant pour avoir une diversité puis avoir quelque chose de nouveau. Je suis convaincu que dans vos offres de service vous offrez des choses qu’on offre depuis plusieurs années, puis tranquillement pas vite on développe les modèles, les services, on offre autre chose qui complète l'offre de services. Souvent en droit je réalise que le droit c'est la meilleure partner de business qu’on peut avoir dans plein de dimensions, que ce soit au niveau du management, au niveau des acquisitions, au niveau des licences de développer de nouveaux marchés. C'est sûr que dans mon bateau, d'avoir un avocat c'est extrêmement important, mais c'est sûr que j'aimerais avoir un avocat qui a une vision qui est capable d'anticiper avec moi le futur. Donc, n’ayez pas peur des fois de regarder de l'autre côté, d'inspirer vos clients avec des idées des fois qui sont peut-être farfelues mais qui ont peut-être beaucoup de sens en bout de ligne.
No 7 : La peur et le doute. Pour moi, la peur et le doute, c’est deux choses qui vont de pair. Lorsqu’on arrive avec une nouvelle idée, souvent le doute va s’installer. Quelqu'un va exprimer une idée, puis la première réaction des collègues va être de dire : ah, non, ça ne se fait pas; ah, je ne pense pas que légalement t’es capable de faire ça; je ne pense pas qu’on a le budget; on ne s’est pas qualifié cette année de faire ça; non, je pense que ton idée… Ça, c’est la peur. Souvent, la création c’est une petite chose, puis la peur c’est gros comme ça à côté. C’est souvent la position que les gens prennent dans une entreprise pour des fois se valoriser, parce que c’est plus facile de critiquer que d'encourager. Alors, quand t'es dans une… on se rappelle des boardrooms, lorsque quelqu'un présentait une idée, bien, il y a toujours la première personne qui saute, c'est pour la détruire. Alors, faites attention à la peur, parce que la peur, ce que ça fait, c'est que ça nous paralyse. À un moment, ça coupe la créativité, ça coupe les projets, puis ça coupe notre anticipation versus le doute.
Le doute nous remet en question, puis ça commence toujours par nous-mêmes. Lorsqu'on a une idée ou on a un projet, c'est sain et c'est normal qu'on se mette à douter de ce qu’on fait. Si on doute, ça veut dire que c'est quelque chose d'unique, c'est quelque chose qui n’a jamais été fait. Le fait qu'on doute, bien, ça nous fait aller plus loin. Ce que je dis souvent, c'est que quand vous avez une idée puis vous doutez, prenez-la puis partagez-la. Allez voir quelqu’un, un collègue de travail, des gens, dites : qu’est-ce que tu penses de tout ça? On peut-tu s’en jaser? Puis qu’est-ce qui marche, qu’est-ce qui ne marche pas là-dedans selon toi? Toutes ces réactions-là vont vous aider à mieux travailler votre projet, votre idée, ce qui va faire en sorte qu'elle va être meilleure en bout de ligne. Donc, le doute fait grandir la création, mais la peur paralyse la création.
