Alex Driver
Principal Associate
Article
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Si tout se déroule comme prévu, la Juridiction unifiée du brevet (JUB) ouvrira ses portes le 1er juin 2023. Comme les lecteurs le savent peut-être déjà, son fonctionnement sera régi par un certain nombre de règles de procédure (le Règlement de procédure de la Juridiction unifiée du brevet ou « Règlement »).
Nous avons résumé ci-dessous les principaux mécanismes et procédures accessibles devant la JUB.
La procédure devant la JUB consistera généralement en cinq étapes :
Les premières étapes de la procédure devraient être les plus significatives, puisque les conclusions écrites abordent en détails les faits et enjeux pertinents.
La procédure prévoit également la production et l'échange de rapports d'expertise, de déclarations de témoins et de rapports sur des expériences. Les demandes en ce sens devront probablement être adressées avant l'audience de mise en état, la Juridiction rendant ensuite les ordonnances appropriées.
En fonction de l'objet de la procédure et de l'existence d'une bifurcation de la procédure (voir notre précédent article sur la JUB pour en savoir plus), la procédure peut porter sur des questions à la fois de contrefaçon et de validité.
La Juridiction devrait jouer un rôle actif en favorisant un règlement amiable du litige tout au long de la procédure (comme l'illustrent la création du centre de médiation et d'arbitrage en matière de brevets de la JUB et l'étude par le juge-rapporteur, lors de la conférence de mise en état, de la possibilité de parvenir à un règlement). Il est toutefois possible que les parties privilégieront un règlement judiciaire du litige, comme c'est souvent le cas dans les procédures nationales.
Le vaste spectre des éléments de preuve admis devant la JUB comprendra :
De plus, les moyens suivants seront accessibles aux parties qui cherchent à obtenir des éléments de preuve supplémentaires :
Une partie produisant un énoncé des faits contestés ou susceptibles d'être contestés, par exemple des allégations de contrefaçon, doit mentionner les éléments de preuve permettant de le démontrer, ce qui constitue une règle importante. Les parties devront donc réfléchir en amont de la procédure à la manière exacte dont elles démontreront les faits sur lesquels elles se fondent.
Le vaste spectre des éléments de preuve accessibles semble offrir aux parties de nombreux moyens d'alimenter les dossiers (et de fournir les preuves étayant leurs demandes), en fonction du temps et des coûts potentiels. Nous pourrions observer des différences d'approches entre des parties et des conseils de nationalités différentes (naturellement mieux informés des procédures d'obtention de preuves accessibles sur leurs propres territoires).
Il ne devrait pas y avoir de processus formel de divulgation de documents dans le cadre de la procédure. Toutefois, la règle 190 dispose que :
« Lorsqu'une partie a présenté des éléments de preuve raisonnablement accessibles et plausibles pour étayer ses allégations et a mentionné des éléments de preuve à l'appui de ses allégations qui se trouvent sous le contrôle de la partie adverse ou d'un tiers, la Juridiction peut, sur requête motivée de la partie mentionnant ces éléments de preuve, ordonner à cette autre partie ou un tiers de produire ces éléments. »
Par conséquent, la « divulgation » de documents ne sera ordonnée que lorsqu'une partie fera état d'un élément de preuve qui se trouve en la seule possession de la partie adverse. La barre semble haute pour la partie qui sollicite cette divulgation car elle peut, dans certains cas, ne pas savoir quels documents existent et se trouvent en la possession de la partie adverse.
L'application des règles pourrait varier en fonction du pays dans lequel siège la division locale, du siège de la division centrale, et des juges qui la composent.
La Juridiction peut ordonner des mesures de conservation des éléments de preuve pertinents, notamment la saisie réelle des produits litigieux ou l'inspection de locaux.
Une demande doit être déposée auprès de la division devant laquelle le requérant a engagé l'action en contrefaçon ou, si la procédure n'a pas encore été engagée, devant laquelle le requérant souhaite engager l'action.
Le requérant peut demander les mesures de conservation des éléments de preuve sans entendre le défendeur dans le cas où tout délai risquerait de lui causer un dommage irréparable ou lorsqu'il y a un risque démontré de destruction ou d'indisponibilité des preuves.
Compte tenu du niveau de détail des règles portant sur la conservation des éléments de preuve, cette procédure devrait être utilisée plus souvent que son équivalent national l'est aujourd'hui au Royaume-Uni.
