Nicolas Cayouette
Associé
Article
Le 9 mai 2024, les ministres Geneviève Guilbault, ministre des Transports et de la Mobilité durable, et Jonatan Julien, ministre responsable des Infrastructures et ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale, ont déposé deux importants projets de loi qui viendraient substantiellement changer le droit au Québec concernant le mode d'octroi des contrats pour la réalisation de projets majeurs d'infrastructure publique. En effet, la ministre Guilbault a déposé le projet de loi no 61, la Loi édictant la Loi sur Mobilité Infra Québec et modifiant certaines dispositions relatives au transport collectif (« PL-61 ») et, pour sa part, le ministre Julien a déposé le projet de loi no 62, la Loi visant principalement à diversifier les stratégies d'acquisition des organismes publics et à leur offrir davantage d'agilité dans la réalisation de leurs projets d'infrastructure (« PL-62 »). Ces deux projets de loi sont susceptibles d'avoir des impacts majeurs sur les divers processus d'attribution des projets complexes de bâtiments institutionnels et d'infrastructures liées au transport.
Les principaux changements envisagés par le PL-61 sont les suivants :
Les principaux changements envisagés par le PL-62 visant les projets majeurs d'infrastructure publique sont les suivants :
Les changements législatifs envisagés par ces projets de loi s'inscrivent dans le cadre de la Stratégie québécoise en infrastructures publiques et vont de pair avec ceux introduits dans le projet de loi no 51 visant à moderniser l'industrie de la construction[17], déposé à l'hiver 2024 et présentement à l'étude[18].
Depuis l'apparition des modes alternatifs de réalisation de projet au Canada, incluant au Québec, au début des années 2000, les modes de réalisation se sont raffinés en fonction des projets réalisés. L'approche plus complète des projets de conception, construction, financement, exploitation et entretien (« CCFEE » ou « PPP ») a cédé le pas dans plusieurs circonstances à des projets en mode alternatif de conception-construction (« CC ») ou de conception-construction-financement (« CCF »), auxquels les composantes d'exploitation et d'entretien peuvent être incorporées.
Au cours des dernières années, le gouvernement du Québec a Pour sa part, expérimenté divers types de contrats en mode dit « alternatif » comme les contrats de type CC et CCF en vue de combler certaines lacunes du mode dit « conventionnel », notamment par le biais des Transports et de la Mobilité durable et de la Société québécoise des infrastructures. Maintenant, la tendance du marché nord-américain est de développer le mode dit « collaboratif » ou en « partenariat » pour certains projets complexes impliquant des risques plus élevés. Afin de bien cerner les changements proposés à la LCOP et aux autres lois, il importe de détailler les nuances et les distinctions entre les différents types de contrats, à savoir :
Il importe de noter que tous ces modes doivent être vus comme des outils qui peuvent être utilisés selon leurs forces respectives et selon la nature du projet. Ainsi, les contrats en mode alternatif et en partenariat visent normalement les projets plus complexes et des risques moins bien définis ou difficiles à déterminer.
Depuis le milieu des années 2000, divers projets routiers importants ont été réalisés par le biais de ces modes alternatifs, notamment les projets de parachèvement de l'Autoroute 30 et de l'Autoroute 25 (les deux en PPP), les projets de reconstruction de l'échangeur Turcot et du Pont de l'Île-d'Orléans (les deux en CC) ainsi que les projets de réfection du Tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine et de reconstruction du pont de l'Île-aux-Tourtes (les deux en CCF). La Société québécoise des infrastructures a aussi procédé à des projets pilotes similaires, notamment pour des écoles secondaires, des hôpitaux, des centres de détention, des centres d'entretien et de maintenance et des maisons des aînés.
Parmi les raisons expliquant cette évolution dans les divers modes de réalisation, mentionnons par exemple l'envergure ou la complexité de certains projets, des difficultés particulières sur le plan technique ou sur celui du financement. Ces différents facteurs expliquent que les consortiums favorisent les projets de taille raisonnable et comportant un meilleur partage de risques.
Toutefois, les représentants du gouvernement ont indiqué avoir constaté que certains de ces modes de réalisation présentent des limites ou n'atteignent pas les objectifs recherchés, surtout en matière de compétitivité, de coût et d'échéancier. Ainsi, l'objectif du gouvernement avec les PL-61 et PL-62 est de tenter de limiter les dépassements de coûts, d'accélérer la réalisation des projets, de rendre les grands projets au Québec plus attrayants et d'augmenter la compétitivité lors des processus d'appel d'offres. L'approche présentée par la ministre des Transports et le ministre des Infrastructures, soit de créer une agence des transports nommée Mobilité Infra Québec, et de diversifier les stratégies d'acquisition pour les organismes publics et de leur offrir une plus grande agilité, s'insère dans une tentative d'atteindre ces objectifs.
Actuellement, le PL-61 et le PL-62 ont été déposés à l'Assemblée nationale et devront faire l'objet d'une étude détaillée avant d'être possiblement adoptés par l'Assemblée nationale. Nous verrons à vous tenir informés du cheminement de ces projets de loi au cours des prochains mois.
Pour plus d'information au sujet du PL-61 ou du PL-62 et toute assistance plus générale concernant le droit de la construction et des infrastructures, nous vous invitons à communiquer avec les membres de l'équipe Infrastructures de Gowling WLG.
[1] Loi édictant la Loi sur Mobilité Infra Québec et modifiant certaines dispositions relatives au transport collectif, projet de loi no 61 (présentation - 9 mai 2024), 1re sess., 43e légis. (Qc), art. 1, 68.
[2] Id, art. 4 al. 1.
[3] Id, art. 4 al. 4.
[4] Id, art. 6.
[5] Ces pouvoirs sont notamment :
[6] Le contrôle est exercé soit en ayant 50 % des droits de vote d'une personne morale, 50 % des parts d'une société de personnes ou en ayant le contrôle du commandité d'une société en commandite, tel qu'applicable. Voir art. 10, PL-61.
[7] Id, art. 9.
[8] Id, art. 25.
[9] RLRQ, c. C-65.1
[10] En l'occurrence, le ministère des Transports, la Société québécoise des infrastructures ou tout autre organisme public dans la mesure où le ministre responsable de ce dernier l'y autorise. Voir art. 4 (2) et (3) du PL-62.
[11] Loi visant principalement à diversifier les stratégies d'acquisition des organismes publics et à leur offrir davantage d'agilité dans la réalisation de leurs projets d'infrastructure, projet de loi no 62 (présentation - 9 mai 2024), 1re sess., 43e légis. (Qc), art. 1.
[12] Id, art. 1.
[13] Id, art. 1.
[14] Id, art. 1.
[15] Id, art. 4 (1), 18.
[16] Ces assouplissements viseraient entre autres :
[17] Loi modernisant l'industrie de la construction, projet de loi no 51 (étude détaillée - 8 mai 2024) 1re sess., 43 légis. (Qc).
CECI NE CONSTITUE PAS UN AVIS JURIDIQUE. L'information qui est présentée dans le site Web sous quelque forme que ce soit est fournie à titre informatif uniquement. Elle ne constitue pas un avis juridique et ne devrait pas être interprétée comme tel. Aucun utilisateur ne devrait prendre ou négliger de prendre des décisions en se fiant uniquement à ces renseignements, ni ignorer les conseils juridiques d'un professionnel ou tarder à consulter un professionnel sur la base de ce qu'il a lu dans ce site Web. Les professionnels de Gowling WLG seront heureux de discuter avec l'utilisateur des différentes options possibles concernant certaines questions juridiques précises.