Souvent, la peur vient souvent aussi d'une culture financière. Je dis toujours : le danger dans une entreprise, surtout comme la nôtre, c’est d’avoir une culture créative et d'avoir une culture financière. C'est important d'avoir les deux. Pour moi, une culture financière et une culture créative doivent aller de pair. J'appelle ça le suit and clown, si on peut dire. Les clowns sont des créatifs, puis les suits sont les gens d’affaires. Mais ça doit travailler ensemble. Ce qui ne marche pas, c'est quand il y a une culture financière qui étouffe la création. Dans ce temps-là, si on regarde, on a le red mind, on regarde seulement le bottom line, on regarde nos chiffres, puis on n’est pas capable de s’élever pour aller faire quelque chose de plus grand. Huitième…
No 8 : Les petites fleurs. Les petites fleurs dans son jardin. Pour moi, les fleurs sont les idées. C'est la création. C'est quand quelqu'un a une idée. Vous devez tout arrêter. Vous devez arrêter, prendre le temps d'écouter l’idée. Moi, quand j'étais dans mon bureau en plein milieu de l'agence, souvent les gens rentraient dans mon bureau puis ils disaient : hé, Phil, as-tu deux minutes, je veux te montrer quelque chose. J’arrêtais tout. Il n’était pas question de dire : excuse-moi, j’étais sur un meeting, je te reviens. Quand quelqu’un voulait me parler d’une idée, je lâchais mon ordinateur, je me déplaçais au bout du bureau, je me mettais au coin, kitty corner, puis j’écoutais la personne. Je prenais le temps d’écouter son idée, parce que des fois ces petites fleurs-là sont souvent très, très fragiles et on a tendance souvent à piler dessus. On marche dans le jardin, on ne s’en rend pas trop compte, on pile sur toutes les bonnes idées au travers de notre jardin, ce qui fait qu'un jour notre groupe n’a plus le goût de pousser. On n’a plus le goût d’avoir des idées, parce qu’on sait qu’anyway on va se faire piler dessus. À l’inverse, si vous prenez ces petites fleurs-là, vous les entourez, vous leur parlez un petit peu tous les jours, vous mettez de l’eau, vous leur portez attention, vous êtes généreux avec ces petites fleurs-là, vous allez voir que ces petites idées-là vont grandir à l’intérieur de votre business. Mais encore là, c’est de l’attention que vous devez donner. C’est de l’écoute, puis d’être vraiment actif par rapport à ça.
Alors, comme je dis toujours, les projets, les idées, ça demande vraiment une attention quotidienne jusqu'au jour où ils deviennent grands, qu’ils puissent prendre un envol. Vous allez voir que si vous y mettez un petit peu, tous les jours, vous allez voir, la créativité va grandir à l’intérieur de votre entreprise. Neuvième…
No 9 : Mix is Good. Il faut mélanger les choses. Mélanger dans son jardin, c'est ce qui amène la diversité. Ce qui est arrivé à un moment donné chez Sid Lee, c’est qu’on s’est mis à avoir du succès, à grandir, puis j’avais de la misère à aller embaucher du talent, du bon monde. C’est sûr qu'il y a des écoles au Québec et à Montréal qui sont… les universités souvent font des profils et ils ne sont peut-être pas adaptés au marché et aux besoins du marché. Ça fait qu’à un moment donné je me suis mis à me promener dans les écoles un peu partout à travers la planète puis essayer d'aller recruter le meilleur talent. C'est là que lorsque je suis revenu chez nous, je me suis dit : suis-je fou de prendre l'avion toutes les fois pour essayer de découvrir les talents? Je ferais peut-être mieux de les créer moi-même et de les bâtir. C’est pour ça qu'on a décidé de bâtir l'école La Factrie. On s'est dit que la compétence créative c'est la chose la plus importante dans nos entrepreneurs, puis on espère que le Québec de demain sera créatif. Je me suis dit : pourquoi on ne peut pas les former créativement, ces gens-là? Non seulement les former, mais mixer les disciplines, faire en sorte que les problèmes de demain sont tellement grands qu’on ne peut pas seulement résoudre un problème avec notre espèce, il faut les mixer avec d’autres espèces.
Alors, dans mon jardin, ce que je fais, je mélange des disciplines. Qu’est-ce qui arrive quand je prends un designer avec un ingénieur ou un architecte ou un motion designer ou un rédacteur? Qu'est-ce qui arrive quand je prends un rédacteur qui vient du sud des États Unis avec un directeur artistique du Brésil? Qu'est-ce qui arrive dans tout ça? Toutes les saveurs, les cultures se mélangent, puis c’est là qu’il y a vraiment du bon travail qui sort. Donc, tout le travail de Sid Lee vient beaucoup de la multidisciplinarité du travail, mais la magie se passe entre les deux. Je dis toujours que la magie c’est comme des espèces qui ne sont pas supposées d’aller ensemble; tu les mets ensemble, puis c'est génial. Lorsqu'on a légalisé le pot, la marijuana au Québec, je me rappelle, j’avais fait un atelier de travail avec les YPO. Je les avais fait travailler sur le mandat de légaliser ça et je leur avais dit : bâtissez-moi une équipe de travail pour être capable de légaliser la marijuana au Québec. C’est drôle parce que tout le monde dans l'équipe de travail avait le droit de pas plus que six personnes. Tout le monde, c'est sûr, bien, on mettait des avocats parce qu’il y a des gros enjeux légaux, on mettait des gens des services sociaux, probablement aussi de la médecine. À un moment donné, je regardais ça, puis je dis : vous n’avez jamais pensé à inviter quelqu'un du crime organisé, comme un Hell’s Angel ou un revendeur sur le coin de la rue pour en apprendre un peu plus sur comment ça se passe ces choses-là? Tout le monde était surpris. Mais c'est ça, être capable de mixer des choses qui n’ont pas rapport ensemble, des fois ça crée de la lumière puis c'est bon pour avancer.