L'Accord relatif à la JUB prévoit que la confidentialité du secret des affaires, des données personnelles ou des informations confidentielles « peut » être maintenue. La Juridiction peut restreindre la collecte ou l'utilisation de ces informations, ou en limiter l'accès à certaines personnes. Cependant, ces droits ne sont pas automatiques et il semble que la Juridiction disposera d'une marge d'appréciation concernant le maintien de la confidentialité et les cas qui s'y rattachent.
Le Règlement prévoit spécifiquement la possibilité de protéger les informations confidentielles dans les cas suivants :
On ignore comment la Juridiction abordera la protection des informations confidentielles contenues dans des documents qui n'entrent pas dans les catégories indiquées ci-dessus, par exemple des avis d'expert portant sur la contrefaçon et la validité (dans ce cas, la partie qui cherche à préserver la confidentialité des documents doit adresser une demande à la Juridiction et l'étayer par des motifs précis).
Oui, la Juridiction pourra ordonner des mesures provisoires afin d'empêcher la poursuite de la contrefaçon réelle ou le commencement d'une contrefaçon imminente. Ce faisant, la Juridiction dispose d'une marge de manœuvre dans la prise en compte du dommage potentiel qui découlerait de l'octroi ou du rejet des mesures sollicitées. La Juridiction peut ordonner des mesures provisoires dans le cadre d'une procédure ex parte ou inter partes, dans le premier cas lorsque tout retard risquerait de causer un dommage irréparable au requérant ou lorsqu'il y a un risque démontré de destruction des preuves.
La procédure comprend une phase écrite (dans laquelle le requérant expose les mesures provisoires demandées et les raisons justifiant cette demande) et, à l'appréciation de la Juridiction, une procédure orale ultérieure dans laquelle sont entendues les parties le requérant seulement.
Le Règlement permet à la Juridiction de statuer sur une demande de mesures provisoires « immédiatement » à réception de cette demande (et sans audience) en cas d'extrême urgence. Dans ce cas, la demande peut être entendue par un juge unique.
Les mesures correctives disponibles sont essentiellement :
Le président devra tenir l'audience en une journée, bien qu'au vu des nombreux experts et témoins pouvant être entendus sur des questions potentiellement complexes, nous pensons que certaines affaires dureront inévitablement plus d'une journée.
La Juridiction doit tenir l'audience dans l'année qui suit le début de la procédure, et la décision au fond doit intervenir dans les six mois qui suivent l'audience. Les décisions relatives aux dommages-intérêts et aux frais peuvent intervenir au même moment que la décision sur le fond, ou « au plus vite » après elle.
La Juridiction peut suspendre une décision relative aux dommages-intérêts dans l'attente d'un appel. Ni le Règlement ni l'Accord relatif à la JUB ne prévoit de délai d'audience en appel.
Les États membres contractants peuvent désigner leur propre langue officielle comme langue de procédure devant une division locale ou régionale. Ils peuvent également désigner l'anglais, le français ou l'allemand (qui sont les langues officielles de l'OEB). Par ailleurs, et au cas par cas, les parties peuvent décider, ou la Juridiction peut ordonner, que la langue employée soit celle dans laquelle le brevet a été délivré (français, allemand ou anglais).
Devant la division centrale, la langue de procédure sera celle dans laquelle le brevet concerné a été délivré.
La langue devant la Cour d'appel sera celle employée devant le Tribunal de première instance ou celle du brevet (sur accord des parties), hors circonstances exceptionnelles.
Le Règlement a clairement été rédigé de manière à permettre une certaine souplesse, notamment en fonction des affaires et du nombre de points à traiter. Par exemple, tous les types d'éléments de preuve admis ne seront pas pertinents dans toutes les affaires.
Ce n'est peut-être pas une surprise car, pour l'essentiel, le Règlement est le résultat d'une coopération transfrontalière entre praticiens et parties prenantes (notamment au Royaume-Uni) œuvrant sur des bases stables et fructueuses.
En développant sa jurisprudence, il est probable que la Juridiction gardera à l'esprit les conditions dans lesquelles ces règles ont été mise en œuvre (et leurs effets) dans d'autres juridictions. Nous encourageons donc les usagers de ce système à s'informer de ces pratiques nationales.
Notre équipe IP se tient à votre disposition concernant la JUB, ses règles et ses procédures. Vous trouverez notamment sur notre portail relatif à la JUB des informations et un guide concernant la JUB, sa structure, et les procédures de dérogation.
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