Les clauses de moralité à l'ère des scandales dans les médias sociaux : ce que les entreprises doivent savoir

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13 janvier 2022

La clause de moralité, cette disposition contractuelle exigeant qu'une partie se conforme à certaines règles en matière de comportement, est depuis longtemps intégrée dans les ententes de porte-parole et de représentation. Pourtant, en cette ère de « cancel culture », de #MeToo et de marketing d'influence, la clause de moralité est devenue une priorité pour les entreprises lorsqu'elles retiennent les services d'une personne qui sera le visage public de leur marque.



Le comportement des personnes qui représentent une marque sera perçu, sans aucun doute, comme la représentation des valeurs, des convictions et de la philosophie de la marque elle-même. Il est donc essentiel pour une entreprise de s'assurer que le comportement public de ses partenaires correspond à l'image qu'elle veut projeter pour sa marque. Si un représentant de la marque se retrouve au cœur d'un scandale ou d'une controverse, ou si l'opinion publique devient négative à son égard, cela peut engendrer un risque important pour la marque.

Afin de se protéger contre ce risque, les entreprises incluent généralement une clause de moralité dans les ententes conclues avec les représentants de leur marque. En général, cette clause stipule que l'entreprise peut mettre fin à l'entente et être indemnisée pour certains dommages subis à la suite d'actions immorales, illégales ou autrement répréhensibles. Naturellement, ces clauses constituent un outil essentiel pour l'entreprise qui souhaite conserver le contrôle de l'image publique de sa marque. Une clause de moralité bien rédigée permet une relation plus sûre entre la marque et son représentant, mais la rédaction de ce type de clause est de plus en plus complexe en raison de la diversité des circonstances qu'elle peut couvrir.

Au moment de rédiger une clause de moralité, une entreprise devra se poser les questions clés suivantes :

  • Quels comportements ou quelles circonstances doivent déclencher l'application de la clause? À l'origine, les clauses de moralité étaient souvent destinées à entrer en jeu en cas d'accusations criminelles, mais elles couvrent désormais de plus en plus de situations dont la portée est beaucoup plus large. De nombreux exemples récents illustrent qu'un comportement ne doit pas forcément être criminel pour porter atteinte de manière significative à la marque d'une société. Dans certains cas, les clauses de moralité peuvent être adaptées au représentant de la marque en question ou prendre en compte une collectivité particulière, le public cible ou la clientèle de la marque.
  • La clause sera-t-elle déclenchée uniquement par le comportement réel de la personne, ou bien aussi par des allégations d'un tel comportement? Plusieurs incidents récents ont démontré que la croyance répandue du public en des allégations de conduite répréhensible (y compris l'inconduite sexuelle) a causé des dommages importants à la réputation des personnes visées. L'opinion publique est cruciale en matière de réputation d'une marque.
  • La clause sera-t-elle déclenchée uniquement par les actions d'une personne, ou risque-t-elle d'englober les actions d'autres personnes? Nous avons déjà fait état d'une affaire survenue en Ontario dans laquelle des photos montrant un certain joueur de hockey nu ont été publiées en ligne par un tiers. Le tribunal a conclu que la marque représentée par l'athlète n'était pas autorisée à mettre fin à la relation, en partie parce que la clause de moralité incluse dans l'entente permettait une telle résiliation en réponse aux propres actions de la personne, et non à celles d'un tiers.
  • De quelle façon la clause est-elle formulée? Une terminologie vague, par exemple un énoncé indiquant qu'un partenariat peut être résilié en cas d'« activité immorale » ou de « comportement qui choque la conscience publique », reste ouverte à interprétation. Afin d'éviter une dispute potentielle d'interprétation, la formulation de ces clauses doit être claire et sans ambiguïté.
  • La clause peut-elle être déclenchée par des agissements survenus hors des limites de la durée du contrat? Par exemple, qu'arrive-t-il si d'anciennes actions ou déclarations controversées sont révélées pendant la durée de l'entente d'un représentant d'une marque, ou si cela se produit lorsque le représentant bénéficie d'avantages postérieurs à l'entente? Ces questions sont particulièrement importantes à l'ère des médias sociaux, car, dans plusieurs exemples récents très médiatisés, des commentaires controversés publiés en ligne il y a plusieurs années sont revenus hanter leurs auteurs. Demandez-vous si une clause de moralité doit être déclenchée en fonction du moment où les actes ou les allégations deviennent publics, par opposition au moment où ils se sont produits.
  • De quelle façon la clause de moralité interagit-elle avec le reste de l'entente? Les fonds investis peuvent-ils être recouvrés lorsque la clause est déclenchée? Qu'adviendra-t-il du matériel publicitaire déjà sur le marché?
  • Qui gérera les communications en cas de scandale ou de controverse? L'entreprise peut indiquer que, si une controverse déclenche la clause de moralité, elle aura le contrôle (ou un droit de préapprobation) sur toutes les communications publiques relatives au problème, y compris les déclarations publiées dans les médias sociaux, dans les médias d'information, etc.

De plus en plus, les personnes qui représentent une marque sont considérées comme étant une extension de la marque elle-même, et des clauses de moralité bien étayées contribueront à assurer que les valeurs d'une marque sont bien représentées. La communication est essentielle pour garantir que toutes les parties comprennent leurs obligations et les valeurs communes qu'elles veulent promouvoir.

Enfin, lorsqu'une clause de moralité est en vigueur, il est important pour l'entreprise de surveiller le comportement de la personne qui la représente, tant en ligne qu'ailleurs, afin d'évaluer la réaction du public et de garder l'œil ouvert quant à toute attention médiatique générée.


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