No 10 : De toujours jouer. Pour moi, la notion de jouer et avoir du plaisir, comme Delphine disait en entrée, je crois qu'on est capable de bâtir de grandes choses avec du plaisir, avec de l'amour. On est capable de réaliser des grands projets en s'amusant. Si on travaille dans le stress, dans le noir, dans toujours la peur, ce n'est pas comme ça qu'on va être capable de réaliser des grandes choses. Pour être capable de jouer comme on était des jeunes enfants, quand j'étais jeune je m'installais dans la cave chez nous, je vidais ma grosse boîte de Lego, puis je m’amusais pendant des heures à créer des choses, à bâtir des camions, des maisons. Des fois, je partais et mon intention était de bâtir une auto de course, mais finalement ça finissait en autohélicoptère. Je n'étais pas trop sûr, puis là je me suis dit : ah, bien, ça serait peut-être le fun de bâtir un garage pour mettre ça dedans, mais finalement ça finissait dans une tour. Alors, toute cette notion du chaos, de jouer, n’ayez pas peur d’embrasser ça dans votre culture d’entreprise parce que c’est comme ça que les accidents arrivent, avec du plaisir. Souvent, les grandes choses ont été créées justement par le plaisir de jouer, d’être capable de se donner au chaos. Puis laissez les choses arriver. Après ça, on va les organiser, c'est normal. Mais il ne faut pas avoir peur de ça, parce que souvent dans une entreprise le fait de jouer, de rigoler, de déconner comme on dit, c'est mal vu, mais c'est à l'inverse. Il faut avoir ces moments-là, c’est une soupape, c’est bon pour la créativité, puis il faut les encourager. On a appris ça, nous autres, dès le début, lorsqu'on était à l'école. Moi, je suis parti de ma cave avec mes Lego, puis je suis rentré au primaire, tous les bureaux cordés avec le professeur en avant, il n’y avait rien de fun là-dedans. C’était la performance, il fallait étudier tout le temps. Moi, j’avais énormément de misère à apprendre dans ce contexte-là, parce que j'avais un déficit d’attention, je suis dyslexique, je mélange des choses. Ça ne pouvait pas marcher. On m’a éteint de fun. On éteint la curiosité des gens, alors qu’il ne faut pas faire ça. Dans une entreprise, ne faites pas comment vous avez appris à l'école. À l'inverse, allumez la créativité, allumez la curiosité, laissez les gens s’amuser, laissez le chaos rentrer pour mieux l’organiser par la suite puis d'avoir un projet très, très, très clair. Je finis toujours avec ça, qu’on peut atteindre de grandes choses avec du fun et de l'amour, et je le crois fortement.
Il nous reste, je crois, 15 minutes. Je sais qu’il va y avoir des périodes de questions, mais je veux absolument vous parler du créneau de création de chez Sid Lee, parce que pour moi avoir un créneau de création, c'est organiser le chaos. À un moment donné, j’ai arrêté… ça faisait 25 ans qu’on faisait du travail, je me suis enfermé dans une grande pièce, j'ai regardé les choses qu'on faisait, puis je me disais : qu'est-ce qui est unique dans ce qu’on fait? Qu'est-ce que je peux créer pour aider les gens à organiser le chaos puis avoir vraiment une bonne paire de lunettes pour que tout le monde puisse penser pareil? Puis je suis tombé sur ce que j'ai appelé le créneau de création de Sid Lee. C’est une paire de lunettes, en fait, pour regarder le travail pour être capable d’anticiper le futur. Je vous le partage rapidement.
Il y a quatre piliers dans mon créneau de création : 1) le contexte, 2) le deuxième, briser les règles, 3) comment on est capable d'amener de l’art, de l’émotion dans le travail, dans tout ce qu'on fait, 4) comment ça peut devenir un influenceur dans la culture du projet.
La première chose, c’est le contexte. Lorsque j'ai le chaos de création devant moi, la première question que je pose : quel est le contexte dans quoi on vit? Si on a une idée, l’idée pourrait être excellente, mais si elle n’est pas placée dans un bon contexte, elle peut être désastreuse ou, à l’inverse, des fois une idée dans un mauvais contexte, ou des fois le contexte peut influencer l’idée. Donc, posez-vous toujours c’est quoi le contexte dans lequel votre projet, vos idées vont prendre vie, vont prendre forme. Vous arrêtez puis vous posez le contexte. En fait, vous posez la question.
Par la suite, une fois que vous avez le projet, vous avez le chaos devant vous, vous avez une idée, prenez le temps de regarder ça puis dire : qu’est-ce qu’on peut faire avec cette idée-là pour changer une chose? Le format, le langage, la distribution, le modèle d’affaires, le modèle économique. Est-ce que je peux changer une chose là-dedans pour faire la différence? Je vous donne un exemple niaiseux. Lorsque Steve Jobs a sorti l’iPod, bien, les écouteurs, à la place des mettre noirs, il les a mis blancs. Pourquoi blancs? Ceux qui ont lu le livre, vous avez compris pourquoi. Pour lui, le fait d’avoir du blanc, les gens marchaient sur la rue, puis les gens pouvaient voir qu’il a des écouteurs Apple. Ce n’était pas des écouteurs Sony ou un écouteur Samsung noir. C’était un écouteur Apple. Donc, il a brisé une chose, qui était la couleur.
Le troisième, c'est le art factor. Le art factor, pour moi, j'ai appris ça en travaillant beaucoup avec le Cirque, d’être capable d’élever des projets de façon émotionnelle. Lorsqu’on tombe dans un niveau émotionnel dans un projet, humainement les gens sont engagés, les gens embarquent de façon normale. Je vous donne un exemple. Si demain matin vous embarquez l’intelligence artificielle ou la robotisation dans vos business, essayez d’y mettre un contexte où les gens vont sentir une dimension humaine à l'intérieur de ça. Posez-vous la question : dans tout ce qu'on fait, dans toute la technologie, dans tous les changements qu'on fait, c'est quoi la dimension humaine que je peux mettre à l'intérieur de ça? C'est sûr que c'est le fun d'avoir un système automatisé de répondeur dans nos bureaux qui dit : bienvenue à tel bureau, pesez sur le 1, pesez sur le 2, mais posez-vous la question : peut-être que ça valait la peine d’avoir un humain qui répond encore au téléphone qui vous achemine à des services par la suite.
Après ça, c’est comment on peut bâtir une culture alentour de ça. Si vous faites du changement à l'intérieur d’une business, une entreprise, assurez-vous que les gens embarquent dans votre projet, dans les valeurs pour qu’à un moment donné ça devienne culturel puis ça bâtir la culture alentour de ça. Quand je dis bâtir une culture, des fois ça peut être seulement d’avoir les bons leaders. Je dis tout le temps : la première chose que vous avez à faire quand vous lancez un projet, faites un gâteau, faites un party. C’est ça qui est important. Les gens veulent embarquer là-dedans. Si demain matin vous rentrez un projet de ARP ou vous rentrez un projet de robotisation dans une entreprise, mettez une dimension humaine, faites de la culture, faites un party, faites quelque chose que les gens puissent se l’appartenir puis le transporter.
J'ai roulé vite dans mon créneau, parce que je voulais laisser de la place pour les questions. Alors, je vais arrêter de partager mon écran, parce que j'aimerais savoir vos gentils minois à l'intérieur de tout ça pour qu'on soit capable de se jaser un tout petit peu. Alors, je suis prêt à vos questions. Vous pouvez lever la main, vous pouvez poser des questions dans le chat room si vous voulez, c’est comme bon vous semble. < Philippe lit à l’écran > Ah merci, vous êtes gentils. <Philippe lit à l’écran>. La permaculture, oui. Mais est-ce que vous avez des enjeux, des choses, des défis que vous avez présentement? <pause> Là, je suis déçu parce que vous n’avez pas beaucoup de questions. Ça, ce n’est pas bon.
Période de questions
Delphine Robert :
Je vais poser une question, Philippe.
Philippe Meunier :
C’est bon, vas-y.
Delphine Robert :
Bon, déjà, merci. C’est toujours très inspirant de t’écouter. Je suis un petit peu curieuse de savoir comment vous vous êtes ajustés chez Sid Lee avec le télétravail et le fait de ne plus se voir en personne. Ce que je retiens dans tout ce que tu as présenté, c’est qu’il y a l’aspect humain, les échanges sont au cœur de tout ce que vous faites. Donc, comment ça se passe et comment vous avez géré ça?
Philippe Meunier :
C’est sûr que le changement du télétravail, on était déjà très fort au niveau de la technologie parce qu’on a quand même huit bureaux à travers la planète, alors on se parle souvent sur la plateforme Zoom. Pour nous, Zoom, c’est déjà dans notre quotidien. Partager des documents, que ce soit sur des plateformes comme Google Slides ou Keynote Collab ces choses-là, toute cette partie existait déjà. Ce qui a été difficile, c’est que les gens se manquaient. Humainement, les gens avaient le goût de se voir. Parce que souvent dans un projet, on se ramasse dans un espace, on a de la créativité, on met des choses sur les murs, puis à un moment donné il y a un non-senti qui se passe. On est capable de venir sentir les idées, puis on est capable après ça de les relancer et de les retravailler. Ça, ça nous manque beaucoup. C’est sûr qu’on est beaucoup plus efficace, mais on manque cette magie. On est en train de repenser nos bureaux de Place Ville-Marie, parce que vous savez qu’on va être en bas à Place Ville-Marie. On ne sera plus dans les ascenseurs en haut pour déranger tout le monde avec nos lunch. On essaie de repenser nos espaces de bureau pour être capable d’avoir des espaces où les gens peuvent venir collaborer à distance, un petit groupe, pour être capable de sentir ça.
Je crois qu’on est capable de bâtir quand même une culture d’entreprise à distance. Je crois que ça se fait, mais c’est difficile lorsqu’on a une culture d’entreprise qui date de 28 ans. Après ça, tomber là-dessus, c’est sûr que c’est difficile et ça nous manque beaucoup. Je pense qu’il y a des façons de faire, on est capable de s’en sortir et de quand même bien travailler. Faire de petits Zoom, c’est la clé. Pas des grands Zoom.
Delphine Robert :
Effectivement. On a une question. Je vais peut-être te laisser la lire.
Philippe Meunier :
Oui. Ah, bien oui, c’est ça, le problème du boss en haut.
Delphine Robert :
Q1. Comment appliquer toute cette philosophie quand notre supérieur est plutôt conventionnel dans son approche?
Philippe Meunier :
R1. C’est sûr qu’il y a beaucoup de gens qui sont conventionnels, c’est vrai. Moi, ma meilleure chose, c’est de l’inviter dans votre party. Invitez les personnes qui sont les plus réfractaires à vos idées à participer aux idées. Laissez-leur de la place, le confort. Souvent, ces gens-là sont des gens très, très créatifs et elles aiment se faire stimuler intellectuellement. Souvent, elles se sentent mal à l’aise, mais si tu leur donnes un contexte dans lequel on les invite, ne faites pas des présentations, ne faites pas des « Ah, là, il faut présenter au grand boss ». Ne faites pas ça. Ayez des petites rencontres quotidiennes. Faites des invitations. Encouragez-les. Si cette personne a une bonne idée, dites-lui que c’est une bonne idée si c’est une bonne idée. Si ce n’est pas une bonne idée, il faut dire que ce n’est pas une bonne idée. C’est important vraiment de les rapprocher. Je dis toujours : en création, closer to your ennemy. C’est très important. C’est arrivé souvent, nous, où il y avait des clients qui étaient réfractaires. Toutes les fois que les créatifs rentraient dans le meeting et qui étaient stressés, je disais faites l’inverse, invitez les clients à l’agence le matin, on prend un petit café, puis vous ne leur dites pas que c’est une présentation. Vous les invitez, vous mettez tout le travail sur le mur, les petits cafés et les croissants, puis vous leur dites : bon, on en jase aujourd’hui, dites-vous ce que vous en pensez. Ne vendez pas l’affaire. Il ne faut pas vendre la patente. Il faut se mettre dedans. Je ne sais pas si ça peut vous aider.
Philippe Meunier :
Q2. Est-ce toujours nécessaire de créer une culture d’entreprise, surtout pour des avocats qui travaillent seuls?
Philippe Meunier :
R2. Je pense que c’est important de créer une culture d’entreprise lorsqu’on est en groupe. Lorsqu’on est seul comme travailleur autonome, je pense qu’on peut se cultiver aussi une façon de faire. Je pense que vous allez être des meilleurs avocats, des meilleurs partenaires d’affaires si vous avez une approche qui est unique. Même si vous êtes seul dans votre business, ayez une approche unique, une façon que vous amenez votre intelligence, votre service de façon unique qui va faire en sorte que votre client va se dire : ah, bien, moi je ne peux pas me passer de Philippe ou je ne peux pas me passer de telle personne, parce que c’est unique la manière qu’il travaille. Je pense que c’est important de se poser la question là-dessus. Souvent, on oublie ce petit détail, ce qui va faire en sorte que les gens, oui, vous achètent pour votre compétence et votre service, mais les gens vous achètent aussi en tant qu’humain, en tant que personne aussi pour vous faire confiance, parce que c’est très, très important.
<Philippe lit à l’écran>
Q3. Est-ce que c’est bon d’entretenir le doute sur fond de question?
R3. Oui, ça, c’est une super bonne question de la part de Christian. Est-ce que c’est bon d’entretenir le doute sous forme de questions? C’est très bon, parce qu’une conversation dans une présentation, la personne qui vous présente quelque chose n’a pas la science infuse et n’est pas au bout de la solution. Ce qui est important lorsqu’on a une bonne idée sur la table, on pose une question puis des fois c’est pour différents angles, soit comment on va la réaliser, comment on va la financer, comment on va approcher telle technologie ou trouver un partenaire. Je pense que c’est important de poser des questions sur la question. Quand on pose une question sur la question, ça fonctionne toujours. C’est comme dans un coquetel, puis je suis convaincu que Pierre Pilote serait le champion de ça. Dans un coquetel, si tu rencontres des gens, quelqu’un de nouveau, tu poses une question à la personne et elle te répond et tu reposes une question sur sa réponse, vous allez roulez comme ça pendant 20 minutes. Au bout de 20 minutes du coquetel, ils vont dire : hé, il est donc fin, Pierre, han! Quel gars extraordinaire! C’est qu’ils n’ont pas réalisé qu’ils ont parlé d’eux-mêmes pendant 20 minutes et que, vous, vous avez seulement stimulé des conversations à travers de ça. Ça fait que, oui, c’est important de poser des questions là-dessus.
Après ça. Il n’y a plus d’autres questions. Bon. Alors, si vous n’avez pas d’autres questions, je pense que notre temps… Il nous reste quatre minutes environ?
Delphine Robert :
Oui. On est pas mal dans le timing. C’est parfait.
Philippe Meunier :
En fait, j’ai une question pour vous. Vous pouvez me répondre par texte ou par caméra.
Est-ce que vous sentez que votre industrie est à risque, présentement?
Delphine Robert :
Est-ce que tu veux parler de l’industrie des services juridiques ou d’industrie des participants?
Philippe Meunier :
L’industrie des services juridiques. Est-ce que vous trouvez que… Est-ce qu’on est à risque via l’intelligence artificielle? Est-ce qu’on est à risque via d’autres services qui pourraient devenir des commodités? Est-ce que vous pensez que les banques pourraient offrir les services juridiques à leurs employés? Est-ce que vous pensez que le data pourrait être un endroit intéressant pour vous?
Marc Tremblay :
Mon nom est Marc Tremblay.
Philippe Meunier :
Oui, bonjour, Marc.
Marc Tremblay :
Je ne veux pas parler pour les autres, mais je pense que la plupart des gens sont d’avis que, oui, notre profession est certainement en évolution. Vous pouvez voir ça comme une menace ou comme une opportunité. Donc, la gestion de risque de ce côté-là, c’est plus ça. Je pense que c’est clair qu’on est en évolution. Vous l’avez dit, l’intelligence artificielle amène certains… encore aujourd’hui c’est encore petit, mais ça va aller en croissant. Il y a beaucoup de choses qui étaient des commodités qui vont devenir, qui vont s’accroître, ça va devenir de plus en plus le cas et que ça va faire évoluer la profession, c’est certain. Moi, je suis d’avis, puis mon opinion est un peu controversée là-dessus, mais moi, il y a vingt et quelques années, quand j’étais étudiant, on faisait des recherches manuelles dans le Canadian Abridgement, bref des outils techniques. Dans des affaires très manuelles qu’aujourd’hui sont faites. Pourtant à l’époque, au bureau où j’étais, on était 25 stagiaires. Aujourd’hui, il y a autant de stagiaires. Ç’a juste évolué, parce qu’avant, quand on était en litige, moi j’étais en litige dans ma première vie, les cahiers d’autorité, on faisait ça le soir parce que, bon, on arrivait au bureau puis on avait des petites fiches, microfiches, ce n’est pas croyable. C’était des photocopies mais peu importe, alors qu’aujourd’hui c’est informatisé. On s’attend maintenant à avoir des recherches le lendemain qui vont aller chercher la jurisprudence américaine, française. Alors, tout est poussé. C’est une arme, c’est une compétition… Par exemple, en litige, c’est une arme, c’est une guerre entre deux armées. Donc, une fois que l’autre armée a un missile, t’en veux un aussi. Puis, effectivement, ça fait en sorte qu’il y a autant de travail. Le travail est différent, mais dans le cas du litige, ça évolue. Tandis qu’en droit des affaires, par exemple – je vais finir là-dessus, c’est un sujet qui me passionne – il va y avoir des choses comme produire un contrat de base est déjà beaucoup plus facile qu’il y a 10 ans. Mais maintenant, on va focaliser beaucoup plus sur la communication du risque, comme scaler l’allocation, la contextualiser, puis rapidement faire comprendre au client c’est quoi ses alternatives. Alors qu’aujourd’hui, historiquement, beaucoup de contrats étaient rédigés avec une perspective de précédents. Ç’a été fait comme ça, on va le faire comme ça. C’est un peu anecdotique comme pratique, alors qu’aujourd’hui elle va devenir beaucoup plus fact-based approach. Donc, un peu plus basée sur des analyses plus fines et plus sophistiquées qui vont amener beaucoup plus de valeur au client, mais qui vont nécessiter beaucoup de travail aussi, mais un autre type de travail.
On a seulement posé une petite question simple, on pourrait jaser longtemps là-dessus, mais je vois dans le chat room qu’il y a différents secteurs. Tous les secteurs vont subir un changement, que ce soit un changement économique ou un changement technologique. Je pense que la créativité d’innovation va toujours être un avantage concurrentiel dans tout ça. Je pense que vous avez toutes les chances du monde de votre côté. On parle des stagiaires. Avant on avait 25 stagiaires qui faisaient de l’entrée de données ou de la rechercher. Aujourd’hui, on a encore probablement 25 stagiaires mais pour faire autre chose, pour aller plus loin, pour aller dans une autre aire de service. Alors, n’ayez pas peur de vous poser ces questions. Je vois que les gens disent : ah, la créativité, je pense que c’est quelque chose qui va nous aider. Je vous encourage à venir vous inscrire à La Factrie. On a des formations qui sont en ligne, d’autres qui sont en présentiel, mais pas pour tout de suite. Je vous invite à aller regarder ça, puis ça va vous aider probablement dans vos projets. Des fois, c’est une formation d’une journée et ça vous aide sur votre leadership responsable, ça vous aide sur le design thinking ou sur le storytelling aussi, comment on annonce ou on parle d’un projet, comment on communique nos dossiers à nos clients.
Je veux respecter le temps, j’ai débordé d’une minute. Ça me fait toujours plaisir, Delphine, de venir vous voir. C’est toujours agréable. Peut-être un jour il va y avoir une autre salle chez vous qui va être nommée, suite à nos ateliers de création. C’est toujours bien le fun et j’ai beaucoup de confiance en vous. Je vois plein de jeunes visages. Vous êtes la génération qui va tout changer ça. Alors, allez-y all in puis, je vous le dis, ça être incroyable. Le futur va être tellement bright qu’on va être obligé de porter des lunettes fumées. Je vous laisse là-dessus. Portez-vous bien et soyez en santé. Merci beaucoup. Salut.
Delphine Robert :
Merci, merci. Un grand merci, Philippe. C’était vraiment très, très intéressant. On est vraiment proche de la fin de l’événement. Nos conférenciers de la première partie sont là. Si jamais il y a des questions pour eux, des questions qui vous viennent maintenant, n’hésitez pas à les poser sur le chat, on a encore quelques minutes. Je veux simplement en profiter pendant ces dernières minutes pour remercier tous ceux qui nous ont aidés à préparer événement et évidemment nos conférenciers, modérateurs et modératrices dans les ateliers, toute l’équipe marketing de Gowling WLG qui a travaillé fort sur cette activité, notre équipe technique puisque tout s’est bien déroulé, pas d’interruption de service Zoom, donc on est vraiment très heureux. Merci à vous d’avoir pris le temps de rester avec nous tout au long de cette matinée. Vous allez recevoir dans les prochains jours une copie des présentations de ce matin et un court sondage de satisfaction. On est toujours curieux de savoir ce que vous avez pensé de ce qui a été dit ce matin, nous aider, comme l’a dit Philippe, à nous réinventer, à penser différemment. Donc, n’hésitez pas. Je vais céder rapidement la parole à Mylène ou Christian, qui veulent peut-être nous dire un dernier mot.
Christian Khoury :
Bon, d’accord. Bien, merci. Merci tout le monde pour la participation. Je pense que ç’a été un événement avec beaucoup de succès aujourd’hui, une grande participation de tout le monde. En tant que conseillers juridiques, vous avez des enjeux qui sont particuliers. Donc, on est là, l’ACC, pour vous aider pour préparer les formations, pour discuter et continuer en partageant. C’est un début de conversation qu’on a un peu aujourd’hui, mais je vous invite à vous impliquer davantage au sein de notre communauté juridique.
Delphine Robert :
Merci, Christian. Comme je vous l’avais dit au tout début, l’Atelier légal, c’était aujourd’hui sa première édition. C’est un rendez-vous qu’on veut rendre régulier et annuel dans tous les cas. On a hâte de vous retrouver pour la prochaine édition. Je ne crois pas qu’il y ait de questions pour nos conférenciers Alexandre, Benoît et Marc. Alors, je vais maintenant conclure l’événement. Je vous souhaite à tous une excellente journée et j’espère que vous êtes inspirés et que vous repartez avec à la fois des bons conseils juridiques et pratiques et également beaucoup d’inspiration dans votre façon de travail, votre façon d’être avec tout ce que nous a dit Philippe. Très certainement, j’ai pris toutes mes notes. Pas sur un Post-it parce que ça ne rentrait pas dans un Post-it, mais je vais garder ça toujours à proximité. Alors, merci encore. Merci au nom de Gowling WLG et de l’ACC Québec. Bonne fin de journée et à bientôt.